Aller au contenu Skip to footer

Cent jours pour quoi faire ?

De son débarquement à Golfe-Juan le 1er mars 1815 à sa seconde abdication le 22 juin 1815, après le désastre de Waterloo, les cent jours de Napoléon, c’est une seconde vie pour l’empereur, peut-être une troisième si l’on compte celle de Bonaparte, mais c’est aussi le début de la fin. Un faux espoir qui s’est mal terminé pour lui et pour la France.

De Franklin Roosevelt à Donald Trump I, on ne peut pas y échapper, le mythe des 100 jours a la vie dure et tous les présidents sont jugés à cet aune d’un temps bien court. En France, l’exercice est aussi souvent appliqué.

Les 100 jours de Barack Obama

Les 100 jours de Donald Trump

Le mythe des cent jours appliqué à Joe Biden

Quels étaient les 100 jours de Donald Trump II et quels sont les premiers résultats ? Make America Great Again ? Régler le conflit entre l’Ukraine et la Russie en 24 heures ? Accroître son pouvoir personnel ? Développer la nouvelle association entre le pouvoir politique et les oligarques de la Tech ? Augmenter sa fortune personnelle et celle des siens ? Démanteler les institutions intérieures ? Attaquer la démocratie ? Assouvir son besoin de vengeance ?  Peut-être tout cela en même temps.

Quelle est la réalité ?

Donald Trump n’a signé que 5 lois, dont aucune n’est majeure, le bilan le plus faible depuis un siècle. D’aucuns pourraient arguer que ce n’est pas la responsabilité du président, mais bien celle du Congrès. Sauf que l’Exécutif peut jouer le rôle de catalyseur en la matière. Pour la circonstance, Donald Trump a plutôt la voie de gouverner par décret, en contournant le Congrès et souvent au mépris de la Constitution. Mais grand bien lui fasse puisque, pour l’instant, les élus de sa majorité ne bougent pas et le suivent sans broncher. Le niveau d’approbation du Congrès est d’ailleurs assez largement inférieur à celui du président.

Nombre de lois votées par Donald Trump et par ses prédécesseurs lors des 100 premiers jours

Trump I24
Biden7
Barack Obama11
George W. Bush7
Bill Clinton21
George H.W. Bush13
Ronald Reagan9
Jimmy Carter19
Richard Nixon8
John Kennedy20
Dwight D. Eisenhower 20

Sur le plan intérieur, une des premières mesures prises le premier jour de son entrée à la Maison-Blanche a été de gracier plus de 1 500 personnes condamnées ou inculpées pour leur participation à l’assaut du Capitole, y compris des individus ayant agressé des forces de l’ordre. Sous couvert d’un soi-disant “waste, fraud and abuse”, le DOGE a licencié en masse et de manière totalement erratique des milliers de fonctionnaires. De son côté, Donald Trump a congédié de nombreux hauts fonctionnaires, dont plusieurs inspecteurs généraux indépendants, des membres démocrates de la Commission de protection de la vie privée et des libertés civiles, ainsi que plus de 160 membres du Conseil de sécurité nationale, souvent sans respecter les procédures légales requises. Au simple motif qu’ils ne lui plaisaient ou qu’ils n’étaient pas assez loyaux.

Le démantèlement de nombreuses agences gouvernementales est en cours dont celui du Département de l’Éducation. Un décret signé le 20 mars 2025 prévoit la suppression du ministère, y compris de son Bureau des droits civiques.

Sur le plan économique, le « businessman accompli » n’a pas fait de miracles loin de là. La croissance a ralenti, la confiance des particuliers et des entreprises est au plus bas, l’inflation n’a pas disparu et n’est pas près de le faire si les droits de douane persistent. Les annonces sur les droits de douane donnent le tournis et démontrent si besoin était que la seule stratégie envisageable à cette politique est celle du chaos.  

Le 2 avril, il annonce en grande pompe du Liberation Day. Aux droits de douane réciproques de 10 % sur tous les pays sauf quelques nations « amies » comme la Chine, la Biélorussie, la Corée du Nord, Donald Trump impose des tariffs spécifiques. Les produits en provenance du Canada et du Mexique, conformes à l’USMCA, sont exemptés de ces nouveaux tariffs. La suite n’a fait que montrer le manque de stratégie avec des mises en place et de retrait des droits de douane. Les plus charitables expliqueront qu’il maniait ces annonces comme un instrument de négociation. L’entourage du président faisait valoir que 70 pays s’étaient précicipés pour obtenir les faveurs du maître de Washington. On ne peut qu’en douter. Le plus spectaculaire dans ces volte-face a été les droits de douane de 145 % sur tous les produits provenant de Chine.  Le 11 avril 2025, l’administration Trump a annoncé des exemptions tarifaires pour certains produits électroniques. ​Cette décision est intervenue après des discussions entre le PDG d’Apple, Tim Cook, et le secrétaire au Commerce, Howard Lutnick, concernant l’impact potentiel des tarifs sur les prix des iPhones. Cependant, le secrétaire au Commerce a indiqué que ces exemptions pourraient être temporaires, avec la possibilité de nouveaux tarifs sur les semi-conducteurs dans un avenir proche.

