« Jamais content,
carrément méchant »
L’histoire du voyage de Biden à Kiev rapportée par l’Associated Press est assez intéressante, juste d’un point de vue logistique.
– Samedi soir 18 février : Biden assiste à la messe, visite le musée d’histoire américaine et sort dîner dans un restaurant de Washington DC.
– Dimanche matin, avant l’aube : Biden monte à bord du C-32 et part pour l’Allemagne.
Le décollage est à 4 h 15.
– Une dizaine d’heures plus tard le dimanche matin : ravitaillement à la base aérienne de Ramstein en Allemagne.
– Dimanche en début d’après-midi : atterrissage à l’aéroport de Rzeszów-Jasionka en Pologne.
– Voyage en voiture pendant une heure à la frontière ukrainienne.
– Monte à bord d’un train à la gare polonaise de Przemysl Glowny.
– Voyage en train pendant 10 heures à Kiev.
– Arrivée à la gare de Kiev-Pasazhyrsky vers 8 heures, heure locale, lundi matin.
– Il est conduit directement au palais Mariinsky, la résidence officielle du président ukrainien, où il a rencontré Zelensky.
Joe Biden fera un discours un plus tard dans lequel il réaffirme le soutien des Etats-Unis aussi longtemps que nécessaire ce qui ne signifie pas sans limite (les avions ou les missiles longue portée par exemple, pour l’instant).
Ceux qui n’arrêtent pas d’affirmer que Joe Biden est atteint par la limite d’âge et qu’il « sucre les fraises » devraient en être pour leur frais.
« You remind us that freedom is priceless. It’s worth fighting for for as long has it takes ». C’est ainsi que Joe Biden finissait son discours de Kiev un an après le début de cette guerre. Le lendemain Joe Biden était à Varsovie alors qu’une délégation de cinq élus républicains étaient à Kiev pour rencontrer Volodymyr Zelensky montrant ainsi une unité bipartisane sur le soutien des Etats-Unis à l’Ukraine.
Pas tout à fait. Matt Gaetz, représentant de Floride qui s’est fait remarquer lors de la dernière élection du speaker, a récemment introduit une résolution baptisée « Ukraine Fatigue » appelant à arrêter d’aider l’Ukraine et à « forcer » un accord de paix avec la Russie (peu importe les conditions).
118TH CONGRESS
1st SESSION H. RES. 113
Expressing the sense of the House of Representatives that the United States must end its military and financial aid to Ukraine, and urges all combatants to reach a peace agreement.
– Whereas, since the war began in Ukraine, the United States is the top contributor of military aid to Ukraine compared to its counterparts;
– Whereas the United States has appropriated more than $110,000,000,000 of military, financial, and humanitarian aid to Ukraine;
(Pour allonger la résolution, Matt Gaetz liste tous les équipements livrés à l’Ukraine)
…
– Whereas, by providing assistance to Ukraine, the United States is inadvertently contributing to civilian casualties;
…
SEC. 2. SENSE OF THE HOUSE OF REPRESENTATIVES.
It is the sense of the House of Representatives that the United States must end its military and financial aid to Ukraine; and the House of Representatives urges all combatants to reach a peace agreement.
Mais les élus de l’Ultra-right ne se sont pas arrêtés là. Pour eux, le voyage à Kiev est la preuve que Joe Biden n’est pas concerné par le sort des Américains. Un refrain connu chez les supporters America First. Pour preuve, il ne s’est pas rendu à East Palestine où le train rempli de produits chimiques a déraillé. Rappelons que le gouverneur de l’Ohio Mike De Wine a rejeté l’aide fédérale que Joe Biden avait proposée. Sur ce registre, leur maître à tous, Donald Trump, est, lui, allé à East Palestine et l’a fait savoir (plus d’une dizaine de messages sur son compte Truth Social), photos à l’appui. Il a « aidé » les populations locales en distribuant des bouteilles à la marque Trump (il faut oser !) et des bouteilles de moindre qualité a-t-il tenu à préciser. Dans l’indécence, on peut difficilement faire mieux.
L’Ultra-right a poussé le bouchon encore plus loin. Tucker Carlson et J.D. Vance, sénateur de l’Ohio élu en novembre dernier, ont réfuté l’idée selon laquelle l’allègement de la réglementation mis en place sous l’administration Obama et décidé par Donald Trump pouvait être une quelconque explication de l’accident. Rappelons que le train comportait 151 wagons représentant une longueur de 3 km et un poids de 18 000 tonnes.
Quelques jours plus tard, un train de quatre voitures a déraillé à Riverband en Californie et un autre de 31 wagons transportant du charbon a déraillé à Gothenburg dans le Nebraska.
Le fret ferroviaire américain est en crise depuis plusieurs années, les compagnies se sont lancées dans une stratégie d’optimisation des profits à tout crain en réduisant les coûts, tout particulièrement le nombre de salariés. The Surface Transportation Board, une agence fédérale de régulation, estime que les compagnies ont réduit de 30 % le nombre de leurs employés entre 2016 et 2022. Cette évolution est le résultat de la mise en place d’un système connu sous l’appellation Precision Scheduled Railroading – adopté par 6 des 7 compagnies les plus importantes – un peu l’équivalent du Just in Time.
La bataille du rail n’a pas eu lieu
La bataille du rail ou le protectionnisme de mauvaise foi
Fox News s’en est donc pris à l’administration Biden en général (ça ne fait pas de mal !) et à Pete Buttigieg, le ministre des Transports, en déclarant que cet accident était la preuve que l’administration Biden is « spilling toxic chemicals on poor white people ». C’est exactement ce qu’a déclaré Jesse Watters sans sourciller. Quant à Charlie Kirk, le surdoué des idées malfaisantes, il n’hésite pas à parler de « war on white people” waged by the “Biden regime,” which is supposedly allowing the “poisoning” of “citizens of eastern Ohio. »
Ils ont pris prétexte d’une déclaration peut-être maladroite mais certainement mal interprétée en exploitant une partie de déclaration selon laquelle « We have too many White Construction workers ». Comme l’explique Greg Sargent dans une tribune publiée par le Washington Post : « The relevant Buttigieg comments were about the importation of White workers to build projects in high-unemployment minority communities, and about how to create opportunities for minority construction workers ». (The right fans a repulsive campaign to racialize the Ohio train disaster).
D’une catastrophe certes pas vraiment naturelle et dont les responsabilités seront à faire, les républicains MAGA sont prêts à en faire une exploitation politique immédiate sans vergogne. Et à faire le lien entre deux événements, la guerre en Ukraine et le déraillement d’un train dans l’état de l’Ohio, qui n’ont pas de rapport entre eux.
JESSE WATTERS : Does this guy Regan (1) even know anything about the environment? Well, we looked into him, and the only reason he was nominated to run the EPA was because he promised to fight off environmental racism.
Is this his idea of fighting environmental racism? Spilling toxic chemicals on poor white people in Ohio? He doesn’t have time to worry about a cloud bomb of toxic fumes over Ohio?
(1) Michael Stanley Regan est administrateur de l’Agence de protection de l’environnement (EPA) des États-Unis depuis le 11 mars 2021.