En quoi fermer une agence dont l’objectif est de défendre contre les abus des institutions financières aide les consommateurs américains ?
Avec la fermeture de l’USAID, arrêtée temporairement par un juge, et d’autres agences qui sont sur la sellette, c’est au tour du Consumer Financial Protection Bureau (CFPB) de passer à la trappe. Avec cette nouvelle initiative, Donald Trump fait coup double : supprimer une agence gouvernementale et faire des coupes sombres dans l’administration, effacer une création de Barack Obama.
Le CFPB a été créé à la suite de la crise financière de 2008 pour réglementer les banques de plus de 10 milliards de dollars. L’absence de réglementation des prêts hypothécaires et d’autres produits de crédit avait contribué à favoriser ce désastre, et le Congrès d’alors ne voulait pas qu’il se reproduise.
Des lois contre les activités déloyales, trompeuses ou abusives existaient bien, mais les régulateurs bancaires avaient tendance à ne pas leur donner la priorité. Le Congrès a donc transféré l’autorité de protection des consommateurs de nombreuses agences bancaires à une agence dédiée uniquement à leur application, le CFPB.
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Technique habituelle de Donald Trump : attaques ad personam tous azimuts
La semaine dernière, Elon Musk et le nouveau chef du Bureau de la gestion et du budget (Office of Management and Budget (OMB)) et un des chefs de file du project 2025, Russ Vought, ont arrêté tous les travaux de la commission, y compris l’application des règles, les litiges, ainsi que les activités de supervision et d’examen. Ils prévoient de fermer le siège social et vont probablement licencier la plupart du personnel.
En fermant le CFPB, Trump ne revient pas seulement au statu quo d’avant la crise financière, mais à une situation encore plus problématique. Il n’y a pratiquement plus d’application fédérale des règles de protection des consommateurs pour les produits financiers.
Il n’y a donc plus de protection contre les fraudes et à la tricherie endémiques dans le secteur bancaire et la fintech lésant de nombreux consommateurs. À l’inverse, les grandes sociétés de l’internet comme Google, Meta, Amazon ou peut-être X, pourront se transformer en carte de crédit, de fournisseur de paie et d’agent de recouvrement.
Plus de règles contre les frais de découverts excessifs, de règles plafonnant les frais de retard de carte de crédit, de surveillance des agents de recouvrement et des prêteurs sur salaire, de sources neutres pour comparer les produits de cartes de crédit…Pour n’en citer que quelques unes.
Le CFPB a proposé une règle d’interprétation sur la façon dont les entreprises, telles que Walmart, Kroger et Wendy’s, accordent des « avances sur salaire » à leurs employés, facturant plus de 109 % de frais d’intérêt. Environ 5 % des travailleurs les utilisent, et leur nombre augmente rapidement. Avec la disparition du CFPB, plus de règles !
Elon Musk et ses affidés ont pour ambition de supprimer l’administration et de la remplacer par une intelligence artificielle gérant une « application tout-en-un », pour communiquer, interagir avec les médias sociaux, payer pour des services, appeler des taxis, faire des achats, etc.
Le CFPB proposait de traiter ces entreprises dotées de systèmes de paiement comme des systèmes de paiement, et de les soumettre au même traitement de surveillance que les banques. Avec la suppression, les grandes entreprises technologiques ont un avantage concurrentiel sur les banques en ayant les avantages sans les inconvénients.
Les entreprises de la tech qui agiront comme des banques ne seront pas réglementées ou assurées par la FDIC. Les banques qui sont déjà en train de perdre face à la Silicon Valley seront encore plus désavantagées sur le plan réglementaire.
La raison invoquée par les nouveaux maîtres de la Maison-Blanche pour éliminer le CFPB est la soi-disant corruption selon le vieil adage selon lequel qui veut noyer son chien l’accuse de la rage. Aussi le fait que le CFPB ciblerait les conservateurs pour les « débancariser » ou les retirer du système bancaire.
Le lobby bancaire a toujours voulu affaiblir les règles de protection des consommateurs et, depuis la crise financière. Aujourd’hui, avec le soutien de la Silicon Valley et un président qui a l’air populiste, mais qui semble gouverner sous le nom de George W. Trump, ils y sont parvenus.
La création de la CFPB résultait d’un accord entre les banques et le gouvernement. Les premières avaient accepté une plus réglementation plus stricte en échange un renflouement de plusieurs milliards de dollars selon la fameuse règle mise en avant « Too big to fail ». On se souvient de la disparition en un week-end, le 15 septembre 2008, de la banque d’affaires Lehman Brothers.