La situation actuelle au Parti républicain où celui qui est en tête des primaires n’a pas le soutien du Parti n’est pas sans précédent même si elle a été qualifiée par Peggy Noonan, éditorialiste du Wall Street Journal et ancienne plume de Ronald Reagan, de « Bigger » (The Republican Party Is Shattering) que ce qui s’est passé en 1964 quand Barry Goldwater réussit à remporter la nomination pour une terrible défaite face à Johnson et en 1976 lorsque Ronald Reagan disputait la légitimité du président en place Gérald Ford mais non élu.
En 1964, les Etats-Unis sont encore sous le choc de l’assassinat de John Kennedy. Les républicains sont profondément divisés entre conservateurs et modérés, une situation que n’est pas étrangère à ce qu’on connaît aujourd’hui à ceci près que le curseur s’est déplacé vers la droite, les modérés et les conservateurs d’aujourd’hui ne sont pas ceux d’hier. L’élection de 1960 entre John Kennedy et Richard Nixon a été une des plus serrés au niveau des votes populaires. Avec pour la première fois l’intrusion de la TV dans le jeu qui avait largement favorisé le jeune démocrate.
Barry Goldwater, sénateur de l’Arizona, était le champion des conservateurs qui comme aujourd’hui sont favorables à un Etat faible, à un bas niveau de taxation, à la défense des intérêts économiques et des entreprises et à la défense des individus et contre les programmes sociaux. De l’autre côté, Nelson Rockefeller, gouverneur de l’Etat de New York représentait la frange des modérés.
Mais les affaires personnelles de Nelson Rockefeller – un divorce et un remariage laissant quelque doute sur la chronologie des événements – a largement déplu aux conservateurs sur le plan social (on est dans les années 60). Dans les primaires du New Hampshire qui ouvre traditionnelle le ballet, Rockefeller et Goldwater mais se font tous les deux distancés par un surprenant Henri Cabot Lodge, colistier de Nixon en 1960 et ambassadeur des Etats-Unis au Vietnam. Ensuite, chacun des deux principaux protagonistes gagnent à leur tour différentes primaires. Plombé par ses affaires personnelles, Rockefeller s’effondre et laisse un boulevard à la Convention de 1964 de Daily City à Barry Goldwater. C’est là où il cité Cicéron : « I would remind you that extremism in the defense of liberty is no vice. And let me remind you also that moderation in the pursuit of justice is no virtue. »
Mais ce dernier ne réussit pas à obtenir le soutien des modérés en particulier en raison de son opposition radicale à la grande loi sur les droits civiques de Lyndon Johnson. Il fut littéralement balayé dans l’élection générale par Lyndon Johnson et réussit à remporter que son état, l’Arizona, et quelques états du Sud.
Mr. Conservative: Barry Goldwater at the 1964 Republican National Convention
Barry Goldwater: 1964 Republican National Convention
En 1976, les républicains sont encore sous l’effet de l’Impeachment suite à la lamentable affaire du Watergate. Gerald Ford devient président suite à la démission forcée de Nixon mais ne fait pas l’unanimité au sein de son parti. Il n’a a priori pas la légitimité qui n’a pas été élu juste arrivé au poste par défaut. C’est alors que Ronald Reagan entend représenter la frange conservatrice du parti et concurrence le président qui est, lui, un modéré. Les Primaires sont longues et aucun des deux candidats n’arrivent avec une majorité claire à la convention de Juillet à Kansas City. Les deux candidats s’efforcent alors de convaincre les délégués qui ne s’étaient pas encore décidés. Gerald Ford l’emporte au premier tour avec une très faible marge (1187 votes to 1070 votes). Il choisit Bob Dole comme colistier. Mais ils perdront de peu contre Jimmy Carter. Reagan tenta sa chance quatre plus tard et la saisi avec succès ouvrant la nouvelle ère de la déréglementation tous azimuts.