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Retour sur l’année 2019

Décembre

Le prix des médicaments
Les Etats-Unis dépensent beaucoup plus que les autres nations pour leur santé, pour des résultats mitigés. De nombreux facteurs sont en cause dont le prix des médicaments beaucoup plus élevé qu’ailleurs. Les laboratoires tentent d’expliquer que ces prix élevés financent la R&D qui coûte de plus en plus cher. En fait la raison est plus simple et a à voir avec leur position oligopolistique et leur capacité à faire un lobbying efficace auprès du Congrès. La Chambre des représentants – à majorité démocrate – vient de voter une loi permettant, imposant au gouvernement de négocier les prix pour les programmes comme Medicare ou Medicaid. Du bon sens. Seulement deux républicains ont voté la loi. Mais cette loi va se fracasser devant le Sénat, à majorité républicaine. Les républicains crient à la médecine socialiste. Comprenne qui pourra. Quant à Donald Trump, qui avait fait de ce sujet une promesse de campagne, il reste coi. Sans doute, est-il trop occupé à tweeter à propos de son propre impeachment.

Honneur aux vétérans
La course aux primaires démocrates a fait une nouvelle victime, Kamala Harris, qui semblait pourtant avoir les qualités requises pour aller plus loin. Et contrairement à une épreuve sportive où tous les participants se doivent de finir la course ou, a fortiori, le match, il est raisonnable dans ce type de compétition de jeter l’éponge au bon moment. Comme le fait remarquer Margaret Talev dans un article d’Axios, le trio de tête est constitué d’aînés, de ceux qui appartiennent à la classe d’âge qualifiée de Silent Generation : Joe Biden 77 ans, Elizabeth Warren 70 et Bernie Sanders 78 ans. Apparemment, ils ont quelque chose à dire et n’ont pas envie de rester muets. Alors que les départs récents concernent plutôt des candidats de la Generation X dont plusieurs étaient des représentants des minorités. L’exception dans ce club de vétérans, est le très calme et modéré – dans la forme plus que sur le fond – Pete Buttigieg, 37 ans, dont Donald Trump avait moqué le nom et n’hésiterait pas à aller plus loin si cela était nécessaire. Ce candidat ne sort pas de nulle part, après des études à Harvard et à Oxford, il a travaillé au cabinet McKinsey avant d’être déployé en Afghanistan en 2013 dans l’United States Navy Reserve dont il est aujourd’hui lieutenant. Il a été le premier élu de la ville South Bend (Indiana) connue notamment grâce à l’Université catholique Notre Dame créée en 1842. Il était alors le plus jeune maire des villes de plus de 100 000 habitants.
Ils sont pour l’instant six qualifiés pour le débat du 19 décembre.

La politique du PSPS
« Pour la sureté du public, il peut être nécessaire de couper tout ou partie du réseau électrique quand des vents violents et des conditions de sécheresse interviennent simultanément, associés à un risque d’incendies ». C’est ce que la compagnie d’électricité californienne PG&E (Pacific Gas & Electric Company) explique sur son site Web sous l’appellation “Public Safety Power Shutoff” ou PSPS pour justifier les coupures récentes. En 2019, PG&E, qui est une compagnie privée, s’est placée sous la protection du chapitre 11 de la loi américaine sur les faillites du fait de dédommagements aux victimes évalués à 30 milliards de dollars à la suite des incendies géants de 2018 et 2019 en Californie. On peut y voir deux raisons : le changement climatique et la mauvaise maintenance du réseau. Si rien n’est fait, les tarifs résidentiels pourraient doubler dans les 8 ans selon l’Université de Berkeley.

