Donald Trump a donc pris la décision de mettre fin à la disposition prise par Barack Obama en 2012 de permettre aux étrangers arrivés aux Etats-Unis alors qu’ils étaient enfants, de rester sur le sol américain, poursuivre des études et de travailler. Cette décision est purement politique et destinée à satisfaire ce que l’on appelle sa base, c’est-à-dire les électeurs qui ont voté pour lui et le soutiennent quoi qu’il arrive. D’autant qu’il y avait aucune urgence à signer ce décret même si le problème est réel et que le Congrès a été incapable de légiférer et de passer le Dream Act depuis 2001. Même si certains gouverneurs conservateurs emporté par avaient décidé qu’ils attaqueraient le gouvernement fédéral si rien n’était fait.
Tel Ponce Pilate, Donald Trump a pris la décision non pas de mettre fin à la disposition DACA (Deferred Action for Childhood Arrivals) tout de suite mais a annoncé une fin conditionnelle reportant la responsabilité sur le Congrès. Il a pris la décision d’y mettre fin dans les 6 mois si le Congrès n’arrivait pas à voter une loi permettant de remettre la situation de ces jeunes non encore Américains mais n’ayant, en majorité, jamais connu d’autres pays. Au total, ce sont 800 000 personnes dont la vie vient d’être totalement bousculée.
A la suite de cette annonce, deux sénateurs, le démocrate Dick Durbin et le républicain Lindsey Graham, pourtant pas d’accord sur cette question, ont fait une déclaration commune indiquant qu’ils mettraient tout en œuvre pour faire en sorte que le Congrès vote cette loi dans les six mois. Mais on peut avoir quelques doutes sur cette hypothèse puisque n’a pas réussi à le faire depuis plus de 16 ans. Et que, jusqu’ici, il a été incapable de voter une loi depuis les élections de novembre. La débâcle du Trumpcare est symptomatique de cet immobilisme. Et le calendrier à venir est plutôt chargé : le repeal et replace de l’Obamacare n’est pas totalement exclu, la réforme fiscale, le relèvement du plafond de la dette, les aides financières suite au cyclone Harvey, le financement de nouvelles infrastructures… Les Républicains qui soutiennent activement la décision de Donald Trump mettent en avant le fait que l’action exécutive prise par Barack Obama serait inconstitutionnelle. Une affirmation spécieuse contestée par nombre de juristes.
https://youtu.be/ncQyJfCjUo0
Si les démocrates se mobilisent et apportent 48 voix à une nouvelle législation pour clarifier cet imbroglio, ils devraient bien trouver 12 voix républicaines pour emporter la supermajorité nécessaire. Mais c’est loin d’être gagné.
Il est vrai que, parfois, lorsque le couperet d’un délai s’impose, les choses peuvent se délier. Sur cette question – comme beaucoup d’autres – Donald Trump a dit tout et son contraire. Défendre les intérêts des Américains et bouter les étrangers illégaux hors du territoire national ou empêcher leur entrée (construire un mur et le faire payer par le Mexique) et de l’autre faire des « déclarations d’amour » qui n’ont pas vraiment lieu d’être de la part d’un président et que les « dreamers » n’ont pas de raison de s’inquiéter. Au final, avec cette décision, ils pourront être boutés hors des frontières – oui mais lesquelles – le 5 mars prochain (certains pourront renouveler leur autorisation de territoire pour deux ans supplémentaires).
La démarche de Donald Trump est machiavélique et gagnante à tout coup pour lui. Il se met dans une posture favorable vis-à-vis de sa base en mettant fin à cette disposition tout en déportant la critique sur le Congrès s’il n’arrive à voter une nouvelle loi mettant fin à cette impasse juridique. Sur la forme, il n’a pas fait montre d’un grand courage politique puisqu’il a confié le soin à son ministre de la Justice, Jeff Sessions, de faire l’annonce de cette décision curieusement appelée Amnisty First. Ce que ce dernier a fait avec zèle et force car il est certainement plus extrême sur le sujet que son patron. Avec des arguments invoqués et non prouvés comme celui bien connu que 800 000 résidents DACA c’est 800 000 emplois en moins pour les Américains. Egalement d’affirmer que ces 800 000 personnes mettant les Etats-Unis en danger (risque de crime, violence et terrorisme) alors qu’ils ont fait l’objet d’une analyse et ont un casier judiciaire vierge. America First avait bien répété le candidat, puis le président Trump. Sauf que les Américains d’aujourd’hui sont en partie les DACA d’hier.
La raison invoquée de ce transfert de patate chaude à Jeff Sessions serait, aux dires de la porte-parole Sarah Sanders, parce qu’il s’agit là d’une décision juridique. Une affirmation spécieuse car il s’agit bien d’une manœuvre politique.
Barack Obama qui est jusqu’ici resté plutôt silencieux est sorti de sa réserve en déclarait qu’il s’agissait-là d’une décision qui n’est pas conforme à l’esprit américaine et défie le bon sens faisant référence au manque à gagner qui serait occasionné par le départ de ces 800 000 citoyens en quête d’une nouvelle patrie.