Donald Trump semble avoir fait sienne la maxime de Charles Pasqua – qui apparaît comme un gentil bisounours face au 45e hôte de la Maison-Blanche – selon laquelle « La politique, ça se fait à coups de pied dans les couilles ». Si la politique est un sport de combat, elle ressemble aujourd’hui plus à l’Ultimate Fighting, dans ses premières versions où tous les coups étaient permis, qu’au « Noble Art ». Recevoir des coups n’est pas particulièrement amusant, si en plus il n’y aucune règle, c’est encore beaucoup moins drôle.
D’ailleurs, le président américain devrait consulter le bréviaire de l’ancien ministre de l’Intérieur de Jacques Chirac et pourrait mettre à profit d’autres conseils. Par exemple, il faut enquêter sur les enquêteurs, version adaptée de « Il faut terroriser les terroristes ».
Donald Trump a complètement changé son fusil d’épaule quant à la stratégie à mener face à l’enquête de Bob Mueller. Dans un premier temps, lorsque l’enquête n’en était qu’à ses débuts, le président semblait serein qu’elle n’arrive pas à son terme. En réponse à une question à un journaliste, il avait répondu qu’il « était prêt à 100 % à répondre à l’enquêteur en chef. Les mois passant, l’enquête avançant, ses avocats semblaient coopératifs – au moins en apparence – et prêts à fournir tous les informations et documents demandés.
Et puis Rudy Giulani est arrivé. Celui qui avait été surnommé le « Mussolini de New York », avait déclaré tout de go qu’il réglerait toute cette affaire en moins de 15 jours. Omniprésents sur les médias TV, il a fait toutes sortes de déclarations pour, au final, embrouiller l’affaire et mettre son client un peu plus dans la difficulté. D’aucuns ont alors fait remarquer qu’il n’avait pas pratiqué le droit depuis bien longtemps et qu’il jouait plutôt le rôle d’un communiquant que d’un avocat. De telle que Donald Trump a été obligé de faire une déclaration byzantine selon laquelle « Rudy est un type épatant, mais il est nouveau sur le dossier et il va bientôt en connaître les tous les détails ». Bref, Rudy a fait de grosses con…ies dans un langage que Donald Trump maîtrise pourtant à la perfection mais qu’il n’a pas utilisé pour clouer au pilori son nouvel avocat.
L’enquête avance sans que personne ne sache vraiment où en est exactement Bob Mueller et ce qu’il sait. De nombreuses spéculations sont proposées avec assez peu de fondements. Mais un élément assez bien partagé par tous les observateurs, l’ancien patron du FBI avance méthodiquement et ne se laisse pas intimider par Donald Trump, ses associés et ses soutiens indéfectibles, au premier rang desquels beaucoup de congressmen républicains et Sean Hannity sur Fox News and Friends qui, soir après soir, a débusque le scandale du siècle.
Depuis quelques jours, on observe un revirement complet dans la stratégie de Donald Trump qui a désormais le choix entre deux options : révoquer Rod Rosenstein pour nommer un nouveau numéro deux du DOJ prêt à virer Bob Mueller – l’équivalent d’une nouvelle version du Saturday Night Massacre – ou dénigrer l’enquête et ses enquêteurs et contre-attaquer. La première option présente l’inconvénient qu’elle est très voyante. Elle est risquée sur le plan politique, face à un parti républicain devenu docile mais dans lequel certains ont encore quelques velléités de résister au président. Elle est encore plus risquée dans l’opinion publique. La deuxième option est sans doute aussi efficace et moins risquée. C’est celle que Donald Trump a retenue pour l’instant sans pour autant s’interdire d’employer la première si nécessaire.
Une information publiée dans la presse lui a permis de s’engouffrer dans cette voie. Face à des suspicions de contacts entre des officiels russes et des responsables de l’équipe de campagne du candidat Trump, le FBI a creusé pour savoir ce qu’il en était et lancé une investigation. Il n’en fallait pas beaucoup plus pour que Donald Trump transforme cette initiative en une opération politique orchestrée par Barack Obama pour l’espionner lui et son équipe de campagne. Il s’est donc jeté à corps perdu dans cette voie en vociférant qu’il s’agissait là du plus grand scandale de l’histoire des Etats-Unis.
Ce dénigrement en règle de Bob Mueller et de son équipe vise à réduire la portée des éventuelles conclusions qui pourraient sortir de leur enquête. Sa base ne demande que ça et les opposants devront batailler ferme pour faire en sorte que la vérité ne se transforme en Fake News et en Witch Hunt. Il a quelques semaines déjà la proportion des Américains pensant que l’enquête est légitime était tombée à 44 % contre 53 % pour ceux considérant que c’était une manœuvre politique. Mais la partie est loin d’être terminée.