Go West, young man ! Peut-être mais plus vraiment en Californie. L’injonction est attribuée à Horace Greeley[i] dans un éditorial de 1865 qui encourageait la Conquête de l’Ouest. Etat le plus peuplé des Etats-Unis, la Californie est en train de se dépeupler et de perdre de nombreux sièges de grandes entreprises. Depuis 2020, le Golden State a perdu 600 000 habitants qui sont allés vers des cieux plus cléments où le coût de la vie est moins élevé. Et par rapport aux projections faites en 2010 (comme quoi, il faut toujours se méfier des projections), la population marque un déficit de 1,2 million d’habitants. Alors que la projection de 2000 pour la décennie suivante était correcte à 100 000 habitants près. La croissance de la population ayant été légèrement plus élevée que prévu. Il s’est donc passé quelque chose qui a enrayé la dynamique qui marque la Californie depuis longtemps. Toutefois la dynamique qu’avait connue depuis le début du 20e siècle s’était sérieusement ralentie à partir des années 1980. La Californie est devenue l’État le plus peuplé des États-Unis en 1962, dépassant ainsi l’État de New York.
Le cinéma et l’audiovisuel à Los Angeles, et les technologies numériques dans la Silicon Valley, entre San Francisco et San Jose, ont été traditionnellement les deux pôles de développement de l’état qui était traditionnellement un état agricole (et qui le reste). La situation du côté des entreprises n’est pas meilleure. Depuis 2016, 11 entreprises des Fortune 1000 ont déplacé leur siège social dans un autre état notamment Tesla, Oracle, McKesson, Kaiser Aluminium, Charles Schwab et Hewlett-Packard Entreprise (résultat de la scission d’HP en deux entreprises, d’un côté HP Inc et de l’autre HPE). En élargissant le spectre, entre 2018 et 2021, 352 entreprises ont quitté la Californie. Les destinations les plus prisées sont le Texas (132), le Tennessee (31), le Nevada (25), la Floride (24) et l’Arizona (21). La législature 2023-24 présente un déficit de 24 milliards de dollars. La cause principale devant être attribuée à la baisse des revenus, la plus forte depuis la Grande Recession.
La Californie a le coût de la vie la plus élevée de tout le pays avec un prix médian d’un logement à 780 000 dollars contre 395 000 dans l’Oregon voisin, 452 000 pour l’état de Washington ou 203 000 pour l’Ohio. Résultat, pas plus de 10 % des habitants qui loue un logement actuellement ont les moyens d’en acheter un et sont donc obligés à rester locataire. Parallèlement, le nombre des sans abris (homeless people) a explosé représentant 30 % de la population SDF du pays.
Au-delà du coût de la vie, une des causes de cet Exodus serait, selon le Think Tank Hoover Institution, situé sur le campus de l’université de Stanford et proche du parti républicain lié à des mesures « reducing economic freedom, increasing government freedom et destroying jobs ». Et de citer des lois qui augmenteraient les règlementations en tous genres : Assembly Bill 1287, Senate Bill 357, Senate Bill 923, Assembly Bill 1279, Assembly Bill 2799… L’une des plus importantes dans cette tendance serait l’Assembly Bill 257 qui s’immisce dans le secteur de la restauration rapide. Un diagnostic dans lequel les positions politiques sont très présentes.
L’immigration a joué un rôle important dans l’évolution de la population. En 1950, la population immigrée en Californie représentait environ 5 % de la population totale de l’État. Au fil des décennies, cette proportion a augmenté de façon spectaculaire, atteignant environ 27 % en 1990 et près de 27,6 % en 2020, selon les données de l’US Census Bureau.
Dans les années 1960 et 1970, une grande partie de l’immigration en Californie provenait de pays d’Amérique latine, principalement du Mexique. Dans les années 1980 et 1990, l’immigration en provenance d’Asie a également augmenté de manière significative, en particulier de la Chine, des Philippines, de l’Inde et du Vietnam.
Quoi qu’il en soit, le résultat est là, la Californie se dépeuple. Est-ce une tendance ponctuelle ou une évolution de fond ? Les deux ou trois années à venir nous donnerons des indications plus précises.
[i] Horace Greeley a été éditeur New-York Tribune, l’un des journaux les plus influents des années 1840-1870. Il a aussi été l’un des fondateurs du Parti républicain dont le premier président a été Abraham Lincoln.