Ils ont une qualité : l’obstination. Un défaut : l’idéologie. L’obstination ; voilà plus de 7 ans qu’ils répètent inlassablement repeal and replace. Donald Trump s’était fait leur porte-parole. Il l’avait affirmé, dès son entrée dans le bureau ovale, il remplacerait l’Obamacare par une nouvelle loi qui ferait plus pour moins cher. Ce n’est pas le coiffeur qui rase gratis mais Donald. L’idéologie : l’Obamacare est un désastre, l’individual mandate va à l’encontre de la liberté, l’Etat fédéral n’est pas le bon niveau pour gérer l’assurance maladie, et c’est le marché doit décider de l’organisation du système de santé.
Et puis, les travaux parlementaires ont traîné. Le Congrès a choisi la méthode dite de la réconciliation qui permettait de voter la loi avec une majorité simple au Sénat (et non la supermajorité des 60 voix pour les lois habituelles). La Chambre des Représentants avait voté une loi avec une très courte majorité mais elle l’avait voté. Il avait organisé une petite garden party dans les jardins de la Maison Blanche du jamais vu.
Mais il restait encore l’étape du Sénat avec une problématique assez simple : il fallait arriver à trouver une loi qui réunisse une majorité de 50 voix, en cas d’égalité, le Vice-Président peut emporter la décision. Mais la tâche n’était pas aisée car certains extrémistes exigeaient une loi radicale et d’autres, plus modérés, ne souhaitaient pas faire passer une loi trop extrême.
Dans un tweet du 20 septembre, Donald Trump a écrit qu’il ne signerait pas une loi qui n’inclurait pas une couverture aux personnes porteuses de pre-existing conditions (affections médicales antérieures). Mais, aux dires même de certains républicains, il ne sait pas ce qu’elle contient.
Après plusieurs essais, la loi est arrivée dans l’hémicycle pour le vote juste avant les vacances. Et là, trois sénateurs ont fait défaut : Susan Collins (R-Maine), Lisa Murkowski (R-Alaska) et surprise, John McCain qui un peu à la surprise générale à apporter son concours à cette défaite des républicains. Bien mal lui en a pris car il s’est attiré les foudres de Donald Trump lors de son rallye dans l’état de l’Arizona, celui-là même où il est sénateur. Suite à ce cuisant échec, les sénateurs républicains ont dû subir les anathèmes de Donald Trump sous forme de tweets bien chargés.
Et puis, ils sont partis en vacances et on pensait que la réforme de la loi sur la santé était passée aux oubliettes. Une véritable meurtrissure pour les républicains qui n’ont pas réussi à voter une seule loi. De retour de vacances, le chantier semblait s’orienter sur une réforme fiscale, autre promesse du locataire de la Maison Blanche. Et puis, sous l’impulsion du tandem Bill Cassidy (R-La) et Lindsey Graham (R-S.C.) assisté de l’ancien candidat à la présidence Rick Santorum, aujourd’hui commentateur sur CNN, ont remis l’ouvrage sur le métier en ficelant à la hâte une nouvelle mouture encore pire que les précédentes.
Dans le jeu du trop et trop peu, c’est Susan Collins et Rand Paul qui ont remis le couvert. De son côté, John McCain a fait savoir qu’il ne voterait pas ce nouveau projet ce qui lui laisse peu de chances de passer : “I cannot in good conscience vote for the Graham-Cassidy proposal,” Mr. McCain said. “I believe we could do better working together, Republicans and Democrats, and have not yet really tried. Nor could I support it without knowing how much it will cost, how it will affect insurance premiums, and how many people will be helped or hurt by it.”
Les promoteurs de cette loi poussent un vote avant le 30 septembre, date au-delà de laquelle la supermajorité de 60 voix sera nécessaire pour faire passer tout nouveau texte. Peu importe qu’il n’y ait pas eu de débat, peu importe que le CBO (Congressional Budget Office) n’est pas eu le temps de chiffrer la nouvelle loi, peu importe que la grande majorité des associations professionnels du secteur soit contre (American Health Insurance, American Medical Association, American Hospital Association, AARP pour n’en citer que quelques-unes), peu importe qu’une écrasante majorité des Américains soient contre, les sénateurs veulent leur loi.
Cette nouvelle loi supprimera l’individual mandate qui est insupportable aux républicains car elle oblige les Américains à prendre une assurance et les sanctionne dans le cas contraire. Mais c’est pourtant la meilleure condition pour un système d’assurance fonctionne au mieux. L’idée de souscrire une assurance qui correspond au mieux à ses besoins est presque contradictoire avec la notion d’assurance qui est de mutualiser les risques sur le nombre le plus élevé de personnes en espérant que le moins possible devront en bénéficier. Ce qui peut apparaître paradoxal : prendre une assurance alors qu’on en n’a pas besoin. Les jeunes peuvent par exemple se dire qu’ils n’en n’ont pas besoin jusqu’au jour où la maladie arrive mais alors il n’y a plus d’argent pour financer leurs soins.
Cette nouvelle loi fera perdre à des millions d’Américains leur couverture maladie. L’ancienne version portait ce nombre à une trentaine de millions, cette nouvelle version ne devrait pas en être très loin.
L’autre point concerne les pre-existing conditions qui seront laisser à la discrétion des gouverneurs. Les républicains affirment que cette loi ne remet pas le principe selon lequel une compagnie d’assurance ne peut refuser une police à une personne dans ce cas mais il ne mentionne rien sur le prix.
Enfin, le point central avec cette loi est que le budget sera en diminution donc ne permettra pas le même niveau de remboursement et donc mettra en difficulté nombre d’assurés.
Barack Obama est même monté au créneau pour critiquer vertement ce projet de loi rappelant que l’Obamacare doit certainement être améliorée mais qu’elle est meilleure que ce qui existait précédemment.
https://youtu.be/GXhDMKo0Nug
La motivation des républicains avec cette nouvelle loi est double :
- Voter un loi (n’importe quelle loi) afin de pouvoir dire que la promesse du repeal and replace a été tenue ;
- Réduire les dépenses pour pouvoir voter une réforme fiscale allant dans le sens de la réduction des impôts pour les entreprises et les classes les plus aisées et ainsi être neutre sur le plan budgétaire.