Les États-Unis ont, de très loin, le premier budget militaire du monde. Ce n’est pas nouveau. Et l’arrivée de Barack Obama ne devrait pas y changer grand-chose. En 2009, les dépenses militaires se sont établies à 663 milliards de dollars, en augmentation de 4,3 % par rapport à 2008. Il s’agit là d’ailleurs d’un budget décidé par son prédécesseur George W. Bush. Le premier budget préparé par Barack Obama est celui de 2010 et s’établit à 719 milliards de dollars et ne montre aucun infléchissement notoire sur la politique de défense américaine. Le contraire aurait été surprenant.
Les Etats-Unis représentent 43 % des dépenses militaires mondiales, soit plus que le montant cumulé des 10 nations suivantes. En 2009, l’ensemble des nations ont dépensé 1531 milliards de dollars, marquant une augmentation significative de 5,9 %. Cela pourrait surprendre, voire choquer, lorsqu’on replace cette augmentation dans le contexte de crise économique actuel. Entre réduction des dépenses pour diminuer les déficits et politique de relance pour dynamiser l’activité, les Etats-Unis semble avoir retenu la seconde option. Ce qui n’est pas très efficace note le rapport de l’institut Sipri car l’activité de production d’armes est hautement capitalistique et ne participe qu’assez faiblement à la création d’emplois.
Le terme d’hyperpuissance s’applique particulièrement bien aux États-Unis dans le domaine militaire. La Chine qui se place au deuxième rang des nations « n’a dépensé que » 99 milliards de dollars, près de 7 fois moins que les États-Unis. ET pourtant les observateurs américains expriment une réelle inquiétude sur la volonté de puissance de la Chine se traduisant par certains programmes d’armements ambitieux, notamment dans le domaine maritime (Chinese Military Seeks to Extend Its Naval Power). De ce fait, la volonté de la Chine de développer ses capacités militaires ne font aucun doute et accompagne sa position de puissance économique : de 2000 à 2009, les Chinois ont multiplié leurs dépenses militaires par 3, aucun autre pays n’a consenti un tel effort.
Si l’on a pu observer un changement très net dans le ton adopté par Barack Obama, les objectifs fondamentaux de défense des intérêts américains n’ont pas varié. « Despite fundamental diffrences between President Obama and President George W. Bush, the principal influences on U.S. foreign policymaking remain largely unaltered » (1). En termes de dépenses, certains programmes ont été abandonnés comme le F22 Stealth alors que d’autres vont être renforcés comme les drones (Unmanned aerial Vehicles ou UAV), les outils de cyberguerre, le F35 Joint Strike Fighter.
Le rapport du Sipri parle de rééquilibrage, mais pas de changements stratégiques. Et à 739 milliards de dollars, le budget 2011 qui est réellement le premier de l’administration Obama s’inscrit dans une hausse de 3%.
Pourquoi dans le contexte de crise et alors qu’ils ont une telle avance par rapport aux autres nations, les États-Unis continuent-ils à augmenter leur budget militaire ? Les auteurs du rapport prennent l’image du super tanker dont le changement de route prend beaucoup de temps. Par ailleurs, les membres du Congrès ont du mal à arrêter certains programmes, notamment parce qu’ils signifient des réductions d’emplois dans leur propre État. Le développement de l’avion de transport C-17 que Barack Obama voulait arrêter à la fin 2010 a été relancé par le Congrès.
La stratégie militaire américaine s’énonce simplement : s’assurer d’une domination sans appel dans tous les domaines. Mais, sur le terrain, elle ne semble pas permettre pas de régler les problèmes. En Irak, Les États-Unis ont facilement et rapidement gagné la guerre, mais pour quoi faire ? De même en Afghanistan, sa puissance écrasante n’est apparemment pas la bonne réponse au problème posé. Et, à elles seules, en plus d’être des catastrophes humaines, ces deux guerres sont des gouffres financiers : 750 milliards de dollars pour la première et 300 pour la seconde. Pour un résultat plus que discutable.
(1) Recalibrating American Stragegy
The Center for a New American Security (CNAS)
Juin 2010