Après avoir tactiquement retenu les actes d’accusation, Nancy Pelosi les a finalement transmis au Sénat qui va pouvoir commencer le procès. Mais on sait depuis longtemps déjà que ce procès que ne sera qu’une formalité d’acquittement du président mis en accusation. Et pourtant tous les sénateurs ont prêté serment qu’ils s’acquitteraient de leurs fonctions de jurés avec tout le soin nécessaire. Mais Mitch McConnell, le chef de la majorité du Sénat, et Lindsey Graham, le président de la commission des affaires judiciaires ont dit depuis longtemps qu’ils acquitteraient le président… Quels que soient les éléments de preuve.
Et pourtant, les preuves se sont accumulées et ont continué à abonder le dossier depuis que la Chambre des représentants a voté l’acte d’accusation. Une interview de Lev Parnas, un associé de Rudy Giulani, l’avocat du président qui a joué le rôle de ministre des affaires étrangères bis pour certains dossiers, l’Ukraine par exemple, condamné en octobre et qui vient de rendre de nombreux documents (SMS, mails, photos…) qui confirment un peu plus l’acte d’accusation et impliquent des hautes personnalités tels le vice-président et le ministre de la Justice. De son côté, le Government Accountability Office (GAO), une agence bipartisane, a annoncé jeudi 16 janvier que « le gouvernement Trump a violé la loi en suspendant l’aide à la sécurité en Ukraine ». Mais les républicains, totalement sous l’emprise de Donald Trump, ne sont pas intéressés à en savoir plus au motif que ce travail d’investigation aurait dû être fait par la Chambre des représentants. Pas plus que de ne faire comparaître des témoins, comme John Bolton, l’ancien conseiller de Donald Trump, qui ont des choses à dire et ont déclaré qu’ils étaient à la disposition du Sénat. Mais comme on ne fait pas boire un âne qui n’a pas soif, on ne pousse pas des sénateurs qui se sont déjà fait une opinion à être ouverts à de nouvelles informations.
Dans ces conditions, quelles peuvent les objectifs d’une telle procédure. D’abord, dans le cadre de la séparation des pouvoirs, que le Législatif rappelle à l’Exécutif qu’il n’est pas au-dessus des lois et qu’il ne peut pas faire ce que bon lui semble. Ce que Donald Trump a déclaré à plusieurs reprises. C’est un donc un avertissement pour ce président mais aussi pour ceux qui lui succéderont, qu’il soit démocrate ou républicain.
Et puis, on aura beau dire, on aura beau faire, Donald Trump restera le troisième président de l’histoire à avoir subi une mise en accusation par la Chambre des représentants. Et le rituel auquel on a assisté cette semaine au sénat où le président de la Cour Suprême prête serment, où les sénateurs prêtent serment, montre qu’il ne s’agit pas d’une simple formalité mais bien d’un événement historique dont Donald Trump ne pourra se départir. Il a crié à la farce, à la chasse aux sorcières, à l’acharnement, au sectarisme, au coup d’État… Il a même expliqué que les démocrates essayaient de saboter la campagne de Bernie Sanders comme ils l’avaient fait en 2016. Non pas parce qu’il apprécie Bernie Sanders mais parce qu’il pense qu’il serait un adversaire plus facile à battre. C’est cohérent avec ses initiatives pour l’image de ternir Joe Biden.
Finalement, est-ce si surprenant que Donald Trump soit passé par la case Impeachment ? Il a passé sa vie devant les tribunaux, soir en tant qu’accusé soit en tant qu’accusateur. Comme le rappelle David Cay Johnson dans son livre The Making of Donald Trump, le 45e président des Etats-Unis a pris « l’habitude d’engager des procès dans le seul motif d’harceler ou d’intimider ceux qui osait se mettre sur son chemin ». Ici, il ne s’agit ni de harceler ni d’intimider mais tout simplement de juger quelqu’un qui s’est au-dessus des lois.
Il restera le troisième président des Etats-Unis à être marqué de cette tache indélébile.
Andrew Johnson, premier président à être jugé par le sénat. Il sera acquitté.
Bill Clinton, deuxième président a être jugé par le Sénat. Il sera acquitté.
Donald Trump, troisième président à être jugé par le Sénat. Sauf imprévu, Il sera acquitté.