Le terme cyberterrorisme n’existait pas il y a une vingtaine d’années. Tout simplement parce que l’Internet n’était pas encore devenu l’infrastructure numérique du monde. Il est considéré aujourd’hui comme le premier danger auquel sont confrontés les Américains. C’est ce qu’indique le sondage que vient de publier l’institut Gallup dans le cadre des Annual World Affairs.
Il est vrai que les événements de ces dernières années montrent que le problème est réel, les attaques succédant aux attaques contredisant des idées formulées il n’y a pas si longtemps comme celle exprimée dans un article de la revue Herodote de 2014 intitulé Le cyberterrorisme : un discours plus qu’une réalité (voir extrait ci-dessous). La cyberattaque Solarwinds révélée en février dernier en est la dernière illustration. Près de 18.000 sociétés aux États-Unis et des agences gouvernementales ont été la cible en 2020 de ce que des experts, pointant vers la Russie, ont qualifié mardi d’attaque « la plus sophistiquée jamais vue ». Les pirates ont été qualifiés de « disciplinés et concentrés » par le patron de FireEye, Kevin Mandia, devant la commission du renseignement au Sénat. Elle aurait même permis d’accéder aux serveurs qui commandent les arsenaux nucléaires.
Le cyberterrorisme : un discours plus qu’une réalité
Cet article a pour ambition tout d’abord de déterminer les caractéristiques d’un éventuel cyberterrorisme. Relativiser la notion aide alors à comprendre que le cyberterrorisme est une représentation américaine. Toutefois, relativiser ce discours dominant permet de mieux appréhender la réalité du terrorisme dans le cyberespace.
Le cyberterrorisme, une représentation américaine ?
En effet, le cyberterrorisme paraît résider à la conjonction de deux expériences stratégiques américaines de la terreur (ou plus exactement des terreurs). La prégnance de la terreur, comme motif intime de l’action américaine, permet de comprendre la vogue du concept, disproportionnée par rapport à la réalité des faits. Cela explique pourquoi le cyberterrorisme est plus un discours qu’une expérience.
Olivier Kempf – Olivier Kempf
Dans Hérodote 2014/1-2 (n° 152-153), pages 82 à 97
Il y a quatre ans, le cyberterrorisme était déjà présent dans le paysage mais il n’était qu’au troisième rang derrière le terrorisme international et le développement des armes nucléaires par l’Iran. Il est à noter que les Américains citaient la dissémination de maladies infectieuses en quatrième position. Certes il y a bien eu des épidémies mais qui avaient été assez rapidement circonscrites ou contenues dans certaines régions du monde. Une appréciation très prémonitoire alors que curieusement cette menace est passée en cinquième position pour le présent sondage. Peut-être pensent-ils que la crise ayant éclaté, la prochaine ne sera pas pour tout de suite. Il est vrai que beaucoup d’analystes présentent la Covid comme l’épidémie la plus grave depuis celle de la grippe espagnole de 1918/19.