21 janvier 2025. À peine entré à la Maison-Blanche et installé dans le Bureau ovale, Donald Trump convoque d’urgence son ministre des Affaires étrangères, Marco Rubio, son ministre de la Défense, Pete Hegseth, son conseiller à la Sécurité nationale, Michael Waltz, son ambassadeur à l’OTAN, Matthew Whittaker, son ambassadrice à l’ONU, Elise Stefanik. Aucun de ces membres du cabinet n’a été confirmé par le Sénat, mais qu’à cela ne tienne, ce n’est de toute façon qu’une formalité depuis que Donald Trump a demandé aux sénateurs de procéder à des recess confirmations.
Elon Musk, qui était déjà installé dans la West Wing, a eu vent de réunion et a décidé de s’y joindre. Un peu surpris, mais d’osant pas susciter le courroux de son portefeuille sur pieds, le président le laisse d’installer.
— Messieurs, l’heure est grave et la sécurité et les intérêts économiques des États-Unis sont en menacés, explique Donald Trump . Les Chinois et les Russes sont prêts à envahir le Groenland. Il faut agir vite et placer nos troupes sur cette île Immense que nous a volée le Danemark. Pistol Pete, il faut que pour cet après-midi tu me présentes un plan de débarquement. 5 000 hommes devraient suffire largement. Mercredi, nous devons avoir pris possession de l’Île. Qu’en pensez-vous ?
Ce qu’en pensez-vous n’était pas réellement une question puisque, avec Donald Trump, il n’y a pas de place à la discussion, mais seulement à l’exécution.
— Sur le plan strictement militaire, cette opération est a piece of cake, souligne Marco Rubio, qui veut la jouer cool. Il rappelle que la population du Groenland est l’équivalent de la ville de Bismarck dans le Dakota du Sud sur un territoire plus grand que le Mexique. Sa capitale Nuuk est peuplée comme Athens dans le Tennessee. Sans aucun doute un débarquement américain sera immédiatement couronné de succès, mais il risque de nous mettre en porte à faux vis-à-vis de nos alliés, notamment européens, et surtout le Danemark. Et le Secretary of State, qui oscille entre républicain traditionnel et républicain MAGA, semble un peu gêné à la fois par la rapidité et la radicalité de l’opération.
— Little Mario, je ne t’ai pas demandé de me faire un cours de géographie, mais seulement d’approuver cette opération qui permettra de rendre sa grandeur à l’Amérique. Make America Great Again, tu as déjà oublié ?
— Non, Monsieur le Président, je n’ai pas oublié, rétorque l’ancien concurrent aux primaires républicaines prenant conscience tout à coup qu’il ne pèse pas très lourd. Mais il faut faire bonne figure.
— Monsieur le président, j’ordonne sur le champ au Chairman of the Joint Chiefs of Staff de lancer ce qui est la plus beautiful operation depuis le rachat de l’Alaska aux Russes, intervient Pete Hegse, qui n’est pas à une flatterie près. Tout sera prêt demain matin et les 5000 hommes débarqueront sur Nuuk. Elles prendront rapidement possession des principales villes du territoire, à savoir Sisimut, Qaqortop, Aasiaat, Maniitsoq et Tassiilaq. Jeudi, vous pourrez déclarer, Sir, que les États-Unis ont à nouveau étendu leur frontière. On pourrait baptiser cette initiative Operation Nuuk.
— Voilà ce que j’aime entendre, merci Pistol Pete. Little Mario, il faut en prendre de la graine. Attention, on ne va pas utiliser l’arme nucléaire, corrigea Donald Trump qui avait compris Operation Nuke.
Alerté par les déclarations de Donald Trump sur le sujet, le nouveau ministre de la Défense avait appris quelques éléments de géographie du territoire pour impressionner son patron. Il avait appris seulement quelques jours plus tôt que le Groenland bénéficiait d’une autonomie étendue et gérait ses affaires internes, mais était placé sous la responsabilité du Danemark pour sa défense et ses relations internationales. Le territoire avait obtenu un premier niveau d’autonomie par la suite du referendum de 1979 et une autonomie élargie via celui de 2008. L’indépendance complète reste un sujet de débat important au Groenland. Bien qu’il n’y ait pas encore eu de référendum officiel sur l’indépendance de prévu, de nombreux politiciens et partis politiques en discutent activement. L’économie, les ressources naturelles (notamment les minerais en tout genre et le pétrole), et les questions culturelles jouent un rôle crucial dans ce débat.
Le Premier ministre, Múte Bourup Egede, en poste depuis 2021, n’avait jamais caché son penchant indépendantiste. Mais l’organisation d’un référendum sur l’indépendance n’est pas chose facile. Le processus pourrait être initié par le gouvernement groenlandais qui pourrait proposer un projet de loi ou une résolution. Ensuite, ce projet de referendum devra être approuvé par le parlement. Une majorité qualifiée et un taux de participation minimale seront sans doute nécessaires. Il faudra ensuite engager des négociations avec le gouvernement danois pour définir les conditions du référendum, y compris le cadre légal et les implications internationales. Une campagne devra être organisée pour informer la population des implications de l’indépendance. Si le référendum passe, une période de transition serait mise en place pour gérer les aspects pratiques de l’indépendance, tels que la création de nouvelles institutions gouvernementales, la gestion des ressources naturelles, et l’établissement de relations internationales. Le Groenland pourrait rédiger une nouvelle constitution pour définir son système de gouvernement indépendant.
Des pays indépendants aussi peu peuplés existent, par exemple, le Lichtenstein, San Marin, les Îles Marshall ont à peu près le même nombre d’habitants. Les îles Nauru et Tuvalu ne comptent même que 12 000 habitants. Et que dire du ridicule Vatican avec ses 800 âmes, le plus petit pays du monde en termes de superficie et d’habitants.
C’est alors qu’Elon Musk, qui était de manière surprenante resté un peu en retrait, intervint dans la conversation.
— Monsieur le président, je pense que la solution du référendum est la meilleure, car elle peut se faire avec l’appui de la population et être imposée au monde en toute légalité sans qu’aucune nation ne puisse contester la décision. Les 56 000 habitants du Groenland doivent représenter 20 000 familles tout au plus. Je pourrais organiser une sorte de loterie dans laquelle tout le monde pourrait gagner 10 000 dollars rien qu’en participant et dont le gros lot serait d’un million de dollars. Cela représente environ 200 millions de dollars, moins que ce j’ai dépensé pour soutenir votre campagne.
Donald Trump sourit à cette allusion un peu grosse, mais il le regarda d’un air un peu sévère comme s’il allait le casser en deux.
— Oui, ça me paraît tout à fait faisable, Mars Mastermind. Il faudrait doubler cette initiative d’un blitz de messages X pour convaincre la population.
C’est ainsi que l’opération Nuuk, qui allait donner aux États-Unis deux millions de kilomètres carrés supplémentaires et l’accès à de nombreuses ressources dont regorge son sous-sol, fut orchestrée. Après « L’acquisition du siècle » comme on avait qualifié l’achat de la Louisiane succédait « Le hold-up du 21e siècle » comme les livres d’histoire avaient caractérisé l’acquisition du Groenland et qui faisait passer les États-Unis dans les États voyous. À la suite de cette opération, la Russie annexa l’Ukraine étranglée par l’abandon en rase campagne des États-Unis et la Chine envahit Taïwan. Après l’annexion du canal de Panama qui fut une simple formalité, Donald Trump allait s’occuper du cas du Canada.