« America will never become a socialist country. America was founded on liberty and independance, and not governement coercion, domination and control. We are born free (not porn free ! : NDLR), and we will stay free. » C’est ainsi que s’exprimait Donald Trump dans son troisième discours sur l’Etat de l’Union dans une salve contre les velléités de Bernie Sanders d’incarner un quelconque mouvement de protestation sociale. Une démarche assez contradictoire à plusieurs tweets dans lesquels il accuse le parti démocrate de truquer le jeu en défaveur de Bernie Sanders. Il est vrai qu’en 2016, la direction du parti a joué contre Bernie Sanders en faveur d’Hillary Clinton. Donald Trump veut donc brûler la bougie par les deux bouts : critiquer le socialisme, pousser la candidature de Bernie Sanders avec l’idée qu’il sera un adversaire facile dans la phase finale de l’élection. Pour lutter contre celle de Joe Biden, il n’avait pas hésité à faire appel du chantage sur une puissance étrangère.
De son côté, Bernie Sanders poursuit son chemin et ne se démonte pas même s’il a ajouté démocrate comme pour adoucir le mot socialiste. « What is democratic socialism? questionne-t-il ? « C’est créer un gouvernement, une économie et une société qui fonctionnent pour tous et pas seulement pour les 1% les plus riches ». Un programme auquel beaucoup peuvent adhérer même si les conservateurs pensent qu’un tel programme n’est pas compatible avec la liberté et que de toute façon la richesse des plus fortunés va « ruisseler » vers les classes laborieuses. Bernie Sanders avait fait une déclaration expliquant que la situation actuelle était bien celle du socialisme, mais pour les riches. En expliquant par exemple que 83 % des bénéfices
Certes le socialisme ne s’est jamais imposé aux États-Unis, mais il a bel et bien existé. Avec des institutions et des candidats. Il y a eu le Socialist Labor Party of America, le plus vieux d’entre eux, créé en 1876 juste après la Reconstruction et la première vague d’industrialisation et d’urbanisation des Etats-Unis. Puis le Social Democracy of America (créé en 1897), le Social Democratic Party of America (1898) et le Socialist Party of America (1901). Ces créations s’appuyaient sur un mouvement progressiste assez vigoureux et partagé. Mais ce mouvement a plusieurs tendances ségrégationniste, moralisatrice, réformiste sociales…
« Les progressistes combattent les maux de la société industrielle, mais également ce qu’ils considèrent comme des vices. Les trois cibles, liées entre elles, sont : l’alcoolisme, la prostitution et le divorce » (Histoire des Etats-Unis, de 1492 à nos jours, Bertrand Van Ruybeke, Tallandier). Mais le socialisme n’est pas soutenu par tous, loin de là. Pour le pasteur Josiah Strong, il figure dans les sept maux de la société américaine aux côtés de l’immigration, du catholicisme, du mormonisme, de la richesse excessive et de l’urbanisation. Parmi les figures qui incarne ce progressisme, il y a eu Robert La Follette, implanté dans le Wisconsin et et dont les idées ont rayonné dans le Midwest, le président démocrate Woodrow Wilson, Theodore Roosevelt qui après avoir été président sous l’étiquette républicain s’est présenté sans succès en 1912 sous le label Progressive Party qu’il avait lui-même créé.
Le parti socialiste américain n’a jamais dépassé les 100 000 membres, rappelle Bertrand Van Ruybeke, mais il a suscité un vaste mouvement dans la société américaine avec 73 maires et près de 1200 élus dans 340 villes en 1911. Et les critiques formulées contre le socialisme ne sont pas celles outrancières des conservateurs actuels qu’il associé aux forces du mal. Woodrow Wilson déclarait en 1912 : « L’important vote socialiste dans ce pays n’est pas un vote pour un programme ; c’est une protestation, un vote de protestation contre l’amère désillusion que le pays a vécue vis-à-vis des deux partis ». Plusieurs écrivains de renom apportèrent leur contribution par l’intermédiaire de leurs œuvres ou directement dans le débat parmi lesquels on peut citer : Upton Sinclair (La Jungle), Jack London (Le Peuple d’en bas), Theodore Dreisder, Frank Norris. (Histoire populaire des Etats-Unis, Howard Zinn, Mémoires sociales).
Le premier candidat progressiste aux élections présidentielles, en dehors des deux partis traditionnels, est Alson Streeter au nom de l’Union Labor en 1888. Chaque élection qui a suivi jusqu’en 1976 a eu la présence d’un candidat socialiste ou assimilé, dont la présence pouvait être marginale ou partielle. L’élection la plus significative est celle de 1912 avec la présence du socialiste Eugene Debs (devenu socialiste en prison pendant la grève Pullman) et d’Arthur Reimer pour le Socialist Labor. Eugene Debs – qui se présentait pour la 5e fois – rassembla 900 000 voix soit 6 % de l’électorat populaire, mais aucun grand électeur. Il réussit son meilleur score dans l’état du Nevada avec 16 % des voix. Jamais un candidat socialiste n’a fait mieux dans l’histoire du pays. L’appeal to Reason dans lequel il intervenait régulièrement comptait quelque 500 000 abonnés.
Leur influence diminua avec l’arrivée au pouvoir de Franklin Roosevelt et son New Deal dont l’objectif n’était pas de changer le capitalisme, mais de corriger ses effets négatifs. Le dernier candidat présenté par le parti fut Darlington Hoopes qui ne recueilli que 6 000 voix. Il fut dissous en 1973 et se transforma dans trois structures : l’actuel Parti socialiste des États-Unis, les Sociaux-démocrates, USA et les Socialistes démocrates d’Amérique.