Un rapport de près de 300 pages à la suite d’une enquête menée par Guidepost Solutions, un cabinet indépendant (The Southern Baptist Convention Executive Committee’s Response to Sexual Abuse Allegations and an Audit of the Procedures and Actions of the Credentials Committee), a révélé que les dirigeants de Convention baptiste du Sud avaient caché des allégations d’abus sexuels pendant plus de 20 ans. Le rapport indique qu’ils ont ignoré les accusations ou attaqué les survivants d’abus sexuels pour protéger l’église de toute responsabilité légale, affublant les survivants d’épithètes peu amènes : « opportunistic » ayant a « hidden agenda of lawsuits » ou agissant comme des « professional victims ».
La Convention baptiste du Sud (Southern Baptist Convention) est une dénomination chrétienne évangélique fondée en 1845 et basée à Nashville. Elle a été fondée à Augusta, en Géorgie, après la séparation d’avec la Triennial Convention (devenue American Baptist Churches USA) par des baptistes favorables à l’esclavage et en désaccord avec l’abolitionnisme des baptistes du Nord des États-Unis. Après la guerre de Sécession, la plupart des églises baptistes afro-américaines du Sud se sont rassemblées dans la National Baptist Convention fondée en 1895.
La Convention baptiste du Sud perd de son caractère régional à partir des années 1940 et commence à intégrer des membres issus de diverses minorités dans les dernières années du XXe siècle. Bien qu’elle reste le plus densément implantée dans le Sud des États-Unis, elle s’implante également dans le reste du pays et passe des accords avec une quarantaine de conventions locales. Elle réunit quelques 47 000 églises qui restent autonomes pour une congrégation de 14 millions de fidèles. Depuis les années 1980, les Baptistes du Sud apportent un soutien massif au parti républicain.
Des abus sexuels dans la congrégation sont révélés au public, en février 2019, par le Houston Chronicle et le San Antonio Express-News. Selon ces enquêtes environ 380 membres du clergé, des dirigeants laïcs et des bénévoles de la Convention baptiste du Sud sont accusés d’agressions sexuelles et 700 victimes
Selon Heather Cox Richardson, professeur d’histoire au Boston College, l’histoire moderne de la Southern Baptist Convention commence en 1967, lorsque Paige Patterson, une étudiante au séminaire, et Paul Pressler, un juge du Texas, se rencontrent à la Nouvelle-Orléans pour discuter de l’orientation de la plus grande dénomination protestante des États-Unis avec la volonté de la débarrasser de ses membres libéraux, purger ceux qui croyaient au droit à l’avortement, aux droits des femmes et aux droits des homosexuels (source : Letters from an American).
Entre 2003 et 2018, l’église a perdu environ un million de membres. Paul Pressler et Paige Patterson ont été accusés d’inconduite sexuelle et, en 2018, ils ont dû démissionner de leurs fonctions de direction.
La réunion annuelle de la Southern Baptist Convention en 2021 était la plus importante depuis 1995. Les membres ont rejeté un dirigeant d’extrême droite et ont choisi comme président Ed Litton, pasteur principal de Redemption Church à Saraland (Alabama), qui depuis au moins 2014 s’était concentré sur la réconciliation raciale. Les membres ont également appelé à une enquête sur les scandales sexuels. La SBC a fait appel au cabinet Guidepost Solutions en septembre pour mener une enquête.
Son rapport est si accablant que la première réaction de Russell Moore, l’ex-président de la commission Ethics & Religious Liberty de la SBC, a déclaré : « J’ai eu tort d’appeler les abus sexuels dans la Convention baptiste du Sud… une crise. La crise est un trop petit mot. C’est une apocalypse. L’enquête découvre une réalité bien plus diabolique et systématique que je ne l’imaginais. Combien d’enfants ont été violés, combien de personnes ont été agressées, combien de cris ont été réduits au silence (…) C’est plus qu’une crise, c’est même plus qu’un crime. C’est un blasphème ».
– Former une commission indépendante et établir ultérieurement une entité administrative permanente pour superviser les réformes globales à long terme concernant les abus sexuels et les fautes connexes au sein du SBC.
– Créer et maintenir un système d’information sur les délinquants pour alerter la communauté des délinquants connus.
– Fournir une boîte à outils de ressources complète comprenant des protocoles, une formation, une éducation et des informations pratiques.
– Restreindre l’utilisation d’accords de non-divulgation et de règlements civils qui lient les victimes à la confidentialité dans les affaires d’abus sexuels, sauf demande de la victime.
La prochaine réunion de la SBC qui se tient en juin prochain à Anaheim, dans la banlieue de Los Angeles, risque d’être assez explosive.