La réforme de la santé vient donc de franchir une étape importante puisque les 5 commissions ont toutes voté le projet de loi ? Le projet va donc pouvoir être présenté dans les deux chambres et discutés en séance plénière.
Avant d’examiner le détail de cette phase, rappelons les mécanismes de vote d’une loi.
La plupart des lois votées au Congrès ont pour origine l’administration exécutive, c’est-à-dire le président.
Le projet de réforme de la couverture des soins de santé était une des principales propositions du candidat Obama dont un des objectifs était d’apporter une couverture à tous les Américains. Ce qui n’est actuellement pas le cas puisque l’on estime entre 45 et 50 millions de personnes qui n’ont pas d’assurance santé.
Une fois proposé au Congrès, le projet de loi est examiné par les commissions permanentes. Sur les 20 000 projets de lois introduits chaque année (environ 20 000), à peine 10% dépassent l’étape de la ou des commissions (La Constitution américaine et les institutions – Jean-Eric Branaa).
Puisque le projet proposé par les différentes commissions a été amendé, il faut ensuite que le Majority Leader du Sénat (le démocrate Harry Reid) et le Speaker de la Chambre des Représentants, la très médiatisée démocrate Nancy Pelosi vont s’atteler faire converger les différents projets vers un même texte. Une fois ce travail effectué, le bureau du Budget du Congrès américain (Congressional Budget Office) détermine combien chaque projet de loi va coûter. Ensuite chacun des deux projets est présenté aux chambres pour discussion et vote. Pour le projet en question, on parle de début novembre.
Les 5 commissions qui ont travaillé sur le projet de loi
Réf. | Date | Président de la commission | Vote | Commentaires | |
Chambre des représentants | |||||
House Energy and Commerce Committee | H.R.3200 | 31 juillet | Henry Waxman (D-Calif.) | 31/28 | 5 démocrates ont vote contre avec les républicains |
House Ways and Means Committee | H.R.3200 | 17 juillet | Charles Rangel (D-N.Y.) | 23/18 | 3 démocrates ont voté contre avec les républicains |
House Education and Labor Committee | H.R.3200 | 17 juillet | George Miller (D-Calif.) | 26-22 | 3 démocrates ont vote avec les républicains |
Sénat | |||||
Senate Finance Committee | S. 1679 | 17 octobre | Max Baucus (D-Mont.) | 14/9 | La républicaine Olympia Snowe a voté pour avec les sénateurs démocrates |
Senate Health, Education, Labor and Pensions Committee |
S. 1679 | 15 juillet | Tom Harkin (D- Iowa) | 13/10 | Tous les républicains ont voté contre |
(1) A remplacé Ted Kennedy (D-Mass.)
Ce n’est pas encore fini. A supposer que les deux chambres votent leur texte respectif, il faut ensuite faire converger les deux projets vers un même texte et refaire voter chaque Chambre sur ce projet convergé. Une fois cette étape franchie, le texte est transmis au président qui a dix jours (dimanche non compris) pour le signer. Le projet devient alors une loi.
On voit donc qu’après l’approbation des 5 commissions, il reste encore du chemin à parcourir. Pourquoi dans ces conditions, un vent d’optimiste a soufflé après que la commission des finances a voté son projet ? Tout simplement parce qu’en 1994, lorsque Bill Clinton avait lancé un projet comparable, c’est cette même commission qui l’avait enterré.
Lorsqu’on examine les votes, on s’aperçoit que le camp démocrate n’a pas voté comme un seul homme, loin s’en faut. On constate ainsi que 11 membres de la Chambre des représentants sur 85 ont voté contre. A l’inverse, les républicains ont présenté un front uni ou presque. Seule la républicaine Olympia Snowe de la Commission des finances du Sénat a voté avec les démocrates. Mais, d’après les journaux américaines, c’est une républicaine familière du fait. L’idée d’un projet bipartisan n’est donc pas vraiment d’actualité.
Au Sénat, le seuil des 60 votes est important car il permet de parer à une offensive de filibuster (un sénateur qui peut prendre la parole sans limite de temps). Sur le papier, les démocrates ont bien les 60 votes mais en comptant sur les voix du sénateur démocrate Robert Byrd dont la santé est chancelante (Né en 1917, il est élu depuis 1959 et ainsi le sénateur qui est resté le plus longtemps en fonction) et des sénateurs indépendants Joseph Lieberman et Bernard Sanders.
Quelles sont les différences entre ces différents projets ? La première et peut-être la plus importante concerne ce que l’on appelle la mise en place de ce qu’on appelle la « public option ». Une institution publique qui permettrait d’assurer ceux que les compagnies d’assurance privées ne prendraient pas en charge et également d’établir un peu de concurrence avec les assurances privées. Cette assurance publique pourrait être gérée au niveau fédéral ou des Etats. Sachant que dans de nombreux états règne un quasi monopole des assureurs.
Un autre élément important concerne l’obligation pour les employeurs (principalement les petites entreprises) de fournir une couverture médicale à leurs salariés.
Après les tensions de cet été qui se manifestées lors des très nombreuses réunions sur le sujet organisées par les différents politiques, à commencer par Obama lui-même, il semblerait que l’opinion reste assez sceptique. Globalement, les Américains ne voient pas cette législation de manière très favorable. L’idée que le gouvernement s’immisce dans un domaine jusqu’ici géré par des institutions privées et ne les enchante guère. Selon la dernière enquête de l’institut Gallup donne les éléments suivants :
– 49 % des Américains estiment que les coûts de la santé va s’alourdir ;
– 39 % que la nouvelle loi aura un impact négatif sur la qualité des soins ;
– 46 % que les conditions pour être pris en charge seront plus élevées ;
– 37 % que la couverture sera moindre.
Sur ce sujet – comme sur beaucoup – l’orientation politique selon les grands partis est très pertinente et peut se décliner de la manière suite (un peu schématique) :
– Les républicains sont opposés ;
– Les indépendants sont partagés ;
– Les démocrates y sont favorables.
Se hâter lentement
Approche de type Big Bang, qui pour certains pourraient s’apparenter au grand soir des institutions privées, ou graduel, les Américains sont plutôt favorables à la deuxième solution. Cette attitude est assez étonnante dans la mesure où des projets de réforme ont été proposés successivement depuis des décennies. La dernière tentative sérieuse étant celle de Bill Clinton qui a tourné court.