« A quoi sert la puissance militaire américaine ? » s’interrogeait à haute voix Thierry de Montbrial, directeur de l’IFRI, lors de la présentation de l’édition 2011 du Ramses sous-titré « un monde post américain ». Parfois poser la question, c’est déjà donner la réponse. De fait, le budget militaire américain représente 48 % des dépenses mondiales ou près de « 5 fois les budgets chinois et russe réunis » (Dépenses militaires : la continuité dans la continuité). Et sur ce point, Barack Obama ne semble pas remettre en cause cette spécificité américaine. D’ailleurs, s’il le faisait, les Républicains et une bonne partie des indépendants et sans doute le complexe militaro-industriel n’hésiteraient à le qualifier de colombe, voire de « traitre » à sa patrie. D’autant que la puissance militaire est peut-être pour les Américains de manière inconsciente un des derniers domaines où le leadership des États-Unis est total.
De fait, à quoi sert cette puissance si l’on observe les enlisements successifs au Vietnam, en Afghanistan, en Irak… Dans ces différentes situations, cette supériorité n’a pas servi à grand-chose. Souvenons qu’à sa plus grande intensité, l’armée américaine avait envoyé 550 000 militaires sur le terrain largement mieux doté que son adversaire. Et pourtant, dit de manière abrupte, mais réelle, cela n’a pas empêché aux États-Unis de perdre la guerre.
Le point le plus important est que cette puissance est totalement inadaptée aux nouveaux problèmes du monde où le terrorisme et la guerre économique provoquent les secousses du monde plus que les guerres classiques.
Dans une toute récente publication intitulée Budgetary Saving from Military Restraint, le think tank Cato Institute propose l’idée de réduire les dépenses militaires d’un niveau permettant de faire de substantielle économie sans mettre aucunement en péril la sécurité des États-Unis. « Les États-Unis n’ont pas un budget de défense » considère les auteurs de ce document et puisque l’on ne donne pas vraiment d’objectifs aux militaires, tout devient possible et justifiable. Le graphique de l’évolution du budget militaire depuis l’après guerre est tout à fait parlant. Les deux dernières poussées ont eu lieu sous l’ère Reagan et George W. Bush. Le premier avait lancé ce que l’on avait appelé alors la guerre des Étoiles baptisée au « Initiative de défense stratégique » en 1983 qui a été un des facteurs d’effondrement de l’URSS quelques années plus tard. Le second a décidé de lancer la guerre à l’axe du mal conduisant à une augmentation significative au-delà des 650 milliards de dollars, le niveau le plus élevé en dollars constant depuis 60 ans.
Benjamin Friedman et Christopher Preble propose une réduction de 1 200 milliards de dollars sur 10 ans, ce qui n’est pas rien et précise ces réductions poste par poste. Il y a toutefois peu de chances qu’une telle initiative soit prise par Barack Obama qui n’a jamais vraiment parlé sur ce sujet. Ce serait pourtant une des voies possibles pour réduire le déficit budgétaire, une question qui vient au 4e rang des préoccupations des Américains, selon l’institut Gallup, derrière l’économie, l’emploi et l’insatisfaction envers le gouvernement.