Dans son livre « Est-il trop tard pour sauver l’Amérique ? » qui vient d’être publié, Patrick Artus et Marie-Paule Virard montrent bien les excès et les faiblesses dont ont fait preuve les Etats-Unis depuis quelques années ou plutôt certains acteurs économique et politiques. Chapitre après chapitre, le livre décortique les différents rouages du gigantesque meccano qui nous a conduits là où on en est aujourd’hui. La quasi totalité du livre porte sur l’analyse de ce qui s’est passé plus que d’essayer de répondre à la question posée par le titre du livre.
Une chose est sûre la crise que nous vivons est grave, profonde et longue, peut-être plus longue que prévu. Témoin le titre du journal Le Monde daté du samedi 23 mai « Les Etats-Unis ne sont pas près de sortir de la crise ». Le regain boursier depuis le début de l’année pourrait faire oublier tous les autres indices de l’économie qui sont mauvais, voire très mauvais. A commencer par le taux de chômage aux Etats-Unis qui pourrait dépasser les 10% d’ici à la fin de l’année. Impensable il y a seulement quelques mois. La première économie du Monde détruit chaque mois depuis octobre dernier entre 500 000 et 600 000 emplois chaque mois. Du jamais vu.
Avec une conclusion presque en filigrane sous la forme d’une boutade « Il faut sauver le soldat Obama » qui instille l’idée que nous n’avons pas vraiment le choix. Et le pays qui est en première ligne dans ce sauvetage est la Chine. « Le petit jeu sino-américain su « je te tiens, tu me tiens par la barbichette » (1) (Tu m’achètes mes produits, je t’achète ta dette) est sinon dangereux, du moins instable et volatil, susceptible d’être remis en cause à tout instant ».
L’axe sino-américaine devient de plus en plus important dans l’économie du Monde. Le poids des Etats-Unis va aller en se réduisant tandis que parallèlement la Chine entend devenir plus qu’un puissance régionale. Mais en attendant que cela arrive, elle préfère y parvenir dans le système actuel plutôt que de tout casser. D’où le fait que les Chinois se livrent de bonne ou mauvaise grâce à acheter des bons du Trésor américain. « Avec quelque 1700 milliards de dollars investis en actifs libellés en dollars (dont près de 700 milliards de dollars de treasuries), la Chine est devenue de loin le premier créditeur des Etats-Unis ».
Les Chinois espèrent donc fortement, et le font savoir, que les Américains honoreront leurs dettes. En particulier que le rapport entre le dollar et le Yuan ne changera pas trop de manière à ce que les réserves des Chinois libellés en dollars ne disparaissent pas en fumée. Tout ceci amène donc à une crispation dans le rapport entre les deux puissances. En espérant qu’elle restera au niveau diplomatique.
« Nous vous haïssons les gars ! Une fois que vous aurez émis entre 1000 et 2000 milliards de dollars de papier, nous savons que le billet vert va se déprécier alors nous vous haïssons, mais que pouvons-nous faite d’autre [qu’acheter la dette publique américaine, NdA] ? » Les auteurs du livre rapportent les propos de Luo Ping, l’un des dirigeants de la Commission de régulation bancaire chinoise qui participait à la 10e Convention annuelle du risk management qui s’est tenue à New York en février dernier.
Cet éclat de voix inhabituel dans ce genre de conférence montre bien les préoccupations des dirigeants chinois a été repris par une chaîne de télévision américaine. Dans un accent de populisme qui caractérise en général les intervenants de Fox News le présentateur relate le voyage d’Hillary Clinton en Chine et rassemble ce qu’il appelle les quatre pièces du puzzle qui représente la situation actuelle :
1. Obama veut réduire de moitié le budget du budget américain d’ici la fin de son mandat ;
2. Hillary Clinton choisit la Chine pour son premier voyage officiel à l’étranger ;
3. L’accent de voix de Luo Ping traduit en clair ce que pensent tout bas les Chinois ;
4. Peut-être devrait-on acheter de l’or dont le cours est extrêmement élevé.
De deux choses l’une : les gens n’ont plus confiance en l’idée que le dollar va conserver sa valeur ou ils ne croient pas que les Etats-Unis peuvent arrêter la planche à billet avec les conséquences inflationnistes que cela pourrait avoir.
La conclusion assez juste : Time is running out (le temps est compté)
La clé de tout ça : La Chine
La seconde conclusion : les Chinois ont besoin de nous à court terme ? Peut-être. Mais à long terme ?
La seule que manque de mentionner est qui a mis les Etats-Unis dans cette situation calamiteuse. Obama n’a fait qu’hériter d’une situation que peu de président ont eu à gérer. Les trente années de libéralisme économique au sens français où le seul credo imposé par Margaret Thatcher et Ronald Reagan a été celui du marché tout puissant et seul régulateur en portent la principale responsabilité.
Certes, George W Bush a été confronté à l’épreuve du 11 septembre 2001. « Nous sommes tous Américains » s’écria Jean-Marie Colombani dans un éditorial. « Comment ne pas se sentir en effet, comme dans les moments les plus graves de notre histoire, profondément solidaires de ce peuple et de ce pays, les Etats-Unis, dont nous sommes si proches et à qui nous devons la liberté, et donc notre solidarité ». Les Etats-Unis firent suscitèrent alors un mouvement de sympathie dans une grande partie du monde et George Bush bénéficiait du soutien total du peuple américain.
Qu’a-t-il fait de ce capital ? Dans une réponse symbolisé par la formule The War on terror, le 43e président des Etats-Unis a entraîné son pays dans une opération de police internationale basée sur le mensonge. Il a récolté la haine d’une grande partie du monde dont hérite aujourd’hui Barack Obama, malgré lui.
(1) J’ai utilisé ce titre dans un billet récent de manière tout à fait fortuite.
[youtube=http://www.youtube.com/watch?v=rV4d-BtkA1g&hl=fr&fs=1]
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Les Républicains ont beau jeu de critiquer ce que fait Obama aujourd’hui (Interview de 2 Congressmen – un républicain et un démocrate par la très nuancée Fox New)
[youtube=http://www.youtube.com/watch?v=uVSjOdRXyyE&hl=fr&fs=1]
Une autre présentation au Congrès[youtube=http://www.youtube.com/watch?v=ikCnEC1IIwk&hl=fr&fs=1]