Le système des élections du président des Etats-Unis est compliqué. Tous les quatre ans, il fait le délice des médias et des consultants qui déroulent leur expertise pour commenter l’élection. L’héritage historique et la dimension fédérale dans laquelle les petits Etats valent les grands sont souvent les raisons invoquées pour justifier le système et le résultat. Et pourtant, il va à l’encontre d’un principe qui constitue le fondement de la démocratie : un citoyen, une voix. Déjà la répartition des sénateurs pose un sérieux problème : quelle raison permet de justifier que la Californie avec ses 40 millions d’habitants en ait le même nombre que le Wyoming qui compte moins d’un million d’âmes.
Jusqu’à une date récente, les résultats des votes populaires et du collège électoral aboutissaient au même résultat malgré de sérieuses distorsions. Mais ils ne changeaient pas le résultat final. Et puis en 2000, l’élection de George W. Bush face à Al Gore malgré ses 500 000 voix d’avance a soulevé des questionnements sur le bien-fondé du système. D’autant qu’il a fallu attendre au moins un mois, l’intervention de la Cour Suprême de Floride et de la Cour Suprême des Etats-Unis pour élire le président.
En 2016, la faille du système a été encore plus béante : Donald Trump l’a emporté alors qu’il avait près de 3 millions de votes populaires que son opposante Hillary Clinton. Ce qui a d’emblée posé question sur sa légitimité d’autant que l’intervention des Russes favorables à Donald Trump est toujours dans son investigation. Ce qui n’a pas empêché Donald Trump d’affirmer urbi et orbi qu’il l’avait largement emporté et n’hésitant pas à mettre en doute l’organisation même des élections qui auraient autorisé selon lui des fraudes massives : au moins 3 millions comme par hasard.
La remise en cause de ce système électoral indirect a repris des couleurs mais pas pour très longtemps, sans doute la force de l’habitude. D’autant qu’amender la Constitution pour changer le système nécessite un véritable tour de force ; il faut les deux tiers du Congrès (du Sénat et de la Chambre des représentants) et le soutien de 38 états. 13 état peuvent donc bloquer le vote.
Et pourtant, il existe un moyen simple qui permettrait de faire coïncider en toutes circonstances les voix du collège électoral et les voix populaires. Ce moyen a été décrit par Robert Bennet, professeur de droit de l’Université de Northwestern à Chicago et a reçu l’appellation National Popular Vote Interstate Compact. Le principe est simple : au lieu d’attribuer leur voix à celui des candidats qui a gagné dans leur état selon la règle du Winner takes all, ils la donnent à celui qui a remporté le vote populaire au niveau national.
Les avantages de ce mode de scrutin sont qu’il ne remet pas en cause le collège électoral, élit toujours le candidat qui a le plus de voix populaire et ne nécessite pas d’amender la Constitution.
Et l’idée fait son chemin. A ce jour, dix Etats plus le District of Columbia représentant 165 grands électeurs ont rejoint le mouvement. Il suffirait donc de quelques états représentant 105 voix de grands électeurs pour atteindre le seuil fatidique de 270. Mais c’est là où le bât blesse. Jusqu’ici ce sont seulement des états fortement démocrates qui se sont déclarés. Aucun état républicain ou swing states n’est prêt à adhérer. Les premiers ont bien conscience que cela changerait le cours des choses en faveur des républicains comme cela est arrivé à deux reprises pour George W. Bush et Donald Trump, les seconds perdraient en influence. Les républicains ont perdu le vote populaire 6 fois sur les 7 dernières élections. Le combat n’est donc pas gagné, il n’est pas insurmontable.
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