Depuis quelques semaines, la machine à tweets de Donald Trump a accéléré la fabrication de messages sur l’enquête concernant ses relations avec la Russie et l’entourage de Vladimir Poutine. La frénésie et l’agitation semblent, ici, être le signe d’une anxiété croissante. Pour l’instant, les conclusions de l’enquête, pardon de la « discredited Witch Hunt », n’ont pas encore été publiées mais un nombre élevé de personnalités de l’entourage proche et moins proche de Donald Trump ont déjà été inculpés et certains d’entre eux ont plaidé coupables dans l’espoir d’alléger leur peine mais avec la contrepartie expresse de dire la vérité, toute la vérité, rien toute la vérité.
Pour l’heure, Donald Trump a tout mis en place pour démettre le procureur Mueller de ses fonctions d’enquêteur en chef en limogeant son ministre de la Justice et en nommant à sa place un loyal et fidèle successeur qui avait commenté publiquement tout le mal qu’il pensait de cette enquête et de ce qu’il convenait de faire. Mais il n’a pas cédé à la tentation de le faire, car son entourage a dû lui faire comprendre que le prix à payer politiquement serait très élevé et pourrait aller jusqu’à commencer par la lettre i.
Bis Repetita. Cette semaine, Michael Cohen, qui avait déjà plaidé coupable, a réitéré l’initiative cette fois pour avoir menti devant le Congrès, ce qui évidemment risque de le mener derrière les barreaux pour un bon moment.
– Il avait indiqué que le projet de la Tour Trump à Moscou s’était terminé en janvier 2016. En fait, il a couru activement pendant la campagne jusqu’en juin de même année.
– Michael Cohen avait affirmé n’avoir jamais considéré aller à Moscou en lien avec ce projet et, en tout jamais demandé l’autorisation de Donald Trump. Il confesse le contraire aujourd’hui et en a bien parlé à son chef.
– Michel Cohen indiquait ne pas se rappeler une quelconque réponse du gouvernement russe sur ce projet. En fait, le 14 janvier, il a envoyé un mail à Dmitry Peskov, porte-parole de Vladimir Poutine. Six jours plus tard, un assistant de ce dernier et Michael Cohen ont eu un échange de 20 minutes au téléphone.
En conclusion, alors que Donald Trump a répété à l’envi qu’il n’avait aucun projet, aucun lien, aucune activité avec la Russie, rien et même moins que rien, on apprend qu’à l’évidence, il a poursuivi activement et par tous les moyens, de planter une tour en plein Moscou avec son nom TRUMP marqué en lettres dorées sur la façade. Cela fait 30 ans qu’il essaye et qu’il n’y arrive pas. Maintenant, dans un tweet, il admet le contraire qualifiant ce projet russe de « very legal » et « very cool ». Alors que la situation est sérieuse, il ne peut s’empêcher au passage de commencer son message par de l’autocongratulation en se qualifiant de « very good developer ». Alors qu’il ne développe plus rien depuis longtemps mais ne fait que de réaliser des opérations de cession de licences.
On at least 23 occasions since the summer of 2016, Mr. Trump has said either that he had “nothing” to do with Russia, or that he has “no deals,” no investments and no “business” in Russia.
Pour forcer le destin et s’attirer les bonnes grâces du maître du Kremlin, il aurait même considéré offrir le « Penthouse » à Vladimir Poutine, un cadeau d’une valeur de 50 millions de dollars. Une idée assez lumineuse comme l’explique David Cay Johnson qui suit Donald Trump depuis plus de 30 ans et auteur de plusieurs ouvrages sur ses affaires, car s’il avait réussi, la présence de Vladimir Poutine au sommet de la Tour aurait poussé tous ses fidèles et ses courtisans à acheter un appartement dans la tour pour être au plus près de leur maître.
« Follow the money » avait été le slogan du film All the President’s Men narrant l’épisode du Watergate. Il est toujours d’actualité. Pourquoi pendant la campagne et depuis qu’il est président, Donald Trump a-t-il toujours été très conciliant et complaisant avec Vladimir Poutine et la Russie ? Pourquoi avait-il fait modifier la plate-forme républicaine dans ce sens pendant la campagne ? A l’occasion du sommet d’Helsinki, pourquoi n’avait-il pas été capable de choisir entre Poutine et ses propres agences de renseignement ?
Ces nouvelles informations peuvent expliquer les motifs. On avait longtemps parlé du fameux Kompromat que les Russes avaient sur Trump (avec des détails salaces). Il est tout à fait possible que ce dossier existe mais il relève plus de la rubrique « faits divers » et du caniveau que de la politique. Cette nouvelle information est beaucoup plus sérieuse et grave et explicite le levier qu’avaient les Russes sur le président des Etats-Unis. Même si elle paraît hautement vraisemblable, l’information doit évidemment être vérifiée, car elle est beaucoup plus grave.
Jusqu’ici la base de Donald Trump a été loyale et le parti républicain s’est assez largement rangé derrière leur nouveau président par suite d’un sombre calcul : ils sont prêts à accepter les excentricités ou les énormités de l’hôte de la Maison-Blanche en échange d’une mesure particulièrement importante à leurs yeux : pour certains, c’est la nomination de juges conservateurs à la Cour Suprême avec en ligne de mire la révocation de l’arrêt Roe V. Wade, pour d’autres, c’est la baisse des impôts, pour d’autres encore, c’est les dérèglementations à tout crin. Mais si ou lorsque l’histoire passera et rendra son jugement, ils auront alors à rendre des comptes. C’est tout le sens de l’article du DailyBeast (Conservatives, Prepare Yourself Now for What Mueller May Find) qui résume bien la situation.