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Les républicains dessinent-ils leur avenir en bleu ?

Une hirondelle ne fait pas le printemps, la formule a été utilisée jusqu’à épuisement. Mais si vous voyez deux ou trois hirondelles alors vous pouvez commencer à vous poser des questions sur un possible changement de saison. Il y a eu d’abord la perte dans l’élection du gouverneur de l’Etat de Virginie un an seulement après l’élection présidentielle. Il y a eu ensuite l’épisode Roy Moore dans l’élection du fauteuil de sénateur d’Alabama laissé vacant par Jeff Sessions, devenu ministre de la Justice. Les républicains ont essayé de se rassurer en expliquant que la défaite improbable, voire impossible, était lié à la personnalité très controversée de leur candidat dans cet état pourtant tout rouge. Donald Trump avec soutenu le concurrent républicain de Roy Moore avant de le soutenir. Cette semaine, c’est l’élection du démocrate Conor Lamb dans un district du sud de la Pennsylvanie où Donald Trump avait gagné il y a seulement 14 mois avec 20 points d’avance. Sachant qu’en plus, le district avait été redécoupé par les républicains afin qu’il ne puisse pas être perdu.

Cette nouvelle victoire électorale pose deux grandes questions. D’abord, les républicains doivent-ils se préparer à une défaite, voire une véritable bérézina en novembre prochain. Ensuite, quelle stratégie pour les démocrates dans cette prochaine bataille à l’aune du profil politique de Conor Lamb, qualifié de Blue Dog Democrat et ayant déclaré officiellement qu’il ne soutiendrait pas Nancy Pelosi pour Speaker si les démocrates avaient la majorité aux prochaines midterms.

Sur la première question, Patrick J Buchanan[1] dans un article du magazine The American Conservatism (qu’il a cofondé) intitulé Is the GOP staring At another 1930? présente l’éventualité de changement durable de majorité vers les démocrates comme celle connue dans les années 30. Avec Donald Trump, les républicains dominaient le paysage politique comme ils ne l’avaient pas depuis 90 ans : la Maison-Blanche, les deux chambres du Congrès, deux tiers des postes de gouverneurs et gain de plus de 1000 postes dans les Congrès des Etats.

En 1930, rappelle Patrick J Buchanan, les républicains ont perdu 52 sièges de la Chambre des Représentants et deux ans plus tard, Franklin Delano Roosevelt était élu et étendrait son emprise sur la politique américaine pendant quatre mandats et ouvrait une nouvelle ère où l’état allait s’impliquer dans les affaires pour corriger les excès du marché et donner une nouvelle impulsion à l’économie. Les démocrates allaient dominer la politique américaine jusqu’à la fin des années 60.

Raz de marée démocrate en 1932

La grande différence avec cette période calamiteuse est que, aujourd’hui, l’économie américaine a repris des couleurs – même si elle vit toujours à crédit avec un déficit structurel et une dette abyssale. Une situation que Donald Trump reprend régulièrement à son compte.

Le problème pour les républicains explique Patrick Buchanan peut s’énoncer sous la forme d’un truisme simple : « Quand l’économie se porte mal, l’économie est le problème, quand l’économie se poste bien, le problème doit se chercher ailleurs ».

Précisément, quel est cet « ailleurs » ?. Au-delà de la personnalité de Donald Trump, dont sa base a décidé de ne pas tenir compte ni tenir rigueur, même les évangélistes (« les évangélistes comprennent les concepts de péché et de pardon » ; « nous sommes tous pécheurs » – Pastor Jeffress, First Baptist Church Dallas) et que ses opposants ne peuvent plus supporter, c’est la politique actuelle qui est en cause.

La fameuse réforme fiscale qui n’est en fait qu’une réduction fiscale pour les entreprises et les classes aisées est devenue assez impopulaire. Pour les conservateurs fiscaux, elle ne va que creuser les déficits, pour les progressistes, elle va entraîner des coupes dans les programmes sociaux, principalement Medicaid, Medicare, d’autant que pendant le même temps Donald Trump a demandé une augmentation substantielle du budget de la Défense. Dans l’élection du 18e district de Pennsylvanie, Rick Saccone, le candidat républicain a arrêté d’utiliser la réforme fiscale comme argument de campagne dans ses publicités télévisuelles.

https://youtu.be/oOMMfkCg2NQ

Et cet avenir apparaît défavorable aux républicains pour de simples raisons démographiques et générationnelles : les deux paramètres pouvant d’ailleurs s’ajouter. Les Blancs qui votent en majorité républicains voient leur proportion se réduire dans la population. A l’inverse, les minorités qui votent entre 70 et 90 % pour les démocrates, vont bientôt représenter 40 % de la population. Dans la dernière élection de 2016, Hillary Clinton a battu Donald Trump de près de 3 millions de voix. C’est grâce au système électoral compliqué que Donald Trump a pu gagner, mais ce système trouvera un jour ses limites malgré la créativité des républicains à maintenir leur emprise (Loi Citizen United, organisation du vote…).

Dans cette perspective des midterms qui leur semble favorable, quelle doit être la stratégie des démocrates pour garantir la plus large victoire possible. D’autant qu’il n’y a pas encore de leader affirmé et que plusieurs tendances se dessinent, celle qui avait fait le succès de Bernie Sanders et que pourrait reprendre à son compte Élisabeth Warren, ou celles des démocrates centristes. Que Nancy Pelosi ne soit pas Speaker en 2018 n’est pas le problème principal d’autant qu’elle aura 78 ans. L’âge n’est peut-être pas la question de fond, mais il faut aussi savoir passer la main.

Faudra-t-il mener une campagne nationale ou plutôt très locale ? L’exemple de Conor Lamb indiquerait que la deuxième option serait plutôt la bonne. Le profil personnel – ancien Marine – et les options sociales, économiques et politiques plutôt conservatrices étant sans doute adaptées au contexte de ce 18e district.

S’il faut des personnalités et des profils différents pour gagner des circonscriptions aussi disparates, il faudra ensuite réconcilier tous ces élus sur une plate-forme commune. En clair, gagner d’abord, faire la synthèse ensuite. Avec le risque que la deuxième étape soit bien difficile à réussir.

 

[1] Patrick Joseph Buchanan is an American paleoconservative political commentator, author, syndicated columnist, politician and broadcaster. Buchanan was a senior advisor to U.S. Presidents Richard Nixon, Gerald Ford, and Ronald Reagan, and was an original host on CNN’s Crossfire. He sought the Republican presidential nomination in 1992 and 1996 (Source Wikipedia).

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