Le prix des médicaments est 2,56 fois plus élevé aux États-Unis que la moyenne de 32 autres nations de l’OCDE (comparaison basée sur des prix de 2018). C’est ce qu’indique la dernière étude intitulée International Prescription Drug Price Comparisons, Current Empirical Estimates and Comparisons with Previous Studies que vient de publier la Rand Corporation. Une réalité qui est assez bien connue mais sur laquelle l’étude de la RAND met des chiffres plus précis. Les médicaments de marque constituent le premier facteur de ces prix élevé aux États-Unis, explique Andrew Mulcahy, auteur principal de cette étude. Certains de ces médicaments utilisés pour des maladies telles que le cancer ou l’hépatite C peuvent coûter des milliers de dollars par traitement. « Et souvent, poursuit-il, ils font l’objet de spots publicitaires à la télévision ». Rappelons qu’en France la publicité des médicaments disponibles avec une prescription est interdite contrairement aux États-Unis.
A contrario, le prix des médicaments génériques est 16 % moins élevé que la moyenne des prix observés dans les pays de l’OCDE. Par ailleurs, ces médicaments sont largement plus diffusés puisqu’ils représentent 84 % de la consommation contre 35 % en moyenne dans les autres pays.
Les Américains sont de très gros consommateurs de médicaments. Les États-Unis y ont consacré 457 millions de dollars représentant 58 % des dépenses des 32 pays de l’OCDE retenus dans cette étude mais seulement 24 % en volume traduisent bien les prix beaucoup plus élevés. Et ces dépenses augmentent à un rythme élevé. En 2000 et 2017, ces dépenses ont augmenté de 76 % en prix constants. Une augmentation qui s’explique par la mise sur le marché de nouveaux médicaments très coûteux mais aussi par la hausse des prix des médicaments existants. Et l’étude prévoit que les prix augmenteront plus vite que les autres domaines de la santé, notamment en raison des dépenses en R&D qui y sont consacrées.
Aux États-Unis, les médicaments sont préparés par les pharmaciens en fonction de la prescription du médecin – ce qui facilite l’utilisation du générique – alors qu’en France par exemple ils sont le plus souvent distribués dans leur emballage d’origine. Deux éléments qui laissent à penser que les laboratoires pharmaceutiques « se rattrapent » avec les médicaments, dont les brevets ne sont pas encore entrés dans le domaine public.
Globalement, les dépenses en médicaments représentent environ 10 % des dépenses de santé aux États-Unis qui, faut-il le rappeler, sont de très loin les plus importantes lorsqu’on les rapporte au PIB. Selon le Journal of American Medical Association, les États-Unis dépensent 18 % de leur PIB dans la santé alors que la moyenne des dix autres pays analysés est de 11,5 % (Canada, Allemagne, Australie, Royaume-Uni, Japon, Suède, France, Pays-Bas, Suisse, Danemark). On pourrait logiquement en conclure que les soins de santé fournis aux États-Unis sont les meilleurs du monde. C’est sans doute vrai pour certains mais certainement pas pour tous. La comparaison selon différents indicateurs est tout sauf probante. A commencer par l’espérance de vie sur laquelle l’épidémie a eu un impact significatif (La Covid accélère la baisse de l’espérance de vie des Américains). La gestion de la Covid ne milite pas non plus pour cette hypothèse.
Ces prix élevés ont pour conséquence une aggravation du rationnement en soins médicaux. Selon une étude réalisée par l’institut Gallup en décembre 2019 (juste avant le début de l’épidémie), un quart des Américains réduisaient ou stoppaient un traitement prescrit pour une maladie chronique grave, le niveau le plus élevé depuis près de trente ans que l’institut pose la question. C’est là une moyenne car ce rationnement « volontaire » est plus élevé dans les classes sociales les plus défavorisées.
Les prix très élevés des médicaments aux États-Unis a pour conséquence directe une dépense élevée – nettement supérieur à la moyenne des 32 pays étudiés – alors qu’en volume (consommation réelle de médicaments) les Américains sont dans la moyenne des pays de l’OCDE. En « volume », ce sont les Japonais qui sont de très loin les plus gros consommateurs. Un phénomène qui peut s’expliquer en partie par une population dont l’âge moyen est le plus élevé au monde