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Retour sur les droits de douane Hawley-Smoot

Les commentaires sur la décision de Donald Trump d’imposer des droits de douane à l’ensemble des pays de la terre, sauf quelques « alliés » comme la Russie, la Biélorussie, la Corée du Nord (les républicains n’ont pas bronché) font penser à des décisions politiques historiques comparables, celle prise pendant le mandat du président McKinley – la nouvelle référence du président Trump – et celle prise pendant la crise de 1929, Hawley-Smoot Act du nom de leurs deux auteurs. Penchons-nous sur cette dernière loi.

Le 6 novembre 1928, Herbert Hoover est très largement élu et gagne 407 grands électeurs contre 69 pour le démocrate Al Smith. L’atmosphère est au beau fixe, on est encore dans la vague des Roaring Twenties où les arbres peuvent pousser jusqu’au ciel. Les candidats promettaient la « prospérité indéfinie », incluant non seulement « le bon dîner », mais encore le « garage » (Histoire des États-Unis, R.B. Ny et J.E. Morpugo, Gallimard – 1961). « Il avait l’étoffe d’un grand président », mais peut-être pas les qualités requises pour affronter la grande crise qui s’annonce : « Il croyait au strict individualisme, au laissez-faire, à la survivance du plus capable, à la chance favorisée, à un système de profits dépourvu d’obstacles ».

Le 4 mars c’est le jour d’investiture, l’atmosphère est au beau fixe même si ce jour-là c’est la pluie qui accueille le nouvel hôte de la Maison-Blanche.

Le 28 mai 1929, la Chambre des représentants vote la loi Hawley-Smoot qui généralise les droits de douane de la loi Fordney-McCumber de 1922 et accompagne le basculement des États-Unis dans l’ère industrielle. Cette loi est votée assez largement (267-147). Les protectionnistes ont gagné. Mais il apparaît que de nombreux obstacles freineront l’avancement de cette loi avant qu’elle soit votée par le Sénat. L’administration en place considère que les droits de douane sont trop élevés. Et le lobby agricole est assez largement contre. Les élus se plaignent de la lourdeur des textes, mais apparemment ce n’est pas très nouveau. Pour préparer cette loi, la Commission Ways and Means a auditionné quelque 1100 témoins pour plus de 11 000 pages de prise de notes.

De fait, la loi ne sera votée par le Sénat que 14 mars 1930. Entre les deux votes, la grande crise de 1929 est passée par là et a changé la situation mondiale de fond en comble.

C’est le 14 mars 1930, à une courte majorité (44-42) que la loi est votée par le Sénat. La différence s’explique par le fait que la Chambre en 1929 était dominée par des républicains protectionnistes, élus surtout dans des régions rurales ou agricoles qui voulaient des droits de douane élevés pour protéger leurs produits (blé, porc, fruits…). Alors que Le Sénat, même s’il avait aussi une majorité républicaine, comptait plus de modérés et de républicains “internationalistes” (pro-commerce). Certains sénateurs venaient d’États industriels exportateurs, qui avaient beaucoup à perdre si les autres pays imposaient des représailles. La loi a augmenté les droits de douane sur plus de 20 000 types de biens importés, visant à protéger les industries américaines de la concurrence étrangère.

Elle sera signée par Herbert Hoover le 17 juin malgré de vives critiques et d’industriels.  

Comme un train peut en cacher un autre, les effets de la loi Hawley-Smoot sont difficiles à séparer de ceux de la crise, mais on peut avancer que cette loi n’a fait qu’aggraver les effets de la crise.

En réponse à cette mesure protectionniste, de nombreux pays ont augmenté leurs propres droits de douane sur les produits américains, déclenchant une guerre commerciale. Cela a conduit à une chute drastique du commerce mondial, avec une baisse de plus de 40 % des échanges internationaux. Les importations de produits européens aux États-Unis ont chuté de 75 %, et l’Europe a réduit ses importations en provenance des États-Unis des deux tiers. Comment séparer les effets de la crise et de loi sur l’économie ? Le krach d’octobre 1929 a fait chuter de la Bourse, provoquant une contraction de la consommation et de l’investissement aux États-Unis. Toutefois, malgré la crise boursière, les exportations semblaient tenir bon. C’est après l’adoption des droits de douane de mars 1930 que le commerce extérieur s’effondre brutalement, plus vite que l’économie intérieure. La crise a lancé la dépression, la loi Hawley-Smoot a aggravé la chute en provoquant une guerre commerciale mondiale.

Au-delà des conséquences économiques, la loi a eu des répercussions profondes sur les élections de 1932. Là encore, il est difficile de faire le distinguo entre la crise et la loi. Franklin Roosevelt est élu très largement avec 57 % des voix populaires et 89 % des grands électeurs (472-59). Au Congrès, la vague démocrate est encore plus forte. Le parti de l’âne gagne 97 sièges (72% des sièges), les républicains en perdent à peu près autant (-101 sièges).

Le mouvement sur le Sénat est plus limité en raison de l’organisation du vote (renouvellement par tiers). Toutefois, les républicains perdent 12 sièges sur 96. Les deux promoteurs de la loi éponyme, le représentant Willis Hawley et le sénateur Reed Smoot perdent tous les deux leur siège.

Les démocrates vont dominer la politique américaine pendant les cinquante ans à venir (même s’ils n’ont pas toujours la majorité). Même si la situation est différente, les républicains d’aujourd’hui devraient peut-être y réfléchir.

Une vidéo un peu longue, mais découpée en chapitres

Thomas Rustici of George Mason University and author of Lessons from the Great Depression talks with EconTalk host Russ Roberts about the impact of the Smoot-Hawley Act on the economy. The standard view is that the decrease in trade that followed Smoot-Hawley was not big enough to be a significant contributor to the Great Depression. Rustici argues that this Keynesian approach that looks at aggregate spending misses a crucial mechanism for understanding the impact of Smoot-Hawley. Rustici focuses on the impact of Smoot Hawley on bank closings and the money supply. Smoot-Hawley launched an international trade war that reduced world trade dramatically. This had large concentrated regional effects in the United States and around the world in areas that depended on trade. Those were the areas where the first banks collapsed, contracting the money supply via the fractional reserve banking system. Rustici argues that the Keynesian indictment of the price system ignores the policy failures that destroyed the institutions that make the price system work

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