Hillary Clinton pensait vraiment gagner les dernières élections et semble avoir beaucoup de mal à se remettre de cette défaite qui, il faut bien avouer, était tout sauf prévisible. C’est ce qui ressort de la lecture de son livre qui fait aussi état d’une certaine irritation vis-à-vis de Bernie Sanders. Il faut remarquer qu’il n’y a pas de point d’interrogation dans le titre donc l’objet du livre est de raconter ce qui s’est passé plus que de se poser la question de savoir pourquoi l’improbable est arrivé. Car on pourra dire tout ce qu’on veut mais les statistiques et les sondages donnaient Hillary Clinton pendant tout le cycle de l’élection générale c’est-à-dire après que les deux candidats ont accepté la nomination de leur parti respectif, c’est-à-dire en juillet.
Pendant ces trois mois, entre août et novembre 2016, Hillary Clinton a toujours eu une marge d’avance assez confortable sur son opposant. Au final, elle l’a emporté avec trois millions de voix d’avance . C’est le système électoral américain un peu compliqué qui a donné la victoire à Donald Trump. Et ce dernier fait depuis comme s’il avait largement gagné et reste obsédé par « Crooked Hillary » et « Failing Obama ». Il n’est quasiment pas une semaine sans qu’il publié un tweet pour attaquer ou l’autre. Et il ne rate pas une occasion pour en faire un critique en règle sur quelque sujet que ce soit. Par ailleurs, pour faire oublier ces trois millions de voix, Donald Trump n’a pas hésité à affirmer que les défaillances dans les procédures de votes lui avaient coûté trois millions de voies. Trois millions comme par hasard. Bien entendu, les faits réels indiquent le contraire. Il faudrait faire appel aux alternative facts pour corroborer cette hypothèse.
Dans le chapitre « Why », en fin d’ouvrage, Hillary Clinton fait l’inventaire des paramètres qui ont causé sa défaite. Ils sont connus et il n’y a aucune surprise. Dans cette longue liste, la lettre de James Comey et l’influence russe tiennent, à juste titre, une place importante. Indépendamment des qualités des deux candidats – celles d’Hillary sont connues tout autant que ses faiblesses, les qualités de Donald Trump beaucoup moins et restent à découvrir. Espérons que les trois ans à venir sans trouver de réponse permettront de tourner la page.
Barack Obama avait fait naître beaucoup d’espoir que les Etats-Unis avaient plus ou moins normalisé la question raciale. En fait, selon Christopher Parker, professeur de sciences politique de l’Université de Washington, explique qu’en fait Obama a créé une sorte de reflux parmi les électeurs blancs. Il y a également une autre cause qu’Hillary Clinton mentionne mais sur laquelle elle ne s’étend pas trop : les changements de réglementation pour voter.
Un article récent intitulé Rigged: How Voter Suppression Threw Wisconsin to Trump And possibly handed him the whole election publié par le mensuel Mother Jones se penche sur le cas du Wisconsin pour montrer que les restrictions qui ont été imposées quasi exclusivement dans des Etats gouvernés par des Républicains ont joué un rôle majeur et plus important qu’on ne le dit habituellement.
Dans une partie intitulée Voter Suppression (p118), Hillary Clinton évoque assez largement ce facteur et rappelle que la Cour Suprême a défait en 2013 des pans entiers de la loi Voting Right Act de 1965 selon laquelle des Etats du Sud devaient être surveillés sur les procédures mis en œuvre pour le vote. La loi de 1965 s’appliquait a 9 Etats du Sud et six villes ou comtés dans 6 autres états ayant une longue tradition de discrimination dans les procédures de votes.
« It was the worst decisions the court ever made. By 2016, fourteen states had new restrictions on voting, including burdensome ID requirements aimed at weeding our strudents, porr people, the elderly, and people of color. Republicains in many states also limited the number and hours of polling places, curtailed early voting and same-day registration, scrapped language assistance for non-English speakers, and purged large numbers of voters from the rolles, sometimes erroneoussly. Ohio (un des swing states) alone has removed up to two millions voters since 2011 ».
Grace à une majorité de 77 000 voix dans ces trois états,
les 46 Grands Electeurs sont revenus à Donald Trump
et lui ont donné la victoire. S’en sont suivi des analyses très élaborées
sur le fait que les démocrates avaient perdu
le soutien des classes moyennes blanches.
Et si les restrictions de votes n’étaient pas le principal facteur explicatif ?
« Dans le Wisconsin, where I lost by just 22 748 votes, a study from Priorities USA (Un Super PAC soutenant Hillary Clinton) estimated that the new voter ID law helped reduce turnout by 200 000 votes, primarly from low-income and minority areas » poursuit Hillary Clinton. En 2012, Barack Obama avait remporté le Wisconsin avec un écart de 7 points.
Le Wisconsin est un état très civique connu par une forte participation aux élections. En 2008 et 2012, il se situait en deuxième position des Etats sur ce critère. En 2016, cette participation a fortement chuté suite aux restrictions imposées. Une partie importante de cette baisse (41 000 votants en moins) est intervenue dans la seule ville de Milwaukee (Ville baptisée The Selma of the North dans les années 60), où Clinton a largement gagné (77-18).
Le problème est que le mouvement n’est pas terminé car les Congrès des Etats contrôlés par des Républicains ont voté plus de restrictions en 2017 qu’en 2016 et 2015 réunis. Clairement si la démographie joue en faveur des démocrates, les changements dans les procédures de vote joue largement aux Républicains. La grande différence est dans le premier cas, ce sont les électeurs qui décident de leur avenir alors que dans le second, ce sont les élus qui changent le système afin qu’il leur soit favorable. La démocratie en marche contre la démocratie détournée.