La séparation des enfants de leur parents par les autorités américaines a ému le monde (les bonnes âmes pour certains), il n’en a cure ; a suscité la réprobation du pape François, c’est qui ? ; a fait réagir les dirigeants des firmes de la Silicon Valley, ça le pousserait plutôt à poursuivre et accentuer ; a déchiré les épouses des anciens présidents, et alors ? ; a révulsé les démocrates, cela aurait eu plutôt tendance à le faire renforcer la mesure ; a scandalisé sa femme, sa fille, déjà un peu plus embêtant ; Mais surtout, la mesure a également dérangé sa base, en particulier les intégristes protestants que sont les évangélistes. Et, une fois n’est pas coutume, le Congrès a réagi. Mardi Mitch McConnell, le chef de la majorité du Sénat déclarait que cette nouvelle politique décidée par Donald Trump « devait être réglée ». De son côté, Paul Ryan, le Speaker de la Chambre des Représentants a indiqué mardi que les députés préparaient une loi pour « garder les familles réunies ».
Seulement (si l’on peut dire !) 55 % des Républicains soutiennent cette mesure de séparation contre 35 % qui s’y opposent. Globalement, deux Américains sur trois condamnent contre 27 % qui approuvent. C’est Quinnipiac University qui donne d’autres éléments intéressants et qui montre l’opposition des Américains – surtout des démocrates – sur les positions de l’Administration Trump sur les questions d’immigration. Entre autres :
– Pensez-vous que les immigrants arrivés aux Etats-Unis alors qu’ils étaient des enfants (Dreamers) peuvent rester et éventuellement faire une demande de citoyenneté ?
Oui à 79 % et 61 % chez les Républicains
– Pensez-vous que l’Administration Trump est trop agressive en « déportant » les immigrants entrés illégalement aux Etats-Unis
Trop agressive pour 50 % et seulement 10 % chez les républicains
– Soutenez-vous la construction d’un mur le long de la frontière avec le Mexique ?
Non pour 58 % des Américains et Oui pour 77 % des républicains
– Que devraient faire les immigrants illégaux habitant aux Etats-Unis ?
Rester et demander la citoyenneté pour 67 % des Américains et pour 48 % des républicains (36 % pensent qu’ils ne devraient pas rester).
Et les élections de midterms ne sont pas si loin. Il serait donc pour le moins risqué de compromettre un scrutin qui finalement ne se présente pas aussi mal pour les Républicains qu’il y a un mois ou deux. L’économie se portent plutôt bien, Donald Trump s’en attribut tout le mérite, il a pris une photo avec Kim Jong-Un et dit aux Américains qu’ils pouvaient dormir tranquille puisque que le risque nucléaire était surmonté, maltraité ses alliés du G7, et s’est retiré des institutions internationales pour jouer seul contre tous dans l’unique intérêt des Américains.
Garde, Vieux Monde, tes fastes d’un autre âge, crie-t-elle
Donne-moi tes pauvres, tes exténués, Qui en rangs pressés aspirent à vivre libres, Le rebut de tes rivages surpeuplés, Envoie-les-moi, les déshérités, que la tempête m’apporte J’élève ma lumière et j’éclaire la porte d’or !
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D’où un recul en rase campagne qui en fait ne règle pas vraiment la question. D’abord, Donald Trump et la Secrétaire de la sécurité intérieure Kirstjen Nielsen ont doublement menti en affirmant que la situation était le résultat d’une loi passée par les démocrates et qu’ensuite seule le Congrès pouvait agir sur le sujet de la séparation des enfants. On s’en est rendu compte lorsque deux jours plus tard, Donald Trump, dans le cérémonial désormais largement rodé, a signé un Executive Order pour suspendre la séparation des enfants de leurs parents. C’est la simple conséquence de la circulaire baptisée « zero-tolerance immigration policy » publié par le ministère de la Justice et dit-on inspiré par le furieux Stephen Miller.
Mais il est vrai que la question n’est pas réglée pour autant. Les immigrants illégaux sont poursuivis pour crimes et donc incarcérés avec les enfants puisqu’ils ne sont plus séparés. Mais c’est là où intervient l’accord baptisé « Flores settlement » (1997) qui demande à ce que les enfants ne soient pas enfermés « trop longtemps ». Et donc comme les parents resteront enfermés, le problème est donc insoluble. En attendant de trouver une solution, les familles seront donc placées dans des bases militaires au Texas et Arkansas. On parle de 20 000 détenus.
Le Congrès qui était sur le point de voter une loi a d’abord fait savoir qu’elle la repoussait à plus tard. Dans un tweet incompréhensible, Donald Trump a fait savoir que les républicains perdaient leur temps à s’acharner à voter une loi avec novembre et qu’ils feraient mieux de s’attacher à faire élire le maximum de sénateurs et députés aux midterms.