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Donald Trump, président de America Inc !

Donald Trump joue-t-il au casino avec l’économie mondiale ? Espérons que non si l’on en juge avec son expérience dans le monde réel des casinos à Atlantic City.

« Il est président des États-Unis, il est milliardaire et un chef d’entreprise, donc il faut réfléchir trois secondes avant de dire que c’est un crétin », expliquait Luc Ferry lors de la matinale du 7 avril 2025 sur Radio Classique.

Dans les très nombreux micros-trottoirs réalisés au fil du temps, ses soutiens, ceux qui constituent sa base MAGA finissent toujours par dire : « oui, mais c’est un businessman », signe infaillible de sa réussite et preuve irréfutable qu’il ne peut se tromper puisqu’il gère le pays comme ses entreprises. Quant à la connexion entre celui qui adore les toilettes dorées et l’ouvrier d’une chaîne de montage de voiture du Michigan, j’avoue ne pas toujours la comprendre.

Businessman, sans doute, mais plutôt côté faillites que réussites. Après la première phase où il était promoteur immobilier, il s’est alors lancé dans la vente de poudre aux yeux en faisant de son nom une marque, il a excellé dans ce domaine, et puis est devenu un maître de la télé-réalité avec son émission The Apprentice où il a continué à développer son image auprès du public américain.  

Donald Trump a passé sa vie à construire un personnage, celui du businessman accompli qui réussit dans les affaires et est un maître dans l’ « art du deal », déclinaison du livre qu’il a publié en 1987 rédigé par le journaliste Tony Schwarz. Il a clairement réussi dans cet exercice d’autopromotion hors pair.

Donald Trump, businessman accompli ? On passera sur toutes les activités périphériques comme Trump Steak, Trump Watch, Trump Vodka, Trump University qui se sont terminées par de cuisants échecs ou des procès, jetons un coup sur ses initiatives de construction de casinos à Atantic City. Revenons donc trois secondes sur un passé glorieux.  

Trump Plaza Hotel and Casino

Le Trump Plaza Hotel and Casino a ouvert ses portes en 1984 à Atlantic City (New Jersey). C’était un projet ambitieux : un immense complexe de luxe situé en bord de mer, destiné à symboliser l’ascension fulgurante de Donald Trump dans l’industrie du jeu et du divertissement. À l’époque, Donald Trump était perçu comme un jeune promoteur audacieux qui voulait faire de son nom une véritable “marque de prestige”.

Malgré une ouverture en grande pompe, le Trump Plaza n’a jamais atteint les résultats financiers escomptés. Plusieurs problèmes majeurs sont apparus rapidement. D’abord, une mauvaise gestion interne : le casino souffrait de dépenses excessives et de stratégies commerciales peu efficaces. Trump avait financé son expansion avec des dettes colossales. Ensuite, Atlantic City, dans les années 1980-1990, connaissait un boom du secteur des casinos.

En 1992, Trump Plaza est entraîné dans une restructuration du Trump Hotels & Casino Resorts (l’entité qui possédait plusieurs de ses casinos). Cette restructuration a été rendue nécessaire après que Trump a failli ne pas pouvoir honorer ses dettes personnelles et commerciales, estimées à plusieurs milliards de dollars.

Dans le cadre de cette opération de sauvetage, les banques et les créanciers acceptent de réduire ses dettes, mais Donald Trump doit céder une partie significative du contrôle de ses casinos pour éviter une liquidation pure et simple, même s’Il conserve un rôle de direction et reste l’image publique de ses complexes.

Malgré quelques tentatives de redressement, le Trump Plaza n’a jamais vraiment rebondi. Face à la concurrence de nouveaux casinos à Atlantic City et à la croissance des jeux d’argent en ligne, le complexe décline lentement. Il ferme définitivement ses portes en septembre 2014, et le bâtiment est rasé en 2021, dans une scène symbolique : celle de la fin d’une époque Trump à Atlantic City.

