Alors que Columbia avait courbé l’échine, l’université de Harvard ne s’en laisse pas compter. A la demande totalement incongrue de l’administration Trump dans une lettre datée du 11 avril – qui a fait savoir que la lettre avait été envoyée sans l’accord du président ce qui ne l’a pas empêché de poursuivre les attaques contre l’université -, le président Alan Gerber avait répondu tout simplement : NON. Parmi ces demandes, on peut mentionner :
– La réforme de sa gouvernance pour diminuer l’influence d’étudiants et de professeurs jugés trop militants ;
– La réalisation d’un audit des opinions au sein de la communauté universitaire ;
– Le recrutement obligatoire d’une « masse critique » de professeurs et d’étudiants reflétant une plus grande « diversité de points de vue » ;
– La fermeture de tous les programmes de diversité, équité et inclusion (DEI) ;
– La surveillance accrue des admissions internationales ;
– L’exclusion de certains groupes étudiants pro-palestiniens.
– La remise régulière de rapports d’évaluation au gouvernement fédéral.

Parallèlement au gel immédiat de 2,2 milliards de dollars de subvention fédérale, Donald Trump menace de retirer le statut d’exemption fiscale de l’université et la possibilité de recruter des étudiants étrangers, une source de financement importante.

Les fondements juridiques sur lesquels s’appuie cette plainte sont multiples. D’abord,lesviolations du Premier Amendement (liberté d’expression et autonomie académique) et ensuite les procédures prévues par le Titre VI du Civil Rights Act de 1964.
Harvard argue que l’État ne peut imposer une ligne idéologique à une université privée via la menace d’un retrait de fonds. Cela enfreint le droit à la liberté académique, protégé par la Constitution.
Le gouvernement invoque le Titre VI (interdiction de la discrimination raciale dans les institutions recevant des fonds fédéraux) pour justifier le gel. Mais Harvard soutient que les procédures légales obligatoires n’ont pas été respectées : aucune enquête formelle préalable, aucun processus contradictoire, ni notification officielle conforme à la loi.
Enfin, Harvard affirme que le gel des fonds est une représaille directe à son refus de se plier aux exigences fédérales. La plainte mentionne un enchaînement de pressions publiques et privées – y compris des menaces de Donald Trump et de Leo Terrell, chef du groupe fédéral sur l’antisémitisme.
Par le biais de cette initiative, Harvard réclame d’annuler le gel des subventions, une déclaration judiciaire établissant la violation de la Constitution et du droit fédéral et une injonction pour empêcher l’administration d’imposer des conditions illégales à l’accès aux financements publics.
Les conséquences du gel de financement fédéral sont immenses : Suspension immédiate de projets de recherche majeurs dans les domaines de la santé, de la technologie, de la défense, etc. ; impact sur des hôpitaux partenaires indépendants (Mass General, Dana-Farber, etc.) ; menace sur des milliers d’emplois de chercheurs, d’administrateurs et d’étudiants ; effets négatifs en chaîne sur l’économie locale et nationale, l’innovation, et la réputation académique des États-Unis.
Le fait de s’attaquer à Harvard n’est sans doute pas un hasard. Car si cette plus ancienne, plus prestigieuse et plus riche université plie, c’est là un signal fort pour toutes les autres. Et nombreuses sont celles qui n’ont pas trop les moyens financiers de résister à la pression présidentielle dans cette initiative qui s’inspire plus des méthodes mafieuses que de la pratique politique.

Comme il en a l’habitude, Donald Trump s’est parallèlement déchaîné sur le fil de son réseau social contre l’université :
“Harvard can no longer be considered even a decent place of learning, and should not be considered on any list of the World’s Great Universities or Colleges. Harvard is a JOKE, teaches Hate and Stupidity, and should no longer receive Federal Funds”.

On pourrait lui répondre que Harvard est l’université qui a formé le plus grand nombre de présidents américains – 8 au total sur 47 – les derniers de cette longue sont George W. Bush et Barack Obama.