Aux États-Unis, les mesures phares étaient l’arrêt de l’immigration, principalement à la frontière avec le Mexique, l’expulsion des étrangers illégaux et la baisse de l’inflation.

Les flux de migrants ont marqué un arrêt assez net depuis le mois de janvier. Après avoir longtemps ignoré le problème, Joe Biden avait commencé à s’en saisir et obtenir des premiers résultats, mais trop tardifs. Quant à l’expulsion de migrants illégaux, elle a été assez largement mise en scène, notamment avec une photo op de Kristi Noem devant les prisons du Salvador et des opérations musclées et largement médiatisées avec des dérapages comme le renvoi de Kilmar Abrego Garcia qui a été déporté par erreur au Salvador. Malgré une injonction de la Cour Suprême à le ramener aux États-Unis pour bénéficier d’un procès équitable, l’administration fait la sourde oreille. Quant à l’inflation, elle est restait à un niveau assez bas, mais pour combien de temps lorsque les droits de douane auront enchéri les produits importés. Pour l’heure, Donald Trump a engagé une bataille avec le patron de la FED pour baisser les taux d’intérêt.

Sur le plan international, les deux principaux dossiers sur lesquels il s’était engagé, l’Ukraine et le Moyen-Orient. Les résultats sont maigres pour ne pas dire nuls. Concernant le premier, on va avoir à un accord qui sonne comme une capitulation pour les Ukrainiens ou la poursuite de la guerre dont les Américains se laveront les mains et avec l’incertitude d’un soutien européen à la hauteur des enjeux. Parallèlement à la pression sur l’Ukraine pour accepter ce plan de paix infamant, Donald Trump poursuit son rapprochement idéologique avec Vladimir Poutine. Sur le second, il a donné un blanc-seing à Netanyahou pour poursuivre les bombardements de Gaza et proposé ce projet monstrueux d’évacuer les Gazaouites et de transformer l’endroit une Riviera du Moyen-Orient.

Si l’attention n’est pas trop insistance, Donald Trump a aussi lancé des initiatives dans l’espace et en haute mer. Le 27 janvier 2025, Trump a signé un décret ordonnant la construction d’un système de défense antimissile national, baptisé « Iron Dome for America », rapidement renommé « Golden Dome ». Ce projet vise à protéger le territoire américain contre les missiles balistiques, hypersoniques et de croisière, en s’inspirant du modèle israélien. ​À la différence que le territoire couvert est plus de 400 fois plus grand.  Le Congrès, dominé par les républicains, prévoit d’allouer 27 milliards de dollars à ce projet dans le cadre d’un paquet de défense de 150 milliards de dollars lié à une réforme fiscale. Les fonds serviront à développer des intercepteurs supplémentaires, des batteries THAAD et des technologies de suivi des missiles, en collaboration avec des entreprises comme SpaceX. Concernant la haute mer, Donald Trump a signé un décret pour faciliter l’exploitation minière des fonds marins, malgré les avertissements de plus de 30 pays et d’organisations environnementales sur les risques écologiques majeurs.

Ce manque de succès au compteur des 100 jours et la création d’un climat d’anxiété qui baigne désormais la société américaine se traduisent dans les enquêtes d’opinion. Le taux d’approbation en général et sur la gestion de l’économie de Donald Trump II est inférieur à celui de tous les présidents de l’après-guerre et même à celui de Donald Trump I (Donald Trump’s approval rating is dropping). Toutefois, cette appréciation dépend fortement des positions partisanes.

_________________
Seven-in-ten or more Republicans and Republican-leaning independents approve of:
– Trump’s job performance (75%)
– The administration’s cuts to government (78%)
– Increased tariffs (70%)
– Ending diversity, equity and inclusion (DEI) policies in the federal government (78%)
By comparison, even wider majorities of Democrats and Democratic leaners disapprove of:
– Trump’s job performance (93%)
– The administration’s cuts to government (89%)
– Increased tariffs (90%)
– Ending DEI policies in the federal government (86%)
(Source : Pew Research Center)
———————-

Tous les clignotants sont au rouge, mais cela ne semble pas avoir d’effet sur l’intéressé. Pourquoi ? Tout simplement parce qu’il pense que ses sondages sont au plus haut. « Chaotique et effrayant » sont pour l’heure les deux termes qui qualifient le second mandat de Donald Trump.

Recevez les derniers articles directement dans votre boîte mail !

Un Jour en Amérique © 2025. Tous droits réservés. 
Consentement des cookies