Novembre

En route vers l’Impeachment !
Pas moins de 12 témoins ont été auditionnés par la Commission du renseignement de la Chambre des représentants. Devant des faits établis, les républicains ont joué la même partition : rien, rien de rien, qui ne puisse donner matière à Impeachment. Avec en prime des attaques détestables et infectes mettant en cause le patriotisme de certains de ces témoins en raison de leur origine : Marie Yovanovitch, Fiona Hill, Alexander Vindman. Selon toute vraisemblance, la Chambre des représentants va voter la procédure d’Impeachment et le Sénat acquitter le président. Cet épisode aura-t-il des conséquences sur les premières élections de l’histoire des Etats-Unis mettant en lice un président ayant été impliqué dans une telle procédure ? Pas sûr !

Matière à destitution ?
Les républicains de la Chambre des représentants se préparaient à mettre en pièce l’ex ambassadrice des Etats-Unis en Ukraine Marie Yovanovitch et … patatras le président diffuse un argumentum ad personam sous la forme d’un tweet totalement inutile (voir ci-dessous). Ils sont alors obligés de faire marche arrière et de la remercier pour services rendus à la nation. Mais ils maintiennent leur principal argument : elle n’était directement impliquée – tout comme les deux premiers témoins de la semaine – dans aucun volet de cette affaire. Et voilà que David Holmes, fonctionnaire de l’ambassade des Etats-Unis à Kiev témoigne qu’il a entendu le président demander à Gordon Sondland, ambassadeur des Etats-Unis auprès de l’Union européenne et en charge de l’Ukraine si Volodymyr Zelensky a bien initié une enquête contre Joe Biden, à l’époque principal opposant dans l’élection de 2020. La seule qui semble l’intéresser. Un président qui demande à son homologue d’une puissance étrangère de lui donner des informations sur un opposant politique : est-ce une faute suffisante pour engager une procédure d’impeachment ?

Une semaine décisive
Après plusieurs semaines d’audition à huis clos, la commission du renseignement de la Chambre des représentants va recevoir trois témoins majeurs de l’affaire ukrainienne : William Taylor, chargé d’affaires à l’ambassade des États-Unis en Ukraine, et George Kent, responsable du département d’État chargé de l’Ukraine, mercredi ; Marie Yovanovitch, l’ex-ambassadrice des États-Unis en Ukraine, vendredi. Ils rediront ce qu’ils ont déjà dit devant les Représentants démocrates et républicains et dont la transcription a été publiée. Mais ils le feront publiquement, devant tous les Américains qui voudront bien les écouter et les entendre. Ces dépositions auront-elles le même effet que celle de John Dean, le conseiller de la Maison-Blanche au cœur du Watergate que Donald Trump a récemment qualifié de « rat » et qui a largement contribué à la démission de Nixon ? Nancy Pelosi, la Speaker de la Chambre, a laissé entendre que la Chambre pourrait voter sur l’impeachment avant la fin de l’année. « 2019 will be the worst year of Donald Trump’s life » avait écrit l’historien Jon Wiener dans une tribune publiée début janvier. Cette semaine nous permettra peut-être de le savoir.

Impeach or not impeach, that is the question ?
« Some people say that he’s guilty (that he’s guilty)
Some people say I don’t know (I don’t know)
Some people say, give him a chance (give him a chance)
Aw, some people say, wait till he’s convicted (till he’s convicted) »
D’abord, « this was a perfect call » ; puis peut-être il l’a fait ; ensuite, il l’a fait, mais ce n’est pas illégal ; Enfin, il l’a fait, mais il n’y a pas matière à destitution.
Après une enquête Mueller longue, compliquée à comprendre et à suivre, le quid pro quo ukrainien est beaucoup plus simple : un président qui conditionne une aide militaire à un pays étranger à des informations sur un opposant politique. Les faits s’accumulent. La Chambre des représentants a voté pour rendre publiques les auditions des témoins et faire connaître aux citoyens américains ce qui s’est passé. Quand elle votera la mise en accusation, elle transmettra le dossier au Sénat qui devra ouvrir le procès. Pour engager la destitution, il faudra le vote de 20 sénateurs républicains. Tout dépendra alors de l’opinion. Si 60 % des Américains y sont favorables, c’est possible. Au-delà, c’est probable. Nous en sommes à 50 %.