Trump Castle

Le Trump Castle ouvre ses portes en juin 1985 à Atlantic City, New Jersey. Donald Trump l’a acheté à la compagnie Hilton Hotels. Hilton avait initialement construit l’établissement, mais n’avait pas obtenu de licence de jeu du New Jersey à temps. Trump a donc racheté l’hôtel-casino inachevé pour 320 millions de dollars. L’idée était de créer un casino de luxe au bord de l’eau, avec une thématique “château royal”, pour rivaliser avec les plus grands établissements d’Atlantic City.

Dès la fin des années 1980, Trump Castle a commencé à rencontrer des difficultés financières.

En 1990, sous le poids de dettes massives (notamment liées à la construction du Trump Taj Mahal), Trump Castle a dû renégocier ses emprunts. On voit la logique, Donald Trump est en difficulté sur un casino, donc il en lance un nouveau. Deux ans plus tard, Il accepte de céder 50 % de sa participation dans le casino aux détenteurs d’obligations pour éviter la faillite.

En juin 1997, le Trump Castle est rebaptisé Trump Marina pour moderniser son image. L’établissement voulait alors davantage s’appuyer sur sa proximité avec le port de plaisance et attirer une clientèle plus jeune.

En 2008, Trump Entertainment Resorts, qui possédait Trump Marina, a tenté de vendre l’établissement pour 316 millions de dollars à Coastal Development LLC, dirigé par Richard Fields. La vente a échoué à cause de la crise financière de 2008 et d’une baisse générale du marché du jeu à Atlantic City. Finalement, en 2011, Trump Marina est vendu pour seulement 38 millions de dollars (bien en dessous des attentes initiales) à Landry’s Inc., une entreprise détenue par Tilman Fertitta. Landry’s l’a entièrement rénové et a rouvert l’établissement sous le nom de Golden Nugget Atlantic City.

Trump Taj Mahal

Ouvert en fanfare en 1990, le Trump Taj Mahal est présenté comme « la huitième merveille du monde ». Le Coût initial est d’environ 1,2 milliard de dollars, un budget très élevé. Le problème est qu’il est financé en grande partie par des obligations à haut risque (junk bonds), ce qui crée un niveau de dettes élevé (encore pourrait-on dire, on se souvient que Donald Trump s’était présenté comme un spécialiste des dettes). En avril 1990, Donald Trump organise en grande pompe – comme il sait le faire – avec des célébrités, des feux d’artifice et une campagne de communication extravagante. Malgré un début prometteur, les revenus du casino n’étaient pas suffisants pour rembourser les dettes colossales. Par ailleurs, Donald Trump possédait déjà deux autres casinos (le Trump Plaza et le Trump Castle). Résultat : le Trump Taj Mahal cannibalisait sa propre clientèle au lieu d’augmenter sa part de marché globale.

Moins d’un an après son ouverture, en 1991, le Trump Taj Mahal fait faillite et se met sous la protection du chapter 11 et les détenteurs d’obligations qui ont servi à financer le projet acceptent d’échanger leur dette contre des parts dans l’entreprise. Il conserve une part minoritaire et un rôle d’image, ce qu’il sait faire le mieux.

Après cette restructuration, le Taj Mahal reste ouvert, mais il n’a jamais retrouvé la rentabilité espérée. L’industrie du jeu à Atlantic City décline dans les années 2000 : la concurrence des casinos d’autres États (Pennsylvanie, Connecticut) et des jeux en ligne grignote sa clientèle.

Le Taj Mahal passe entre plusieurs mains, notamment Carl Icahn, un milliardaire ami de Trump.

En 2014, Trump, qui n’était plus qu’un actionnaire minoritaire, intente un procès pour retirer son nom du bâtiment, affirmant qu’il était devenu “un taudis” et nuisait à sa marque.

