Franklin Delano Roosevelt passa un véritable tsunami de lois pour surmonter la Grande Dépression contre laquelle son prédécesseur, Herbert Hoover, n’avait pas voulu prendre de mesures significatives. Harry Truman devait décider ou pas de lancer la bombe atomique sur le Japon pour arrêter la guerre. Il le fera finalement au cours du quatrième mois, les 6 et 9 août 1945, respectivement sur Hiroshima et Nagasaki. John Kennedy a été confronté au fiasco du débarquement de la baie des Cochons à Cuba. Reagan fut victime d’une tentative d’assassinat.
Que retiendront les historiens des Cent premiers jours de Joe Biden ? Qu’il géra avec détermination l’opération de vaccination contre la Covid avec un résultat double de l’objectif qu’il s’était fixé au départ (220 millions de doses administrées contre 100 millions annoncés) ? Qu’il signa une loi de sauvetage de la crise sanitaire de 1 900 milliards de dollars ? Qu’il décida de rapatrier les soldats présents en Afghanistan à échéance du 11 septembre ? Qu’il prévoit d’augmenter les impôts des entreprises et des foyers les plus riches ? Qu’il aura proposé une fiscalité sur les entreprises au niveau mondial pour supprimer le phénomène d’aubaine des paradis fiscaux ? Qu’il soit revenu dans nombreuses institutions abandonnées par Donald Trump (Accord de Paris, OMS…) ? Qu’il faut engager une profonde réforme de la police ? Qu’il existe un racisme systémique ? Qu’il entend développer un échange musclé et maitrisé avec la Chine et la Russie ?
En tous cas, le qualificatif de Sleepy que Donald Trump avait essayé de lui coller à la peau pendant toute la campagne n’aura pas accroché car depuis qu’il est arrivé à la Maison Blanche, Joe Biden a lancé de nombreuses initiatives dont trois lois majeures, sachant que les deux dernières ne sont pas encore gagnées.
Il y a la personnalité du président, la forme de son discours et le fond, c’est-à-dire les politiques mises en œuvre, et la méthode. Sur ces quatre points, Joe Biden est l’opposé de Donald Trump. Ses qualités – humilité, décence, empathie naturelle – dépeignent en creux ce qu’était un Donald Trump marqué par la vulgarité, la grossièreté et l’indignité. Les républicains supportaient ses écarts permanents dans une sorte de pacte faustien en échange de quelques actions comme la baisse des impôts et la nomination de juges conservateurs à la Cour Suprême et dans les cours de niveau inférieures. Dans son discours en réponse à celui de Joe Biden, le républicain Tim Scott en convient sans détour : « Our president seems like a good man. His speech was full of good words ». Une attitude qui diffère avec celle qui prévalait du temps de Barack Obama qui, il est vrai, était plus froid et cérébral et surtout n’avait pas l’historique qu’a Joe Biden au Sénat. Difficile pour Mitch McConnell ou Lindsey Graham de dire du mal d’un ancien collègue avec qui ils avaient des relations amicales (même si on le sait l’amitié en politique a ses limites) pendant des années, voir des décennies.
Sur la forme, Joe Biden vise dans toutes ses interventions à unir et à rassembler plutôt qu’à cliver et à désigner des adversaires, des boucs-émissaires, voire des ennemis. « There is not a single thing — nothing, nothing beyond our capacity. We can do whatever we set our mind to if we do it together. So let’s begin to get together », concluait-il dans son discours au Congrès. Il reste toujours très soucieux de ménager ses opposants républicains tout en voulant faire passer son point de vue. Une approche en totale rupture avec son prédécesseur.
Enfin sur le fond et c’est peut-être là le plus important, Joe Biden a une conception assez traditionnelle des démocrates où l’état joue un rôle important dans l’économie. De ce point de vue, c’est là une rupture avec les républicains depuis la vague néolibérale initiée par Ronald Reagan où l’état était le problème et où les ressorts de la société étaient principalement centrés sur les entreprises privées et sur l’individu (« In this present crisis, government is not the solution to our problem; government is the problem » – Ronald Reagan dans son discours d’investiture). C’est ce que l’éditorialiste néoconservateur Bill Kristol qualifie de « Old-Fashioned Liberalism » par opposition aux « woke liberalism ». En gros, le mouvement liberal traditionnel, celui qui s’attache à défendre les classes populaires et les classes moyennes plutôt que celui, plus récent, que Mark Lilla qualifie de gauche identitaire et qui s’attache plus à l’appartenance identitaire de ceux dont elle s’érige comme le porte-drapeau. « Nous devons réapprendre à parler aux citoyens en tant que citoyens et à présenter nos idées – y compris celles visant à améliorer la vie de certains groupes – de manière à ce que tout le monde puisse les soutenir ». Nous devons devenir une gauche républicaine » considère le professeur de littérature à l’université de Columbia.
