Kamala Harris et Donald Trump ne sont d’accord que sur une seule chose : les États où il faut aller pour tenir meeting. Un étranger qui ne connaîtrait pas le système électoral américain penserait qu’il faut visiter les grands centres urbains, là où il y a le plus de monde, ou encore les villes des États les plus peuplés comme la Californie, le Texas, la Floride ou encore l’État de New York.
La réalité est tout autre. Kamala Harris et Donald Trump ont effectué un total de 30 visites en Pennsylvanie et au Michigan depuis le mois d’août et ne sont pas rendus une seule fois dans 36 des 50 États des États-Unis.
Depuis qu’elle est la candidate démocrate le 5 août dernier, Kamala Harris a visité la Pennsylvanie à 13 visites reprises – où 19 votes électoraux sont en jeu – près de deux fois plus que son deuxième État le plus visité, le Michigan (7). Viennent ensuite le Wisconsin (6), la Géorgie (5), la Caroline du Nord (4), l’Arizona (3) et le Nevada (3). Pas de surprise : il s’agit des sept États pivots. Elle s’est également rendue à New York (2) et en Californie (2) pour des collectes de fonds, et a fait sa première étape de campagne au Texas vendredi pour un meeting avec Beyoncé.
De son côté, Donald Trump s’est en rendu 11 fois en Pennsylvanie (11) et 9 fois dans le Michigan. Viennent, ensuite, la Caroline du Nord (7). En plus du Wisconsin (5), de la Géorgie (5), du Nevada (4) et de l’Arizona (3), Donald Trump est allé à quatre reprises quatre virées dans à New York, mais plutôt pour des raisons personnelles. Il s’y est rendu à nouveau ce week-end pour un meeting on ne peut plus controversé au mythique Madison Square Garden.
Les deux candidats ne s’intéresseraient-ils pas aux Alabamiens ? Snoberaient-ils les Coloradians ? Dédaigneraient-ils les Idahoiains ? Mépriseraient-ils les Kentuckiens ?
Non, c’est la conséquence mécanique du système électoral américain qui fait que les élections du président des États-Unis vont se jouer dans 7 États clés dits Swing States ou encore États pivots ; les trois États de ce que l’on avait appelé le blue wall (Wisconsin, Michigan et Pennsylvanie), les deux États du Sud (Caroline du Nord et Géorgie) et les deux États de l’Ouest (Arizona et Nevada). Soit 61 millions d’habitants qui comptent pour les élections et 270 millions qui n’ont aucun impact. La situation est encore pire dans la mesure où ce ne sont que quelques comtés de ces États qui feront la différence.
Outre sa dimension non démocratique, un problème majeur pour un système qui prétend l’être (un candidat peut être élu sans avoir obtenu la majorité des voix populaires, (George W. Bush, Donald Trump), cette situation pose deux inconvénients majeurs. Le premier est que quelques milliers de voix font pencher le résultat d’un côté ou d’un autre. Une observation qui est également vraie pour un système direct où c’est la majorité est égale à 50 % des voix plus une. Oui, la grande différence avec le système du Collège électoral est qu’il faut obtenir ces 50 %. Les États ne sont donc pas sur un pied d’égalité quand il s’agit des élections. Ce qui a pour conséquence une débauche d’effort des candidats en termes de visites, de dépenses de campagne, de publicité politique concentrées sur certains points névralgiques.
La seconde qui, élection après élection, est que ce système est très fragile en matière de cybersécurité et de désinformation. Il suffit de noyer de faux messages (depuis 2008 avec la campagne de Barack Obama avec les réseaux sociaux et depuis cette élection avec l’intelligence artificielle) les électeurs de ces comtés. Et encore, les outils permettent aujourd’hui de déterminés qui sont les électeurs indécis et qui ceux sont qui sont encartés dans un parti et aucun message ne fera la différence. La même remarque s’applique aussi à la cybersécurité.