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Brett Kavanaugh : une ténébreuse affaire

Rien n’aurait-il changé depuis ? La ténébreuse affaire détaillée dans le roman d’Honoré de Balzac de la Comédie humaine porte sur un épisode obscur de l’époque napoléonienne, alors que des aristocrates résistent à se ranger au côté de l’Empereur et que Fouché veut faire disparaître les traces d’un complot royaliste avorté.

Ici, il s’agit plutôt d’une affaire de mœurs qui se mélange à la politique dans laquelle les démocrates ne sont pas mécontents de faire reculer une confirmation qu’ils n’approuvent pas à l’occasion d’une affaire qu’ils réprouvent et les républicains se rangent docilement du côté de leur président qui collectionne les casseroles dans des domaines voisins.  Lindsey Graham, sénateur de Caroline du Sud, vieil ami de John McCain, sénateur indépendant non aligné, est devenu le suppôt de Donald Trump. Triste évolution.

D’un côté, un juge, candidat à un fauteuil de la Cour Suprême, à l’un des postes les plus prestigieux du pays mais aussi l’un des plus importants, au CV apparemment impeccable, à la réputation sans tache, père de famille parfait.

De l’autre, une professeure de psychologie à Stanford, au CV tout aussi impressionnant et mère de famille irréprochable.

Mais voilà. Un grain de sable s’est logé dans la mécanique huilé de la nomination puis de la confirmation. Christine Blasey Ford est 100 % sûre qu’il y a 36 ans alors qu’elle avait 15 ans, Brett Kavanaugh, de deux ans son aîné, a tenté de la violer. Brett Kavanaugh affirme qu’il n’a jamais tenté de violer personne, ni au Lycée, ni à l’université, ni nulle part.

On est donc dans la situation caractéristique du « She said, he said ». Après avoir tergiversé et hésité, la Commission judiciaire du Sénat a proposé aux deux protagonistes de venir témoigner, sachant que la Maison-Blanche n’avait pas autorisé une enquête par le FBI comme ce fût le cas dans l’affaire Anita Hill / Clarence Thomas en 1991 dans un cas de harcèlement sexuel.

Tout en poliçant son langage sur le fait qu’il fallait réunir les conditions pour permettre à Christine Blasey Ford de témoigner, la quasi totalité d’entre eux avaient déjà pris leur décision : ils confirmeraient Brett Kavanaugh. Pour interroger Christine Blasey Ford, ils ont fait appel à une spécialiste de ces questions. Mais comme elle était un peu trop soft, Lindsey Graham a sonné la charge et repris le contrôle de l’interrogatoire.

Christine Blasey Ford a été convaincante mais Brett Kavanaugh est passé après avec une déclaration liminaire partisane assez déplacée pour un candidat à la Cour Suprême sonnant comme une critique contre les démocrates coupables de conspiration.

Bref, cette audition a donné l’impression qu’elle avait été organisée pour la forme mais que rien ne changerait sur le fond : Les républicains de la commission judiciaire voteraient pour, les démocrates contre.

Un des problèmes avec Brett Kavanaugh, expliquait Mark Shields, chroniqueur sur la chaîne PBS, est que les républicains ont voulu brosser un tableau parfait du candidat, sans doute beaucoup plus nécessaire et un profil qui ne présente absolument aucune ombre. La réalité, comme souvent, est différente.

 

https://www.youtube.com/watch?v=r1ZHN6GQpy8

A la fin de l’audition, Donald Trump intimait l’ordre, via un tweet, de voter pour Brett Kavanaugh et d’avancer le vote au niveau de l’hémicycle. Même Jeff Flake, le sénateur de l’Arizona, qui s’est fait remarquer à plusieurs reprises, s’est finalement rallié à ses pairs. Et puis, nouveau revirement, deux femmes impliquées dans des mouvements de défense de droits de femmes, le prirent à partie dans un ascenseur du sénat et semble avoir motivé sa prise de position : il était d’accord de confirmer Brett Kavanaugh mais demandait le report du vote général afin de permettre une enquête du FBI. Jeff Flake est devenu le nouveau héros. Poussé dans ses retranchements, le président Trump ordonnait de lancer une enquête. Ce que demandait l’association américaine des avocats

The American Bar Association urges the United States Senate Judiciary Committee (and, as appropriate, the full Senate) to conduct a confirmation vote on Judge Kavanaugh’s nomination to the Supreme Court of the United States only after an appropriate background check into the allegations made by Professor Ford and others is completed by the Federal Bureau of Investigation.

We make this request because of the ABA’s respect for the rule of law and due process under law. The basic principles that underscore the Senate’s constitutional duty of advice and consent on federal judicial nominees require nothing less than a careful examination of the accusations and facts by the FBI.

Maintenant, cette enquête sera peut-être « reculer pour mieux sauter ». Si l’enquête du FBI est concluante, alors Brett Kavanaugh sera confirmé. Et les démocrates seront un peu plus dans l’embarras pour savoir s’ils doivent ou non confirmer le juge.

Sinon, on sera revenu à la case départ, qui croire, car autant Christine Blasey Ford que Brett Kavagaugh semblait crédible et sincère. Alors il s’agira pour les sénateurs de voter en fonction de son intime conviction ou plutôt de leur appartenance partisane.

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