On connaissait Back In USSR des Beatles.
I’m back in the U.S.S.R.
You don’t know how lucky you are boy
Back in the U.S.S.R. (Yeah)
Been away so long I hardly knew the place
On découvre le nouveau titre de Joe Biden : Back in America. Si un Américain avait quitté son pays en 2016, le reconnaîtrait-il en 2021 ?
Pour son premier voyage à l’international, Joe Biden vient en Europe où il participera à plusieurs conférences – OTAN[1], G7[2] – et ponctuera son voyage par une rencontre avec Vladimir Poutine. Et le 6 juin (77 ans après le débarquement des alliés sur les plages de Normandie), il a publié une tribune dans le Washington Post intitulée « My trip to Europe is about America rallying the world’s democracies ». Deux éléments, l’Europe et la démocratie qui, symboliquement marque un tournant dans la politique étrangère des Etats-Unis. Rappelons que Donald Trump avait choisi de se rendre en Arabie Saoudite pour son premier voyage en dehors des Etats-Unis. Et avait fait miroiter des contrats pharamineux se chiffrant en plusieurs dizaines de milliards de dollars. « On choisit pas ses parents, on choisit pas sa famille », chantait Maxime Le Forestier (« Né quelque part ») mais on choisit ses amis. Et s’il ne faut pas trop attacher d’importance aux symboles, ils comptent néanmoins.
Le voyage de Joe Biden commencera au Royaume-Uni, le pays sorti de l’Union européenne et l’ami historique qui tient à sa relation très particulière avec le grand frère, pour se terminer par une très délicate et difficile réunion avec Poutine. Mais la séquence n’est pas laissée au hasard dans la mesure où Joe Biden rencontrera l’autocrate russe fort des ses rencontres avec les chefs d’état du G7, le président de la Commission européenne et les alliés de l’OTAN.
Ce voyage marquera la fin de crise sanitaire liée à la Covid même si la pandémie est loin d’être terminée. Mais le retour à la normale est visible des deux côtés de l’Atlantique. Avec l’Europe, ce sera un retour à une relation normalisée tournant la page Trump et son message selon lequel mes amis ne sont plus mes amis. Mais il s’agit pas seulement de renouer un contact qui avait été singulièrement malmené mais aussi de faire passer le message que l’épisode Trump n’était qu’une parenthèse (aberration ?) dans la vie politique américaine.
Est-ce si sûr ? Les garde-fous de la démocratie ont tenu bons malgré les tentatives répétées pour les faire tomber (sur ce point, on en apprend un peu plus chaque jour, non seulement sur l’épisode du 6 janvier mais aussi sur les autres initiatives pour tordre le résultat des élections). Mais qu’en sera-t-il en 2024 lorsque toutes les lois pour rendre plus difficile le droit de votes des minorités auront été votées et mises en place par les républicains pour confisquer le pouvoir. Si l’on reprend les élections de 2020, certes Joe Biden a gagné avec plus de voix populaires mais l’avantage qu’il a eu dans certains états et qui lui a permis de gagner l’élection était encore plus faible que celui d’Hillary Clinton.
D’ailleurs, comme le montre l’édition 2021 de son enquête Transatlantic Trends réalisée par le German Marshall Fund auprès des pays européens, il n’y a pas d’effet Biden comme on il y avait eu un effet Obama, une véritable Obamania pourrait-on dire, assez exagéré d’ailleurs. Il est vrai que l’élection d’un président noir dans un pays dont on connait le passé avait suscité un enthousiasme considérable et qu’en plus, la personnalité du 44e président des Etats-Unis s’y prêtait assez bien.
