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Vaccination Covid : comment briser le plafond de verre ?

C’est par un tweet publié le 26 juillet qu’Emmanuel Macron annonçait que la France avait franchi la barre des 40 millions de vaccinés contre la Covid-19 avec un record de 4 millions de vaccinés en 4 jours. Et en dépit des résistances qui se manifestent un peu partout en France – de manière visible mais assez limitée -, il affiche l’objectif des 50 millions de Français ayant reçu une première dose à la fin du mois d’août.

C’est donc 60 % de la population qui, avant la fin juillet, a reçu une première de vaccin, un chiffre supérieur à celui observé aux Etats-Unis pourtant cités en modèle il y a seulement quelques semaines (plusieurs pays d’Europe sont dans la même situation). Avec une proportion de citoyens pleinement vaccinés (ayant reçu les deux doses) à peu près comparable. Et la dynamique de vaccination est actuellement clairement favorable à la France même si Joe Biden essaye de relancer l’opération de vaccination.

Que s’est-il passé ? Tout simplement, que les Etats-Unis ont démarré plus vite que la France, en particulier parce qu’ils avaient des doses disponibles avant l’Europe, mais qu’ils ont atteint le « plafond de verre » plus tôt. Certes, ce plafond n’est pas immuable et il évolue plus ou moins vite avec le temps. Car la population des non vaccinés est assez hétéroclite allant des « antivax » par principe (par ignorance ?) à ceux qui hésitent encore souhaitent recueillir plus d’assurance en passant par les attentistes, sans oublier ceux qui habitent des zones moins bien couvertes par l’infrastructure vaccinale. En France, à la fin juillet, la proportion des antivax est estimé à 16 %.

Face une reprise soudaine de l’épidémie avec le variant delta qui change complètement la donne (Covid-19 : A un delta près !), le discours ambiant et les décisions des deux côtés de l’Amérique évoluent dans le même sens. En France, le discours d’Emmanuel Macron du 12 juillet a marqué un tournant notamment avec le lancement du pass sanitaire. Comme il est assez difficile de rendre la vaccination obligatoire, l’idée du pass sanitaire qui sera généralisé le 9 août prochain est assez simple : limiter l’accès aux activités aux personnes qui peuvent présenter un pass sanitaire. Mais un pass sanitaire qui ne repose que sur la preuve du test est un document sans grande valeur car il est très éphémère. C’est presque un pass vaccinal qui ne dit pas son nom.  

La loi rend obligatoire la vaccination des personnels des hôpitaux, cliniques, Ehpad et maisons de retraite, sapeurs-pompiers, de certains militaires, ainsi que pour les professionnels et bénévoles auprès des personnes âgées, y compris à domicile. Elle a bénéficié d’une assez large majorité 156 voix pour, 60 contre et 14 abstentions. Les professionnels qui refusent la vaccination seront interdits d’exercer, avec suspension du salaire. Elle a suscité des réactions. Le samedi 24 juillet, les manifestations contre le pass sanitaire ont réuni quelque 160 000 personnes, un nombre relativement faible mais le gouvernement reste assez prudent sur l’avenir de ce mouvement. L’expérience du mouvement des gilets jaunes le pousse à une certaine circonspection.

De l’autre côté de l’Atlantique, la dimension fédérale empêche le gouvernement de prendre des mesures qui s’imposeraient à tous les états. Mais le mouvement est assez similaire à celui observé en France avec des décisions spectaculaires. Le maire de New York Bill de Blasio a décidé d’imposer à tous les fonctionnaires de la ville (environ 340 000 personnes) d’être vaccinés. Puis Joe Biden annoncé une mesure comparable à tous les fonctionnaires fédéraux (un peu plus de 4 millions de personnes). C’est ensuite le secteur privé qui s’y est mis. Google, Facebook, Netflix ont annoncé des mesures similaires. Et il ne fait guère de doute que les grandes entreprises suivent. Et même, nombre d’élus républicains (pas tous) ont clairement appelé les Américains à se faire vaccinés. Mais avec les nouvelles recommandations du CDC (Centers for Disease Control and Prevention) sur les gestes barrières, notamment le port du masque[1], les habitués de la pseudo-révolte antiscience se sont à nouveau manifestés. Parmi les indécrottables de ce mouvement, le gouverneur de la Floride Ron DeSantis s’est moqué de ces recommandations et indiqués qu’il était hors de question qu’il les suive. Et pourtant la situation est assez critique. Avec un peu plus de 6 % de la population, la Floride représente plus de 20 % des cas de Covid-19. Avec un discours ambigu sur la vaccination : un jour il la soutient, le lendemain, il fait campagne contre Anthony Fauci, directeur de l’Institut national des allergies et maladies infectieuses.

Face au nouveau défi posé par le variant delta, le discours change de ton aussi et porte de plus en plus la responsabilité de la situation sur les non vaccinés. Témoin, la déclaration peu habile et un tantinet condescendante sur la forme, d’Emmanuel Macron en déplacement en Polynésie française devant des soignants, pour rappeler l’importance de la vaccination. Mais finalement assez juste sur le fond.

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Tonalité encore plus vigoureuse de David Frum, éditorialiste conservateur du magazine The Atlantic, anti-Trump de la première heure, dans un article récent à charge contre les non vaccinés (Vaccinated America Has Had Enough ; In the United States, this pandemic could be almost over by now. The reasons it’s still going are pretty clear). L’idée défendue par l’ancien ancien auteur des discours de George W. Bush est assez simple : si les Américains s’étaient fait vaccinés en nombre suffisant, la situation serait surmontée. Et il pointe clairement du doigt la fracture d’ordre politique face à ce phénomène. En avril dernier, la proportion des habitants pleinement vaccinés était de seulement 2 points supérieur dans les comtés ayant voté pour Joe Biden (22,8 % contre 20,6 % dans les comtés ayant votés pour Donald Trump). Au début juillet, cet écart était passé à 12 points (46,7 % contre 35 %). Quant aux intentions de vaccination, l’écart est encore plus grand : 88 % des démocrates souhaitent être vaccinés dès que possible contre 55 % pour les républicains.

“Yes, I’m very sorry that so many of the unvaccinated are suffering the consequences of their bad decisions. I’m also very sorry that the responsible rest of us are suffering the consequences of their bad decisions”.
David Frum

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En France, des études similaires[2] sur la vaccination ont été réalisées et mettent en évidence une France divisée sur le plan de la vaccination entre Nord-Ouest et Sud-Est, entre centres urbains et périphéries, ainsi qu’entre communes riches et pauvres. Mais elles sont moins probantes que les études américaines sur sa dimension politique (lire l’éditorial de Paul Krugman dans le New York Times : How Covid Became a Red-State Crisis).


[1] The Centers for Disease Control and Prevention (CDC) said on Thursday that 69.3% of U.S. counties had transmission rates of COVID-19 high enough to warrant indoor masking in public spaces and should immediately resume the policy.

[2] Données calculées par le géographe de la santé Emmanuel Vigneron

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