Si l’on avait oublié que les Etats-Unis mettaient avant toute chose le Droit comme moyen d’organiser la société, Stephen Breyer, l’un des neuf juges de la Cour Suprême des Etats-Unis, était là pour nous le rappeler.
On se sent flatté de voir ce grand francophile parler un français aussi impeccable sur les ondes françaises (7/9 de France Inter avec Patrick Cohen ou sur TV5 Monde) pour faire la promotion de son livre Cour La suprême, le droit américain et le monde que viennent de publier les éditions Odile Jacob. Etonnant d’entendre cet éminent juriste américain citer un passage de la Chartreuse de Parme décrivant la bataille de Waterloo qui faire dire à Fabrice Del Dongo « qu’il se passe quelque chose d’une grande importance mais je ne sais pas quoi » pour expliquer la situation que connaît le monde actuellement.
A la remarque de Patrick Cohen de savoir s’il acceptait d’être cité comme faisant partie du « quatuor progressiste de la Cour Suprême », (il a été nommé par Bill Clinton en 1994), il répond simplement qu’il s’agit là d’une qualification faire par la presse sur laquelle il n’a pas d’avis.
Stephen Breyer rappelle qu’il a exprimé son désaccord sur nombre de décisions prises par la Cour Suprême (en particulier l’épisode fâcheux quand la Cour a validé l’élection de Floride et permis ainsi à George W. Bush de devenir président des Etats-Unis – sans doute le pire qu’ait connu le pays) mais cela ne l’empêche pas de réaffirmer sa totale croyance dans le Droit en brandissant une vieille Constitution des Etats-Unis présentée comme « la pensée des Lumières de la France figée dans ce document » dont la force tient dans sa concision, laissant la possibilité de l’interprétation, et dans sa stabilité. Les Etats-Unis ont gardé la même constitution en 200 ans en y portant seulement 27 amendements, là où d’autres pays se permettent de la changer « comme de chemise ».
Répondant à une question d’un auditeur sur l’importance du mensonge aux Etats-Unis et la non poursuite de George W. Bush qui a lancé la fâcheuse guerre d’Irak sur la base d’un mensonge qui a causé tant de morts, a totalement déstabilisé la région et dont on perçoit les effets aujourd’hui, il répond tranquillement par un argument de droit selon lequel les membres de la Cour Suprême sont des juges de siège et non de Parquet et donc pas des procureurs.
Stephen Breyer n’a pas vraiment répondu sur l’ingérence (exorbitante ?) du droit américain dans le monde d’aujourd’hui, notamment avec les énormes amendes infligées à plusieurs entreprises, il ne répond pas vraiment.
Sur le fameux article 2 selon lequel nombre d’Américains – en particulier la NRA – entendent bien défendre leur droit de porter des armes, il considère que la loi actuelle n’empêche pas une « réglementation raisonnable ». Il faut être optimisme. On le sait, c’est là une qualité largement partagée par les Américains mais il y a peut-être urgence à faire quelque chose. Car sur ce point, rien n’a vraiment changé pendant le mandat de Barack Obama alors que les « mass shooting » continuent d’intervenir régulièrement.