Joe Biden revient à une position plus traditionnelle : « This trip is about realizing America’s renewed commitment to our allies and partners, and demonstrating the capacity of democracies to both meet the challenges and deter the threats of this new age ». Et il va essayer d’embarquer ces allies sur les grands sujets du moment, la Covid et le climat (les deux préoccupations majeures du moment selon l’enquête) mais aussi la Chine. « Whether it is ending the covid-19 pandemic everywhere, meeting the demands of an accelerating climate crisis, or confronting the harmful activities of the governments of China and Russia, the United States must lead the world from a position of strength ». Républicains comme démocrates sont désormais d’accord sur le fait que la Chine représente le véritable défi du 21e siècle. Témoin la loi qui vient d’être voter par les deux camps sur un financement de la recherche publique dans des domaines comme l’Intelligence artificielle ou l’informatique quantique d’un montant de 250 milliards de dollars. Evidemment, l’Europe qui vient de signer un accord avec la Chine devra trouver le bon positionnement dans ce nouveau contexte.
Si les Etats-Unis et l’Europe sont des alliés naturels, les sujets qui fâchent ne manquent pas. Le magazine américain Politico en a recensé une dizaine :
– La guerre des droits de douane ;
– Les brevets des vaccins ;
– Le transfert des données numériques ;
– Les relations commerciales avec la Chine ;
– Le coût des médicaments ;
– La taxation des big techs ;
– L’IA ;
– La taxe carbone ;
– L’agriculture verte ;Le pipe-line Nord Stream 2.
Bref, la remise des pendules à l’heure avec Biden était nécessaire. Maintenant les choses sérieuses recommencent. Mais finalement, l’Europe ne va-t-elle pas regretté Donald Trump qui l’avait un peu réveillé tant il avait remis de choses en question. Avec un allié plus stable et fiable, ne va-t-elle pas reprendre ses vieux démons.
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Directrice du bureau de Paris du German Marshall Fund, Alexandra de Hoop Scheffer revient sur la nécessité de renforcer le dialogue transatlantique, de restaurer une confiance mutuelle, tout en faisant résonner davantage les idées de la France, qui semble en perte d’influence, sur les questions stratégiques et diplomatiques.
[1] Membres de l’OTAN : Belgique (1949), Canada (1949), Danemark (1949), États-Unis (1949), France (1949), Islande (1949), Italie (1949), Luxembourg (1949), Norvège (1949), Pays-Bas (1949), Portugal (1949), Royaume-Uni (1949)
Grèce (1952), Turquie (1952), Allemagne (1955), Espagne (1982), Hongrie (1999), Pologne (1999), République Tchèque (1999), Bulgarie (2004), Estonie (2004), Lettonie (2004), Lituanie (2004), Roumanie (2004), Slovaquie (2004), Slovénie (2004), Albanie (2009), Croatie (2009), Monténégro (2017), Macédoine du Nord (2020).
La sécurité au quotidien est essentielle à notre bien-être. L’objectif de l’OTAN est de garantir la liberté et la sécurité de ses membres par des moyens politiques et militaires.
POLITIQUE – L’OTAN s’emploie à promouvoir les valeurs démocratiques et permet à ses membres de se consulter et de coopérer sur les questions de défense et de sécurité afin de résoudre les problèmes, d’instaurer la confiance et, à long terme, de prévenir les conflits.
MILITAIRE – L’OTAN est attachée à la résolution pacifique des différends. Si les efforts diplomatiques échouent, elle dispose de la puissance militaire nécessaire pour entreprendre des opérations de gestion de crise. Celles-ci sont menées en application de la clause de défense collective du traité fondateur article 5 du Traité de Washington ou sous mandat de l’Organisation des Nations Unies, par l’OTAN seule ou en coopération avec des pays non membres ou d’autres organisations internationales.
[2] Le Groupe des sept (G7) est un groupe de discussion et de partenariat économique de sept pays réputés en 1975 pour être les plus grandes puissances avancées du monde qui détiennent environ les 2/3 de la richesse nette mondiale puis 45 % en 2019 : Allemagne, Canada, États-Unis, France, Italie, Japon et Royaume-Uni. Le groupe rassemble 7 des 10 pays avec le plus important PIB du monde, avec l’absence de la Chine qui occupe le 2e rang.