Octobre

Mr. Zuckerberg Goes To Washington
Auditionné à nouveau sur le projet de lancer sa cryptomonnaie Libra, Mark Zuckerberg n’a pu échapper aux questions sur le rôle de Facebook dans les élections de 2016 et surtout dans celles de 2020. Il a fait preuve d’une naïveté confondante cachant peut-être un cynisme à toute épreuve. La représentante de l’état de New York Alexandria Ocasio-Cortez, qui s’est déjà révélée comme une excellente interrogatrice lui demandait explicitement ce que comptait faire Facebook sur des publicités politiques payantes diffusant de fausses informations sur des communautés ciblées : « Well Congresswoman, I think lying is bad and I think if you were to run an ad that had a lie, that would be bad. That’s different from it being – from it – in our position the right thing to do to prevent your constituents or people in an election from seeing that you have lied. »
En clair, peu importe le contenu pourvu qu’on ait l’argent.

Quel avenir pour le parti républicain ?
Le parti républicain a deux problèmes : la démographie et Donald Trump. Sur le premier, il ne peut pas grand-chose à part rendre le vote plus difficile pour certaines catégories et faire du gerrymandering. Sur le second, il s’est d’abord opposé frontalement pour ensuite s’allier et se soumettre en espérant trouver un bon deal : laisser le président à ses lubies et à ses extravagances et pousser leur agenda : baisse des impôts, nommer des juges conservateurs, déréguler l’économie… Mais jusqu’où ne faudra-t-il pas aller trop loin ? L’affaire ukrainienne et l’affaire turque commencent à faire timidement bouger les lignes. John Kasich est encore bien isolé ?

Impeachment : l’emballement
Depuis les révélations du lanceur d’alertes sur l’échange téléphonique entre Donald Trump et Volodymyr Zelensky qui a conduit les démocrates à lancer une enquête en vue d’une possible destitution. Un deuxième lanceur d’alertes confirme les dires du premier, Rudy Giuliani, l’avocat personnel du président, actif depuis de longs mois sur la collecte d’informations négatives sur Joe Biden, est sous investigation, deux de ses associés ont été arrêtés, le limogeage sans motif de l’ambassadrice en Ukraine… Chaque jour apporte son lot d’informations nouvelles. De telle sorte que, selon le site FiveThirtyEight qui calcule depuis le 1er août la moyenne des pro et des anti impeachment, 49,8 % y sont favorables contre 44 % défavorables.

Coup dur pour Joe Biden et Bernie Sanders
La semaine a été rude pour Joe Biden et Bernie Sanders. Même si ce qui arrive est injustifié et injuste, Joe Biden est dans une tourmente dont il aura sans doute du mal à se remettre. « Trump won’t destroy me, and he won’t destroy my family » écrit l’ex-président dans un éditorial du Washington Post. Personnellement peut-être pas, politiquement, ce n’est pas impossible. Bernie Sanders a, de son côté, été frappé par une crise cardiaque, certes prise à temps mais qui va sans doute influer la suite de sa campagne. Et s’il n’y a pas de limite d’âge pour faire campagne mais le nombre des années va peser lourd. Elisabeth Warren, qui s’est confirmée comme une excellente débatteuse lors des deux premiers débats, va pouvoir s’imposer comme la principale concurrente de Donald Trump.

