Après les tragiques événements de Minneapolis qui ont mis en émoi l’Amérique entière, à l’exception peut-être de son président, un message s’est répandu comme une traînée de poudre à travers tous les Etats : « defund the police ».
Pris dans son acception littérale, il s’agit d’arrêter le financement de la police et donc de la supprimer, ce qui pourrait donc se traduire simplement par un démantèlement, une suppression des forces de police. Une option pour le moins radicale. Mais ce slogan couvre en fait tout une très large éventail de réalités : de la plus radicale correspondant à la suppression de la police à des réductions budgétaires, notamment en raison des difficultés que vont rencontrer les municipalités américaines en raison de la crise de la Covid-19, en passant par une dissolution de la police telle qu’elle est pour en rebâtir une nouvelle ou donner une nouveau cadre réglementaire à la police en redéfinissant ses missions.
Sans oublier la démilitarisation de la police qui s’est opérée depuis des années. Depuis 1990, la police a récupéré pour quelque 5 milliards d’équipements provenant de l’armée dont des véhicules blindés et autres matériels conçus plus pour la guerre que pour la défense du citoyen. Ces différentes actions incluent également la possibilité de « surveiller la police », police the police. En juillet dernier, la police de Philadelphie a congédié 13 agents de police qui avaient posté des messages violents et racistes sur les réseaux sociaux. Mais seulement après que des groupes aient porté ces messages à la connaissance du public. Et aussi, une plus grande neutralité de la justice sur des affaires impliquant des policiers qui bénéficient souvent d’une totale impunité. Sans oublier de forcer la police a tenir des statistiques fiables et exhaustives. En 2014, Barack Obama avait signé la loi Death in Custody Act obligeant la police à reporter tous les décès de personnes interpellées et en garde à vue. Quatre ans plus tard, l’inspecteur général du ministère de la Justice a convenu qu’il n’y avait pas de procédures mises en place pour la collecte des données.
Bref, on le voit, il y a là un spectre très large.
A ces différentes options, un groupe totalement opposé à une quelconque réforme de la police, a lancé le slogan « defend the police ».
Defund the police : une bonne idée de business
Quant au ticket Trump-Pence, il a transformé cette opportunité en business. Pour un T-Shirt Defend the Police (et non Defund), porté évidemment par une africaine-américaine, il ne vous en coûtera que 30 dollars pour une taille small et 32,50 dollars pour 2XL (là ce sont les gros qui payent plus contrairement aux impôts). Etonnant la réaction de Donald Trump avec initiative, là où il a fallu des mois pour fabriquer de simples masques. Si l’option T-Shirt, ne vous convient pas, vous pouvez acheter une casquette Cops for Trump (également porté par un Africain-américain) ou alors Official Keep America Great 45th President pour 35 dollars. E si votre budget est plus limité ou vous êtes prêts à soutenir le président mais pas à n’importe quel prix, vous achetez 2 Bumper-sticker Defend the police pour 5 dollars. Et si tout cela ne vous intéresse pas beaucoup, rassurez-vous, la boutique en ligne Trump-Pence propose beaucoup d’autres produits. Par exemple, un T-Shirt, Make Space Great Again -Donald Trump se présente aussi aux élections de l’empire sidéral ou #YouAintBlack, principalement pour les minorités noires ou encore une petite pancarte Moms for Trump porté évidemment par une Africaine-américaine.
Ces interrogations qui traversent la société américaine et ont déclenché des mouvements dans les 50 états qui se perpétuent sans faiblir depuis 18 jours font suite au meurtre de George Floyd, le 25 mai dernier, par Derek Chauvin, un policier blanc de Minneapolis. L’échange entre l’un des policiers et les services de secours du 911 montrent assez clairement le biais racial :
Operator: What’s he look like, what race?
(…)
Operator: Okay. Is he white, black, Native, Hispanic, Asian?
Caller: Something like that.
Operator: Which one? White, black, Native, Hispanic, Asian?
Caller: No, he’s a black guy.
Quand au rapport effectué par les policiers sur les événements n’a qu’un rapport très lointain avec les faits et est en totale contradiction avec ce que révèle sans ambiguïté. la vidéo.
Le mouvement est donc parti de Minneapolis pour s’étendre ensuite à tout le pays. Ce qui se passe à Minneapolis servira peut-être d’exemple pour les autres municipalités dans ce mouvement vers la réforme de la police.
Le 7 juin, une scène pour le moins surprenante est intervenue. La manifestation organisée par le groupe Black Visions devait se terminer devant le logement de Jacob Frey, le maire de Minneapolis. Avec un certain courage, Jacob Frey est venu, seul, à la rencontre des manifestants et déclaré : « I have been coming to grips with my own responsibility, my own failure in this. » C’est alors qu’il est interpellé directement pour savoir s’il est favorable à la mesure de « defund the police » dans le sens dissoudre l’institution pour en reconstruire une autre avec des attributions différentes. Il répond simplement : « I do not support the full abolition of the Police Department. » La réaction des manifestants ne se fait pas attendre. « Go home Jacob, go home » accompagné d’un « shame » répété à l’envi. Une scène assez troublante, même si, d’après ce que l’on peut voir sur la vidéo et d’après le Star Tribune, le journal local, aucune menace de violence n’a été rapportée.
