Pour la première fois, douze républicains ont « osé » dire non à Donald Trump pour un score final de 59 – 41.
Retour sur une fixation. Dès son premier discours de campagne, le mur a été un marqueur des idées du candidat Trump. Pour empêcher des hordes de Mexicains qui sont des voleurs et des violeurs et autres Sud-Américains, Donald Trump avait émis l’idée de construire un mur sur toute la frontière entre le Mexique et les Etats-Unis. Et cerise sur le « mur », ce seront les Mexicains qui paieront pour construire ce mur. Il a fallu d’abord se rendre compte que les Mexicains ne paieraient pas pour ce mur. Qu’à cela ne tienne, Donald Trump a expliqué qu’il n’avait jamais été question qu’ils fassent un chèque, mais que ce financement se fera grâce au « beautiful » traité renégocié avec le Canada et le Mexique et devant succéder au NAFTA.
Sans financement extérieur, il fallait donc que les Etats-Unis le paient. Mais c’est là où les choses se compliquent car c’est le Congrès qui décide des financements. Et depuis le début de l’année, ce sont les démocrates qui ont la majorité à la Chambre des représentants. Du coup, plus question de délier les cordons de la bourse.
Il y a eu ensuite le pitoyable épisode du shutdown, Donald Trump ayant joué contre les démocrates emmenés désormais par leur nouveau leader Nancy Pelosi et perdu.
Qu’à cela ne tienne encore, Donald Trump a fait appel à une loi votée en 1976, the National Emergencies Act of 1976 pour obtenir les quelques milliards de dollars nécessaires. Arguant depuis 1976, les présidents successifs ont utilisé cette « arme politique » pour prendre des mesures rapidement. Oubliant évidemment de préciser qu’à chaque fois, aucun financement n’avait été demandé.
C’est donc une augmentation significative du pouvoir de l’Exécutif. La grande majorité des républicains, hypnotisés ou terrorisés par Donald Trump n’ont pas moufeté. Mais une douzaine a considéré que cela allait trop loin avec deux types d’arguments.
Pour certains, c’est une question de principe. Cette décision n’est pas définie dans la Constitution.
Pour d’autres, plus cyniques ; si on accepte une telle mesure, rien n’empêcherait alors un président démocrate de décider l’urgence nationale pour prendre des mesures sur la santé, les armes à feu ou tout autre sujet sensible. Bref, cela créerait un précédent.
Pour d’autres encore, les deux arguments ne sont pas incompatibles.
Sur les douze sénateurs, deux seulement sont exposés aux foudres du président dans la mesure où ils pourraient se présenter en 2020 : Lamar Alexandre et Susan Collins. Et cette dernière seulement en aurait exprimé le souhait. Les autres peuvent espérer que la page Trump sera tournée à cette date-là.
Parmi ceux qui ont soutenu le président par leur vote, un nombre non négligeable avaient part de leur opposition à ce projet – une vingtaine -, mais se sont finalement rangés aux côtés de leur champion. Selon le New York Times, Lindsay Graham, Ben Sasse et Ted Cruz ont été jusqu’à déranger le président pendant son dîner pour lui dire de reculer. Et comme Trump ne recule jamais, ce sont eux qui se sont gentiment « écrasés ».
Parmi ceux qui ont « retourné leur veste » de la manière la plus remarquable qui soit, c’est Thom Tillis qui obtient la palme. Le sénateur de la Caroline du Nord avait écrit un éditorial sans ambiguïté le 25 février dernier dans le Washington Post intitulé : « I support Trump’s vision on border security. But I would vote against the emergency » dans lequel il n’hésite pas à écrire :
It is my responsibility to be a steward of the Article I branch, to preserve the separation of powers and to curb the kind of executive overreach that Congress has allowed to fester for the better part of the past century. I stood by that principle during the Obama administration, and I stand by it now.
Republicans need to realize that this will lead inevitably to regret when a Democrat once again controls the White House, cites the precedent set by Trump, and declares his or her own national emergency to advance a policy that couldn’t gain congressional approval.
These are the reasons I would vote in favor of the resolution disapproving of the president’s national-emergency declaration, if and when it comes before the Senate.
Et seulement trois semaines plus tard, les principes se sont envolés.
Donald Trump avait expliqué aux sénateurs qui avaient exprimé leur refus de soutien au président dans des appels téléphones que cela aurait des conséquences sur le plan électoral. Plus récemment, il a utilisé la boîte à tweet pour faire pression sur les sénateurs avant le vote.
Il va donc opposer son véto et ne pourra pas être démenti par les deux-tiers du Congrès. L’affaire va donc être déportée sur le plan juridique. Déjà 16 états ont posé un recours devant les tribunaux. Et le temps juridique n’est pas le même que celui de l’Exécutif.