Septembre

Bis repetita ?
En 2016, l’équipe de campagne de Donald Trump avait accepté de recevoir des informations sur Hillary Clinton censées favoriser l’élection de leur patron. Dans le bureau ovale, une fois élu, le 45e président avait même été jusqu’à déclarer à George Stephanopoulos qu’il n’y a pas de mal de recevoir d’une puissance étrangère des informations sur un adversaire politique. Dans son rapport, Bob Mueller n’a pas conclu à la conspiration, mais ne s’est pas positionné sur le terme de collusion, qui n’a pas de sens juridique.
Le 12 août dernier, un employé de la communauté du renseignement a communiqué à l’inspecteur général, Michael Atkinson, une information sensible liée à un échange téléphonique entre Donald Trump et un officiel Ukrainien, vraisemblablement le président Volodymyr Zelensky. Lors de la conversation, Donald Trump aurait proposé un marché à son homologue ukrainien : enquêter sur Hunter Biden, fils de son possible opposant, Joe Biden, qui a travaillé pour le groupe énergétique ukrainien Burisma Holding, en échange d’avantages dont on ne connaît pas précisément la nature.
L’actuel DNI (Director of National Intelligence, l’entité qui chapeaute les 17 agences de renseignements) par intérim, Joseph Maguire, a refusé de transmettre le dossier au Congrès comme la loi l’y obligeait. Après avoir refusé de témoigner devant le Congrès, il a finalement accepté et doit être auditionné cette semaine.

Le monde à l’envers
Normalement, les gouvernements imposent des réglementations dans tous les domaines qui brident les citoyens ou les entreprises. Avec l’administration Trump, c’est le contraire pour tout ce qui concerne l’environnement. Outre s’être retiré de l’accord de Paris, Donald Trump a supprimé selon le New York Times 84 réglementations environnementales (84 Environmental Rules Being Rolled Back Under Trump). En juillet, quatre constructeurs automobiles – Ford Motor Company, Volkswagen of America, Honda et BMW – se mis d’accord sur des niveaux d’émission plus stricts pour la Californie que celles imposées par la Maison Blanche (Justice Dept. Investigates California Emissions Pact That Embarrassed Trump). En réaction, le Ministère de la Justice a lancé une enquête visant à savoir si ces entreprises avaient violé les lois antitrust. Un comble.

Août

Une primaire républicaine ?
« We’ve got a guy in the white house who’s unfit, completely unfit, to be president. And it stuns me that nobody stepped up, nobody in the Republican Party stepped up, because everybody believes in the Republican party, everybody believes that he’s unfit. (…) The country is sick of this guy’s tantrum. He’s a child. Again, the litany, he lies every time he opens his mouth ».
Qui parle : un opposant démocrate, un commentateur politique libéral ? Non c’est le très conservateur Joe Walsh (R-Ill.), ex membre de la Chambre des représentants qui entend défier Donald Trump en appelant pour une primaire républicaine. Il n’est pas le premier et sans doute pas le dernier mais la probabilité qu’il réussisse est faible étant donné le soutien infaillible du parti républicain. Il vaut peut-être mieux perdre les élections avec Donald Trump comme pour solder les comptes qu’avec un autre candidat.

Situation sur le front de l’emploi
Le nombre d’emplois créés aux Etats-Unis pendant le mois de juillet a atteint 164 000, ce qui laisse inchangé le taux de chômage inchangé à 3,7 %, le taux le plus bas depuis 50 ans. Par catégorie raciale, le taux de chômage est de 2,8% chez les Asiatiques, de 3,3% chez les Blancs, 4,5% chez les Hispaniques et 6% chez les Noirs. L’hôte de la Maison Blanche s’énorgueillit du fait que la situation de l’emploi a bénéficié à toutes les catégories. En vue de la campagne de 2020, il met en avant cet argument, espérant s’attirer quelques voix de la communauté noire. Mais imagine-t-on une seconde que la situation ait pu profiter à toutes les populations sauf aux Noirs. Ces derniers ne répondent d’ailleurs pas à ces grossières sollicitations puisqu’à plus de 80 %, ils choisissent un candidat démocrate.

Juillet

Patience et longueur de temps…
On se souvient de la déclaration malheureuse et inappropriée d’Hillary Clinton devant un parterre de donateurs : « You know, to just be grossly generalistic, you could put half of Trump’s supporters into what I call the basket of deplorables. Right?” Clinton said. “The racist, sexist, homophobic, xenophobic, Islamaphobic—you name it. And unfortunately there are people like that. And he has lifted them up ». La candidate est revenue sur sa déclaration mais le mal était fait. Cette semaine, Donad Trump s’en est pris à Elijah Cummings, président de la United States House Committee on Oversight and Reform qui a auditionné Robert Mueller cette semaine en tweetant que sa circonscription « is a disgusting, rat and rodent infested mess ». « Better to have a few rats than to be one » a répliqué le Baltimore Sun, l’un des plus vieux journaux du pays.

