« Congress shall make no law respecting an establishment of religion, or prohibiting the free exercise thereof; or abridging the freedom of speech, or of the press; or the right of the people peaceably to assemble, and to petition the Government for a redress of grievances ». | « Le Congrès n’adoptera aucune loi relative à l’établissement d’une religion, ou à l’interdiction de son libre exercice ; ou pour limiter la liberté d’expression, de la presse ou le droit des citoyens de se réunir pacifiquement ou d’adresser au Gouvernement des pétitions pour obtenir réparations des torts subis. » |
Tel est ainsi rédigé le premier amendement de la déclaration des droits (Bill of Rights) qui compléta en 1791 la Constitution rédigée quatre ans plus tôt. Vu de France, la fille aînée de l’Eglise qui a voté la loi de 1905 de séparation de l’église et de l’état[1], on présente souvent les Etats-Unis comme une nation où la religion tient une place très importante. Sans doute à juste titre et plusieurs devises militent dans ce sens :
– « God Bless America » que répètent tous les présidents à leur fin de leurs discours[2] ;
– Le serment d’allégeance au drapeau qui fait explicitement référence à Dieu : « I pledge allegiance to the Flag of the United States of America, and to the Republic for which it stands, one Nation under God, indivisible, with liberty and justice for » ;
– « In God we trust » inscrit sur tous les billets de banque.
Et la liste des exemples est loin d’être complète. On pourrait y ajouter les prières de l’aumônier du Sénat lors de l’ouverture des séances.
Dans la veine du premier amendement, les Américains sont opposés à déclarer la religion chrétienne (mais aussi n’importe quelle religion) de religion officielle des Etats-Unis. Alors même que certains historiens, politiques et leaders religieux souhaitent discuter sur le rôle de la religion dans la sphère privée. C’est ce que révèle une enquête réalisée par le Pew Research Institute (In U.S., Far More Support Than Oppose Separation of Church and State). Le sous-titre de cette enquête montre que des groupes y sont opposés : « But there are pockets of support for increased church-state integration, more Christaniaty in public life ». Certes ils sont minoritaires mais ils sont très actifs et vocaux.
Plus de deux Américains sur trois pensent que le gouvernement fédéral ne doit jamais mentionner une religion (n’importe laquelle) comme religion officielle des Etats-Unis. Une proportion à peu près équivalente d’Américains pense la Constitution des Etats-Unis a été écrit par des hommes et qu’elle reflète leur pensée et pas nécessairement leur vision de Dieu (le nom de Dieu n’est pas mentionné) et que le gouvernement fédéral doit promouvoir des valeurs morales partagées par les gens appartenant à toutes les confessions.
On pourrait d’ailleurs être étonné que ces proportions ne soient pas plus élevées. Car l’idée de Dieu dans l’esprit des Pères fondateurs lorsqu’ils rédigèrent la Constitution était assez peu absente.
C’est ce qui avait poussé Mike Huckabee, candidat aux primaires républicaines de 2008, pasteur baptiste et ex-gouverneur de l’État de l’Arkansas entre 1996 et 2007, à annoncer lors des primaires du Michigan qu’un élément de son programme politique était d’amender la Constitution pour y intégrer des éléments du texte des préceptes divins et rendre ainsi le texte fondateur des États-Unis compatible avec celui de la foi chrétienne. L’objectif est notamment d’y inscrire la définition du mariage tel qu’il l’entend, entre un homme et une femme, dans la Constitution et interdire l’avortement dès la conception. Armé de la devise : « famille, foi et liberté », Mike Huckabee n’avait-il pas déclaré que « La Bible n’a pas été écrite pour être amendée, la Constitution, si ». Si Dieu était présent dans la Constitution, il n’y aurait pas besoin de l’y introduire ?
Il n’est pas surprenant que certains groupes soient opposés à la séparation de l’église et de l’Etat. Les chrétiens évangéliques sont les plus actifs sur cette question (voir tableau ci-dessous). Plus d’un tiers d’entre eux pensent que le gouvernement fédéral devrait arrêter de garantir la séparation de l’église et de l’état et que la Constitution a été inspirée par Dieu.
La différence partisane entre démocrates et républicains sur la place de la religion dans la sphère publique est également très marquée. Même si une majorité de ces derniers restent attachée à la neutralité de l’état par rapport aux religions.
[1] ARTICLE PREMIER. – La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes sous les seules restrictions édictées ci-après dans l’intérêt de l’ordre public.
[2] Cette formule n’est pas si ancienne puisqu’elle remonte seulement au début du XXe siècle. En 1918, Irving Belin, Américain d’origine juive, né en Biélorussie et arrivé aux Etats-Unis à l’âge de cinq ans, entend rendre hommage au pays qui l’a accueilli en composant une chanson patriotique. Vingt ans plus tard, il en propose une deuxième version pour une chanteuse en vogue, Kate Smith. Le succès est immédiat et God Bless America deviendra une sorte d’hymne national bis. Des propositions avaient même été faites, sans succès, pour qu’il remplace The Star-Spangled banner, l’hymne officiel depuis un vote du Congrès en 1931.
1 Commentaire