Samedi 20 juin, Donald Trump va tenir son vrai premier meeting de campagne d’après crise Covid-19 à Tusla dans l’Oklahoma. Pourtant, la crise n’est en fait pas terminée. Alors que Mike Pence, qui avait dirigé la cellule de crise Covid-19 a publié une chronique dans le Wall Street Journal affirmant que le risque de seconde vague n’existe pas (There Isn’t a Coronavirus ‘Second Wave’), dans lequel, comme à son habitude, il en profite pour dégouliner de flatteries vis-à-vis de Donald Trump (« Thanks to the leadership of President Trump and the courage and compassion of the American people, our public health system is far stronger than it was four months ago, and we are winning the fight against the invisible enemy »), Anthony Fauci, le conseiller médical, a répondu à quelques heures d’intervalle que la première vague n’était pas encore terminée.
C’est donc dans ses conditions que Donald Trump réunira 19 000 supporters, tassés dans une enceinte fermée – The Bank of Oklahoma (BOK) Center -, et qui crieront à la gloire de leur chef. Un lieu idéal pour créer un foyer d’infection. Sachant que l’ Oklahoma est l’un des 20 états où la crise du Coronavirus est en pleine progression. Il est vrai que depuis plusieurs semaines, d’autres Américains se réunissent dans les rues à la suite du meurtre de George Floyd.
Ce meeting sera intéressant, car il donnera le ton de la campagne des cinq prochains mois : Donald Trump va-t-il essayer de réunir le pays dans les circonstances difficiles actuelles où va-t-il redoubler d’effort pour mobiliser ses troupes et diaboliser tous ceux, de plus en plus nombreux, qui ne sont pas d’accord avec lui, ne le soutiennent pas ou l’ont lâché ?
Pour autant, le lieu et la date initiale, le 19 juin, de ce meeting, ne peuvent qu’attirer l’attention. D’abord le lieu. Alors que la question du racisme et de la police a traversé le pays tout entier, le choix de Tulsa est étrange puisqu’il est le lieu du plus important lynchage de Noirs de l’histoire des États-Unis. Dans les années, 20 (les fameuses roaring twenties), la ville de Tusla connaît un boom économique sans précédent grâce au pétrole. Les Noirs profitent de cette croissance économique, une partie d’entre eux s’installent dans un quartier baptisé Black Wall Street.
En mai 1921, Dick Rowland, un jeune cireur de chaussures noir, est accusé d’une prétendue agression sexuelle sur une jeune fille blanche. Il est conduit au tribunal devant lequel se rassemble une foule de Blancs en colère prête à en découdre. Le journal local titre ce jour-là : « lynchage d’un nègre ce soir ». On ne peut être plus clair sur la forme de justice poussée alors. C’est alors que les digues sociales rompent et que les jours qui suivent conduisent à des attaques en règle contre la communauté noire. Des avions utilisés pour l’épandage agricole sont même réquisitionnés pour larguer des bombes incendiaires sur les maisons du quartier noir. Plus de 1000 habitations sont détruites impactant près de 80 % des 11 000 habitants noirs de ce quartier. On dénombre quelque 300 victimes. Certains cadavres seront jetés dans la rivière Arkansas, d’autres seront empilés dans une fosse commune. En mai 2018, le maire ordonne la reprise des fouilles pour identifier les fosses communes. Le 18 décembre 2019, une centaine de corps sont retrouvés.
Maintenant la date. Le meeting devait initialement se tenir le 19 juin, June 19th, appelé aussi Juneteenth, également connu sous le nom de jour de l’Émancipation (Emancipation Day). Le 19 juin qui commémore l’annonce de l’abolition de l’esclavage dans l’État américain du Texas en juin 1865, et plus généralement l’émancipation des esclaves afro-américains à travers tout le Sud confédéré. La proclamation de l’émancipation des esclaves a été officiellement publiée le 1er janvier 1963 mais son application nécessita plusieurs mois pour atteindre le Texas le 19 juin 1865 lorsque le général Gordon Granger lu l’ordre fédéral dans la ville de Galveston.
Devant les nombreuses protestations sur l’inopportunité de la date, Donald Trump a finalement repoussé le meeting au 20 juin.
On peut penser que choisir un endroit à une telle date n’est pas le fruit du hasard et qu’il donne une indication sur la position que Donald Trump entend adopter dans les mois à venir.
« Divide and Conquer » était le slogan des nazis rappelle James Mattis (James Mattis Denounces President Trump, Describes Him as a Threat to the Constitution) que semble avoir adopté à son profit Donald Trump, notre réponse est « In Union there is Strength. »
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