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Deer Hunter

Voyage au bout de l’enfer. Le titre français du premier film américain traitant de la guerre du Viêt Nam avait profondément marqué les esprits. On se souvient de la fameuse scène de roulette, quasi insoutenable. À chaque fois que Nick appuie sur la gâchette, on retenait son souffle. Et ce qui devait arriver arriva. La balle qui était dans le barillet se trouva dans la mauvaise chambre.

Le pardon accordé par Joe Biden à son fils Hunter va peut-être être le voyage au bout de l’enfer que les républicains vont faire subir aux démocrates. Et même si on peut comprendre les craintes du président sur le futur de son fils, on comprend aisément que les républicains MAGA vont user et abuser de cette arme jusqu’à la fin des temps. L’échange (voir ci-dessous) entre Scott Jennings, commentateur républicain pro-Trump, and Karen Finney, commentatrice prodémocrate, sur la chaîne CNN est une bonne illustration

Hunter Biden est mis en examen pour plusieurs délits, fraudes fiscales (il a remboursé le fisc américain), acquisition illégale d’une arme, activités suspicieuses au sein de Burisma, une entreprise pétrolière ukrainienne. Le Congrès n’a pas été en reste avec une commission d’enquête dont, il faut bien avouer, n’a pas réussi à prouver un lien entre l’affaire Hunter et le président. L’objectif étant d’impliquer Joe Biden par l’intermédiaire de son fils Hunter. Cela rappelle l’acharnement que les républicains avaient développé à l’encontre d’Hillary Clinton après la sombre affaire de Benghazi. Les ennuis de Hunter Biden ont donc été rayés d’un trait de plume. Joe Biden a ratissé large puisqu’il a non seulement désigné les affaires en cours, mais toute la période couvrant 2014 à aujourd’hui. Un peu comme si pour soigner une petite blessure au doigt on aspergeait la main et le bras d’antiseptique.

Cette action est totalement légale et prévue par la Constitution. Ses prédécesseurs ne se sont d’ailleurs pas gênés pour faire usage de ce droit. Certains pour des raisons politiques, d’autres des raisons plus personnelles. Après le scandale du Watergate, Gerald Ford accorda son pardon à Rickad Nixon parce qu’il pensait nécessaire de tourner la page et de garantir l’unité du pays. George H.W. Bush fit de même pour Caspar Weinberger et d’autres membres de son administration après l’affaire Iran-Contra. Bill Clinton accorda son pardon à son demi-frère Roger Clinton Jr, qui a avait été condamné pour trafic de drogue.

Jusqu’ici Joe Biden avait utilisé ce pouvoir de manière extrêmement discrétionnaire. Il a accordé ce droit à seulement 26 personnes et obtenu la commutation de 132 peines de prison. Alors qu’il avait à nombreuses reprises qu’il n’accorderait pas le pardon à son fils, il a finalement changé d’avoir utilisant comme motif à la fois un acharnement de l’institution judiciaire contre son fils et une mesure de précaution face à un gouvernement à venir dont le président semble enclin à utiliser l’appareil d’état pour se venger de ses opposants politiques.

Légalement, la décision de Joe Biden est fondée et prévue dans l’Article II, Section 2, Clause 1 de la Constitution.

The President (…) shall have Power to grant Reprieves and Pardons for Offences against the United States, except in Cases of Impeachment.

Moralement, c’est difficilement défendable dans la mesure où c’est un détournement évident du droit de pardon. On peut comprendre que le père souhaite éviter le pire à son fils, mais pas en utilisant une arme qui n’est pas fait pour ça.

Enfin, politiquement c’est une catastrophe, car c’est la porte ouverte aux critiques des républicains qui n’ont pas attendu pour faire entendre leur voix et y voir là une excuse pour faire bien pire. Même s’ils n’en ont pas réellement besoin. Lors de son premier terme, Donald Trump ne s’est pas gêné en accordant sa grâce notamment à Steve Bannon, Michael Flynn, Paul Manafort et Roger Stone dont les méfaits sont d’une tout autre nature que les délits de Hunter Biden. Il faut aussi citer Charles Kuhsner, le père de Jared qui, après avoir plaidé coupable, a été condamné pour évasion fiscale et purgée deux ans de prison, qui vient d’être nommé ambassadeur des États-Unis en France. Un président condamné et un ambassadeur des États-Unis en France condamné, ça fait beaucoup.

Et dès que Joe Biden a publié son tweet, Donald Trump a publié le message : “Does the pardon given by Joe to Hunter include the J-6 Hostages, who have now been imprisoned for years? Such an abuse and miscarriage of Justice”

Message repris en chœur par tous les affidés de Donald Trump qui y voient là un excellent prétexte aux forfaitures à venir.

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