Lundi prochain 3 février se tiendront les caucus de l’Iowa. Et le 11 février suivra la primaire du New Hampshire. Ces deux scrutins ouvrent traditionnellement le bal des primaires qui conduiront aux conventions des deux partis, du 13 au 16 juillet à Milwaukee dans le Wisconsin pour les démocrates et du 24 au 27 août pour les républicains. Cette année, les feux de l’actualité sont braqués sur les démocrates qui ont plusieurs prétendants pour être le candidat qui affrontera Donald Trump le 3 novembre prochain. Si ce dernier est encore en poste. L’Impeachment paraît on ne plus improbable, mais on n’est jamais à l’abri d’une surprise. Les révélations de John Bolton sur l’affaire ukrainienne pour forcer le Sénat à le convoquer comme témoin et puis de fil en aiguille…
Cette tradition de l’Iowa et du New Hampshire comme rendez-vous des primaires n’est pas si ancienne et remonte aux années 1970 plus par un hasard que par une décision politique nationale mûrement réfléchie. Si on peut déjà se poser la question de la pertinence des primaires, on doit se poser celle du bien fondé de commencer avec ces deux Etats qui ne sont absolument pas représentatifs des Etats-Unis. Un peu comme si on organisait un sondage avec un échantillon composé uniquement d’homme de plus de 50 ans pour déterminer établir les chances respectives des différents postulants.
L’Iowa est un petit état rural du Midwest jouxtant l’Illinois et le Wisconsin. Il ne comprend que 3 millions d’habitants. L’Iowa faisait partie de la Louisiane et est donc tombé dans l’escarcelle des Etats-Unis lors de la vente de ce territoire par Napoléon aux Américains. Signe de cette origine française, son drapeau reprend les trois couleurs de notre drapeau avec une large pour le blanc sur lequel est inscrit la devise de l’Etat : « Our liberties we prize and our rights we will maintain » (nous chérissons nos libertés et nous maintiendrons nos droits). De son côté, le New Hampshire est un petit état de la Nouvelle-Angleterre de 1,5 million d’habitants qui a été l’un des Etats des treize colonies. Il fut le premier Etat à avoir sa propre Constitution.
Mais ce ne sont pas là les considérations les plus importantes relatives à l’importance – totalement disproportionnées – prises par ces deux Etats dans le processus des primaires. Tour à tour ou simultanément, candidats démocrates ou républicains dépensent une énergie considérable sur ces quelques arpents de terre pour bien se positionner sur la suite des élections primaires. Et en quoi est-ce justifié ? En rien ou pas grand-chose. Selon les défenseurs de cette situation anachronique, explique que les bons citoyens prennent tout le soin nécessaire pour choisir leur candidat et que de nombreux habitants de ces deux Etats sont des bons citoyens qui prennent leur devoir très au sérieux.
Une étude réalisée en 2007 par deux chercheurs du NBER (National Bureau of Economic Research) intitulée Momentum and social learning in presidential primaries montrer que l’électeur type de l’Iowa ou du New Hamsphire à vingt fois plus d’influence qu’un homologue qui intervient dans les dernières primaires. Une distorsion qui s’ajoute à celle de la représentation de ces deux Etats disproportionnée. Chacun des deux a droit à deux sénateurs comme des Etats beaucoup plus peuplée comme la Californie ou l’Etat de New York. De telle sorte qu’un sénateur de l’Iowa ou du New Hampshire représente 1,5 million et 750 000 habitants alors son collège californien ou new-yorkais en représente respectivement 20 et 10 millions.
Sur le plan démographique, fait remarquer David Leonhardt dans une tribune du New York Times que ces deux Etats ressemblent aux Etats-Unis des années 1870. Leur population est à 87 % composée de Blancs non-hispaniques. Les deux Etats ont une proportion très élevée de retraités et peu élevée de jeunes actifs. Autre problème, ce sont deux Etats à très grande majorité rurale. Le New Hampshire par exemple ne possède aucune ville de plus de 250 000 habitants.
La couverture médiatique que leur confère l’ouverture des primaires permet de mettre en avant des sujets plus locaux que nationaux.
Bien sûr, autant l’Iowa que le New Hampshire n’est prêt d’abandonner cette position stratégique en tout début du cycle des primaires.
Ces primaires de l’Iowa et du New Hampshire qui peuvent donc être considérées comme une curiosité électorale s’ajoute au mécanisme des primaires, lui aussi très discutable. Car lors de ces scrutins, ce sont les citoyens les plus impliqués politiquement qui y prennent part (parfois dans des proportions très faibles) et qui ne reflètent pas nécessairement l’opinion générale. Il est donc assez peu probable d’un quelconque changement dans ce processus électoral qui fait le délice des journalistes et des commentateurs.