C’est précisément ce que cherche à faire Joe Biden et, en tous cas, c’est ce qu’il détaille dans son discours au Congrès. Un discours qui marque le retour en force du gouvernement dans l’action publique. Les trois plans qu’il présente – American Rescue Plan pour sortir de la crise sanitaire et relancer l’économie votée par le congrès, American Jobs Plan pour réparer les infrastructures physiques et sociales et American Families Plan pour améliorer la société en aidant les familles – visent cet objectif. C’est un effort de 6 000 milliards de dollars environ 30 % du PIB. C’est donc un effort considérable dont la vocation est de créer les emplois pour les cols bleus et la classe moyenne du 21e siècle auxquels rend hommage Joe Biden « The middle class built the country. And Unions build the middle class » rappelle Joe Biden. Le mot Jobs est répété une cinquantaine de fois dans son discours.
Ces nouveaux emplois ne sont pas liés au charbon, à l’acier, à l’automobile qui représentent les industries du 20e siècle. Il ne faut pas chercher à revenir en arrière mais bien d’aller de l’avant. Leurs employeurs sont les Amazon et les Uber d’aujourd’hui mais qui utilisent les mêmes bonnes méthodes du passé. Les intimidations du géant du e-commerce dans le centre de tri d’Alabama pour empêcher la constitution d’un syndicat local le montre assez clairement. Jeff Bezos n’a rien à envier aux « barons voleurs » de la fin d’un 19e siècle.
Dans les défis posés aux Etats-Unis, face notamment à la montée en puissance de la Chine, la puissance publique à son mot à dire et pas seulement en imposant des droits de douane mais aussi en développant les technologies d’aujourd’hui et de demain. Joe Biden rappelle les heures de gloire de la DARPA (Defense Advanced Research Projects Agency) qui a été à la source d’Internet, du GPS et de bien d’autres technologies qu’exploitent aujourd’hui les GAFA. Dans la santé, la NIH (National Institutes of Health) doit participer activement au développement des traitements contre le diabète, l’Alzheimer ou le cancer. Joe Biden rappelle que la recherche publique atteignait 2 % du PIB, aujourd’hui elle est inférieure à 1 %.
La méthode retenue par Joe Biden tranche aussi avec celle de son prédécesseur. Donald Trump dirigeait les Etats-Unis à coup de décisions impulsives diffusées par des tweets intempestifs, tous ceux qui n’étaient de son avis étaient des ennemis. Joe Biden a une approche totalement différente liée à sa personnalité, à son expérience politique et aux liens qu’il avait nombre de républicains avant de devenir président. Son discours est à l’opposé de ce qu’aurait pu dire Donald Trump mais il n’a jamais mentionné et encore moins dénigré son prédécesseur. Même si la première des trois grandes lois a été votée sans l’aide d’un seul vote républicains, Joe Biden veut toujours tendre la même aux républicains que ce soient les élus ou les électeurs. Et c’est du côté de ces derniers qu’il y aura peut-être une possibilité de levier. Car déjà près d’un quart des électeurs du GOP soutiennent l’American Rescue Plan.
« Thanks (…) the overwhelming support of the American people — Democrats, Independents and Republicans – we did act ».
« If you think it’s not important, check out in your own district, Democrat or Republican. Democrat or Republican voters ».
Il entend donc laisser sa porte ouverte et sa main tendue :
« Vice President Harris and I meet regularly in the Oval Office with Democrats and Republicans to discuss the jobs plan. And I applaud a group of Republican senators who just put forward their own proposal ».
« We talked about it long enough, Democrats and Republicans. Let’s get it done this year ».
I know Republicans have their own ideas and are engaged in productive discussions with Democrats in the Senate ».
Et enfin, le dernier point sur lequel Joe Biden apporte un souffle nouveau porté par l’optimisme (« America is rising anew. Choosing hope over fear, truth over lies and light over darkness ») et non par le ressentiment, tout en sachant pertinemment que les Etats-Unis, comme le monde entier, traverse de multiples crises emboitées les unes dans les autres : « Tonight, I come to talk about crisis and opportunity ». I can report to the nation, America is on the move again ».
« Turning peril into possibility, crisis into opportunity, setbacks to strength », emprunté au mot chinois crise qui a la double signification : danger et opportunité. C’est là une vision très américaine.
Et pendant ce temps, Donald Trump…
Et pendant ce temps, Donald Trump continue à chasser ses vieilles lunes : répéter à l’envi le big lie, c’est-à-dire le fait que Joe Biden n’a pas gagné les élections, adouber ou décapiter les républicains en fonction de leur allégeance au chef, lui, ou encore jouer au golf.
Statement by Donald J. Trump, 45th President of the United States of America
Great news for the Republican Party! Senator Lisa Murkowski said she is “still weighing whether she will run again” for the Senate in Alaska. In other words, there is a chance that she won’t run! Wouldn’t that be great? And so many people are looking to run against Crazy Liz Cheney—but we only want one. She is so far down in Wyoming polls that the only way she can win is numerous candidates running against her and splitting the vote. Hopefully, that won’t happen. I’ll make an Endorsement soon!
Statement by Donald J. Trump, 45th President of the United States of America
The Republican Party is demanding that Governor Ducey of Arizona immediately provide large-scale security for the brave American Patriots doing the Forensic Audit of the 2020 Presidential Election. Governor Ducey will be held fully responsible for the safety of those involved. State police or National Guard must be immediately sent out for protection. The Democrats do not want to have this information revealed, and they will do anything to stop it. Governor Ducey must finally act!