Bernie Sanders se présente comme socialiste. Après les trois premières étapes des primaires, il est désormais présenté comme le favori de ces primaires démocrates. Ne nous emballons pas, les trois premières étapes de ce long chemin ne représentent qu’une petite fraction du nombre de délégués nécessaires, la primaire de Caroline du Sud va apporter sans doute un sérieux correctif et puis le Super Tuesday, en distribuant quelque 40 % des délégués permettra d’y voir plus clair.
Si le fait de se présenter comme socialiste parait incongru à des nombreux Américains aujourd’hui qui surjouent le qualificatif en faisant immédiatement la comparaison avec les régimes les plus totalitaires et les purges qui vont avec, il n’en fut pas toujours ainsi. Dans les années 1900-1930, de nombreuses villes ont élu des maires qui s’étaient présentés sous cette étiquette. Parmi, celles-ci, Milwaukee dans le Wisconsin n’en a pas élu un, ni deux, mais bien trois. Elle pourrait ainsi être qualifiée de capitale du socialisme américain.
Emil Seidel, fut le premier maire de la ville socialiste de la ville avec un mandat relativement bref de deux ans de 1910 à 1912 et le premier maire d’une grande ville américaine. Il faut également candidat vice-président aux élections de 1912 dans un « ticket » avec Eugene Debs qui réunit 6 % du vote populaire. D’origine allemande, sa famille avait émigré aux États-Unis en 1867 et ses parents étaient de conditions modestes : son père était charpentier et sa mère, mère au foyer. Il vécut pendant six ans à Berlin dans sa jeunesse et c’est à cette période qu’il a adopté ses convictions politiques. Son mandat fut court, mais actif avec plusieurs créations d’agences municipales. Aux Élections municipales de 1912, les républicains et les démocrates s’associèrent pour ne présenter qu’un seul candidat contre lui. C’est ainsi que Gerhard Bading, chirurgien de son état, fut élu. Il était donc dégagé de tout mandat pour se présenter aux élections présidentielles de la même année en tant que vice-président.
Après l’intermède Bading, c’est à nouveau un socialiste qui fut élu maire. Mais cette fois pour beaucoup plus longtemps puisque Daniel Hoan régna sur la ville jusqu’en 1940. Il fut d’abord élu city attorney en 1910 la même année qu’Emil Zeider, mandat qu’il exerça pendant six ans avant d’être élu maire. Il eu le temps d’engager de nombreuses réalisations, notamment en matière de service public : éclairage, voirie, système d’égout, traitement de l’eau. Il mit en place le premier système de trolleybus des États-Unis qui fut interrompu en raison d’accidents. Il fut battu en 1940 et rejoint les rangs du parti démocrate au nom duquel il se présenta sans succès aux élections de gouverneur en 1944 et 1946.
Douze and plus tard, c’est encore un socialiste, Frank Zeidler, qui fut élu maire pour trois mandats successifs, jusqu’en 1960. Depuis cette année-là, plus aucun socialiste ne fut élu maire d’une grande ville aux États-Unis. Autre particularité, son frère, Carl Zeidler, avait été élu maire sous l’étiquette démocrate en 1940, mais il donna sa démission en 1942 pour aller combattre pendant la Seconde Guerre mondiale où il fut tué.
Pendant les trois mandats de Frank Zeidler, la ville connut un fort développement industriel et aussi géographique en absorbant des parties de villes voisines. Mais cette croissance fut concomitante avec l’exode urbaine des classes moyennes blanches vers les banlieues permise notamment par le développement des infrastructures routières. C’est ainsi que l’équilibre en population blanche et noire évolua largement au profit de cette dernière. Frank Zeidler était favorable au mouvement des droits civiques des années 60, une position qui fut exploitée par ses adversaires politiques.
Depuis cette période, tous les maires de Milwaukee ont été élus sous l’étiquette démocrate.