Voir la vidéo postée sur la page Facebook de Black Visions
S’adressant à la foule peu après, la députée Ilhan Omar s’est alors totalement démarquée en se déclarant favorable au démantèlement de la police : « The Minneapolis Police Department is rotten to the root and so when we dismantle it, we get rid of that cancer and we allow for something beautiful to rise. »
Le lendemain, neuf des treize membres du conseil municipal – qui ont donc une majorité suffisante pour outrepasser le veto du maire – ont tiré le même constat qu’Ilhan Omar à savoir que la police ne peut plus être réformé et ont donc pris l’engagement, devant une foule de plusieurs centaines de personnes, de démanteler la police. Mais les choses ne sont pas aussi simples. La ville de Minneapolis possède une charte lui imposant de financer a minima des forces de police. Pour amender cette charte, il faut l’unanimité du conseil municipal ou aller devant les électeurs.
Mais tout n’est pas impossible. En 2012, la ville de Camden dans le New Jersey a démantelé ses forces de police et renvoyé tous ses agents de police. Pour reformer ensuite une nouvelle entité et réembaucher des anciens policiers à qui elle a défini de nouvelles attributions et de nouvelles règles plus strictes sur l’utilisation de la force. Avec un résultat qui semblerait probant.
De son côté, la Chambre des représentants a saisi l’occasion pour voter une loi visant à mieux réglementer la police et l’usage de la force. Mais est-il même besoin d’en parler puisque le Sénat et non chef de la majorité républicain Mitch McConnell ne daignera même pas l’examiner.
Minneapolis police on Thursday released the transcript of the 911 call that led to the death of George Floyd. Below is the transcript in its entirety.
KSTP’s Full Coverage
May 25, 2020; 20:01:14
Operator: 911 what’s the address of the emergency?
Caller: This is ah 3759 Chicago AV.
Operator: How can I help you?
Caller: Um someone comes our store and give us fake bills and we realize it before he left the store, and we ran back outside, they was sitting on their car. We tell them to give us their phone, put their (inaudible) thing back and everything and he was also drunk and everything and return to give us our cigarettes back and so he can, so he can go home but he doesn’t want to do that, and he’s sitting on his car cause he is awfully drunk and he’s not in control of himself.
Operator: Okay, what type of vehicle does he have?
Caller: And… um he’s got a vehicle that is ah…ah he got a vehicle that is ah one second let me see if I can see the license. The driver license is BRJ026.
Operator: Okay, what color is it?
Caller: It’s a blue color. It’s a blue van.
Operator: Blue van?
Caller: Yes, van.
Operator: Alright blue van, gotcha. Is it out front or is it on 38th ST?
Caller: Ah it’s on 38th ST.
Operator: On 38th ST. So, this guy gave a counterfeit bill, has your cigarettes, and he’s under the influence of something?
Caller: Something like that, yes. He is not acting right.
Operator: What’s he look like, what race?
Caller: Um, he’s a tall guy. He’s like tall and bald, about like 6…6 1/2, and she’s not acting right so and she started to go, drive the car.
Operator: Okay so, female or a male?
Caller: Um…
Operator: Is it a girl or a boy?
Caller: (Talking to somebody else)—he’s asking (inaudible) one second. Hello?
Operator: Is it a girl or a boy that did this?
Caller: It is a man.
Operator: Okay. Is he white, black, Native, Hispanic, Asian?
Caller: Something like that.
Operator: Which one? White, black, Native, Hispanic, Asian?
Caller: No, he’s a black guy.
Operator: Alright (sigh).
Caller: How is your day going?
Operator: Not too bad.
Caller: Had a long day, huh?
Operator: What’s your name?
Caller: My name is REDACTED
Operator: Alright, a phone number for you?
Caller: REDACTED
Operator: Alright, I’ve got help on the way. If that vehicle or that person leaves before we get there, just give us a call back, otherwise we’ll have squads out there shortly, okay?
Caller: No problem.
Operator: Thank you.
Une lettre ouverte de 14 policiers de Minneapolis
Minneapolis Police Officers:
350 S. 5th St.
Minneapolis, MN 55415
Dear Everyone – but especially Minneapolis citizens,
An Open Letter to express what the vast majority of Minneapolis Police Officers feel at this moment.
We wholeheartedly condemn Derek Chauvin. We Are With You in the denouncement of Derek Chauvin’s actions on Memorial Day, 2020. Like us, Derek Chauvin took an oath to hold the sanctity of life most precious. Derek Chauvin failed as a human and stripped George Floyd of his dignity and life. This is not who we are.We Are With You and want to communicate a sentiment that is broad within our ranks. We ask that our voices be heard. We are leaders, formal and informal, and from all ranks within the Minneapolis Police Department. We’re not the union or the administration. We are officers who represent the voices of hundreds of other Minneapolis Police Officers. Hundreds. We acknowledge that Chief Arradondo needs each of us to dutifully follow him while he shows us the way. We stand ready to listen and embrace the calls for change, reform and rebuilding.
We Are With You moving forward. We want to work with you and for you to regain your trust.