En 2016, après de longues luttes syndicales (grèves pour de meilleurs salaires et avantages sociaux), le Trump Taj Mahal ferme définitivement ses portes. En 2017, le Hard Rock International (propriété des Séminoles de Floride) rachète et rénove l’ancien Taj Mahal et en 2018, le casino rouvre sous un nouveau nom : Hard Rock Hotel & Casino Atlantic City.

Le Trump Taj Mahal devient un symbole de la “méthode Trump” : des projets extravagants financés à crédit, suivis par des faillites spectaculaires et des sorties peu glorieuses.

Trump Hotels & Casino Resorts

Trump Hotels & Casino Resorts est fondée en 1995 par Donald Trump pour consolider ses activités de casinos sous une seule et même entité cotée en bourse. L’idée est de lever facilement de l’argent en vendant des actions au public tout en gardant le contrôle sur son empire du jeu. À l’origine, THCR possédait les trois casinos dont on vient de décrire un rapide historique : Trump Plaza Hotel and Casino, Trump Marina Hotel Casino (anciennement Trump Castle) et Trump Taj Mahal.  Donald Trump est à la fois président, CEO et “figure de proue” de la société. Il promettait aux investisseurs de “profiter de son génie pour transformer Atlantic City”. Le problème est que dès sa création, THCR est lourdement endettée. Donald Trump apportait surtout ses actifs existants (déjà surendettés). L’entreprise émettait des obligations à haut risque (“junk bonds”) pour financer des projets d’expansion. Mais, les revenus générés par les casinos n’étaient pas suffisants pour couvrir les intérêts de cette dette faramineuse.

En clair : THCR était une machine à promesses… alimentée par des dettes impossibles à rembourser.

Trump Hotels & Casino Resorts connaît plusieurs faillites.  En 2004, THCR dépose son bilan sous le Chapitre 11, Donald Trump, reste en poste, mais cède près de 50% de la société à ses créanciers pour alléger la dette. Il reste en poste, mais son pouvoir réel diminue. Un an plus tard, THCR change de nom pour devenir Trump Entertainment Resorts

En 2009, Trump Entertainment Resorts déclare une nouvelle fois faillite. Donald Trump quitte officiellement le conseil d’administration, affirmant qu’il veut se “détacher” d’une entreprise “qu’il ne contrôle plus”. À ce moment-là, Donald Trump n’a plus qu’un intérêt financier symbolique et ne joue plus qu’un rôle d’image, son nom étant encore utilisé sous licence.

Petite histoire d’Atlantic City

Fondée en 1854, Atlantic City est rapidement devenue une station balnéaire très populaire pour la bourgeoisie de Philadelphie et New York. À cette époque, bien que les jeux d’argent soient techniquement illégaux, des formes de jeu clandestin (paris, loteries privées, etc.) prospèrent dans l’ombre. Pendant les années 1920, l’époque de la Prohibition donne un nouvel essor à la ville : bars clandestins, jeux illégaux et criminalité organisée se développent.

Après la Seconde Guerre mondiale, la popularité d’Atlantic City décline fortement. De nombreux hôtels ferment, la pauvreté augmente, et la ville tombe en décrépitude. Face à la crise économique, la population vote en 1976 pour légaliser les casinos (hors Las Vegas, c’est une première aux États-Unis). L’objectif de redynamiser la ville en attirant touristes et investisseurs.

Le premier casino, Resorts International, ouvre en 1978. Très vite, d’autres suivent : Caesars, Bally’s, Trump Plaza… Dans les années 1980, Atlantic City est surnommée la « Las Vegas de la côte Est ». C’est l’âge d’or, avec des millions de visiteurs chaque année.

C’est dans cet environnement que Donald Trump intervient en espérant tirer parti d’une situation favorable aux affaires. Certes il n’est pas le seul à s’y casser les dents, mais force est de constater que sa réussite n’a pas été au rendez-vous ? (Donald Trump wasn’t the only one who made a bad bet on Atlantic City). Faut-il donc se fonder sur la prétendue prescience et compétence du président des États-Unis pour gager sur une réussite à venir de l’économie américaine ?  

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