De quoi se mêle un sénateur de Caroline du Sud dans les affaires du Nebraska ? Lyndey Graham, sénateur de la Caroline du Sud, soutien inconditionnel de Donald Trump, s’est rendu dans le Nebraska pour convaincre les élus à changer le système électoral de l’état et adopter le système du winner takes all en vigueur dans 48 états des États-Unis. Les deux arguments poussés par l’affidé de Donald Trump et les élus républicains : Le Nebraska est un état républicain, il ne doit pas donner une voix à Kamala Harris et potentiellement pouvoir emporter la décision ; Le Nebraska (et le Maine) doit faire comme les 48 autres États des États-Unis. Deux arguments spécieux. Le premier est ridicule et le second opportuniste, car lorsqu’il s’agit de l’IVG, les républicains n’arrêtent pas de clamer qu’il faut rendre le pouvoir de décision à chaque État.
Pourquoi une telle persévérance ? En cas d’égalité des voix de grands électeurs (269-269), c’est le Congrès qui décide avec une voix par État, ce qui donnerait la victoire à Donald Trump. Sur le fil du rasoir mais peu importe. N’est-ce pas ce qui est arrivé en 2000 où George W. Bush, après quatre semaines de tergiversation a gagné les élections grâce à l’aide de la Cour Suprême qui n’a empêché le recompte des votes dans certains comtés de l’état et ainsi donné la victoire au candidat républicain ?
Le système “winner-takes-all” (le gagnant remporte tout) est une caractéristique clé des élections présidentielles américaines, en particulier en ce qui concerne le Collège électoral.
La Constitution des États-Unis établit le Collège électoral comme mécanisme pour élire le président. Chaque État reçoit un certain nombre de grands électeurs, basé sur le nombre de ses représentants au Congrès (sénateurs et représentants). Sachant que la chambre des représentants est constituée en fonction de la population de chaque État et que le Sénat est organisé à raison de deux élus par État, quel que soit le nombre d’habitants. Les Pères fondateurs ont choisi ce système pour équilibrer les intérêts des petits et des grands États.
Au début, les États avaient différentes méthodes pour choisir leurs grands électeurs. Certains États utilisaient des législatures d’État, tandis que d’autres organisaient des élections populaires. Au fil du temps, la plupart des États ont adopté des élections populaires pour choisir leurs grands électeurs.
Le système “winner-takes-all” a émergé progressivement au cours du 19e siècle. Selon ce système, le candidat qui remporte le plus de voix dans un État reçoit tous les votes électoraux de cet État. Ce système a été adopté par la plupart des États pour simplifier le processus électoral et pour renforcer l’influence de l’État dans les élections présidentielles.
Le premier à invoquer la mise en œuvre de ce système a été Thomas Jefferson après avoir constaté que s’il avait été mis en œuvre dans l’État de Virginie dans les élections de 1796, il aurait gagné les élections. La Virginie et la Pennsylvanie avaient mis en place des systèmes d’élections populaires.
En 1824, la plupart des États avaient adopté des élections populaires pour choisir leurs grands électeurs. Cependant, certains États, comme le Delaware et la Caroline du Sud, continuaient à utiliser leurs législatures pour cette tâche.
En 1832, la Caroline du Sud était le dernier État à utiliser sa législature pour choisir les grands électeurs. Tous les autres États avaient adopté des élections populaires. En 1868, la Caroline du Sud a finalement adopté des élections populaires pour choisir ses grands électeurs, marquant la fin de l’utilisation des législatures d’État pour cette tâche.
En 1969, le Maine a adopté un système de répartition proportionnelle des votes électoraux par district congressionnel, devenant le premier État à s’écarter du système “winner-takes-all”. En 1991, le Nebraska a suivi l’exemple du Maine en adoptant un système similaire de répartition proportionnelle des votes électoraux par district congressionnel.
À la fin du 19e siècle, presque tous les États avaient adopté le système “winner-takes-all”. Cela a conduit à une polarisation accrue des élections présidentielles, où les candidats se concentrent sur les États pivots (swing states) qui peuvent basculer d’un parti à l’autre.
Aujourd’hui, lors des élections présidentielles, les citoyens américains votent pour un ticket présidentiel (président et vice-président). Dans la plupart des États, le candidat qui obtient le plus de voix dans l’État remporte tous les votes électoraux de cet État. Les grands électeurs se réunissent ensuite pour élire officiellement le président et le vice-président.
Deux États, le Maine et le Nebraska, n’utilisent pas le système “winner-takes-all”. Ils attribuent leurs votes électoraux proportionnellement aux résultats des districts et des votes populaires de l’État.
Le système “winner-takes-all” est souvent critiqué pour ne pas refléter fidèlement la volonté populaire. Avec les exemples des élections de 2000 et 2016 ou bien qu’ils aient gagnés, le vote populaire, Al Gore et Hillary Clinton ont perdu les élections.
Plusieurs propositions de réforme ont été avancées, notamment le Pacte national interétatique (National Popular Vote Interstate Compact), qui vise à garantir que le président soit élu par le vote populaire national avec une méthode très simple : allouer les voix des grands électeurs de chaque État à celui qui gagne les voix populaires au niveau populaire. D’autres propositions incluent l’adoption d’un système proportionnel ou l’abolition du Collège électoral. En gros, adopter à nouveau le système du Maine et du Nebraska au niveau national.