En attendant Mueller !
Mercredi prochain, 24 juillet, les Américains seront suspendus à leur télévision pour écouter ce que le procureur spécial Robert Mueller a à dire devant deux des commissions de la Chambre des représentants. Ce ne sera pas la première fois qu’il sera auditionné – la 88e depuis 1990 si l’on en croit le New York Times – mais sans doute la plus importante. Si les démocrates croient avoir un allié avec eux ils se trompent. D’abord, Robert Mueller est républicain mais surtout et plus que toute sa carrière montre qu’il se veut au-dessous des partis et loin des querelles partisanes. Il est donc probable qu’il s’en tiendra à ce qu’il a écrit dans son rapport. Mais l’exercice devrait très utile puisque les Américains entendront ce que la grande majorité d’entre eux n’a pas lu.

The Corleone way
« People like Paul Ryan almost killed the Republican Party. Weak, ineffective & stupid are not exactly the qualities that Republicans, or the CITIZENS of our Country, were looking for ». C’est ainsi que Donald Trump a qualifié Paul Ryan, l’ancien Speaker de la Chambre des Représentants dans une série de tweets, sortis de nulle part. Alors que celui-ci a quitté ses fonctions depuis plusieurs mois. C’est là une des marques de fabriques de Donald Trump, qui n’arrête pas de régler ses comptes avec la Terre entière. Ce n’est sans doute pas Paul Ryan qui a tué le parti républicain. C’est Donald Trump qui l’a complètement transformé à son image.

Les diplomates se lâchent…
Gérard Araud et François Delattre, respectivement ambassadeur de France aux Etats-Unis et aux Nations-Unies, tous deux atteints par la limite d’âge, ont fait part de leur impression sur l’hôte actuel de la Maison-Blanche et sur son administration (Gérard Araud : de Ronald Reagan à Donald Trump ; Un monde plus dangereux selon François Delattre). Sir Kim Darroch, ambassadeur de la Grande-Bretagne aux Etats-Unis, a été encore moins diplomatique en écrivant que Donald Trump est “inept” and at risk of ending his presidency in “disgrace.” Et même s’il s’agit de fuites, c’est embarrassant pour la Grande-Bretagne et pourrait écorner les soi-disant « relations spéciales » entre les deux pays. Quant au constat de l’ex-ambassadeur, il ne laisse pas beaucoup d’espoir : « We don’t really believe [Trump’s] Administration is going to become substantially more normal; less dysfunctional; less unpredictable; less faction riven; less diplomatically clumsy and inept. »

La politique : c’était mieux avant ?
L’appréciation des Américains sur l’évolution du débat politique est sans appel. En grande majorité, ils la jugent négative : moins respectueuse (85 %), moins basée sur les faits (76%) [Everyone is entitled to his own opinion, but not his own facts ; Daniel Patrick Moynihan], moins centrés sur les sujets de fond (60%). C’est ce qu’indique une enquête réalisée par le Pew Research Center. Dire que cette tendance incombe entièrement à Donald Trump serait excessif même si 55 % des Américains pensent qu’il en est responsable. Mais cet affrontement transformé en guérilla permanente remonte à plus loin. Newt Gingrich, speaker de la Chambre des représentants, s’était largement engagé dans cette voie. Aidé en partie par l’introduction de la TV parlementaire (C-Span) qui retransmettait les débats du Congrès en direct. Et peu importe que l’hémicycle soit à moitié vide, ce nouveau média lui a permis de s’adresse directement à l’Amérique pour faire avancer son agenda contre Bill Clinton et les démocrates. Aujourd’hui, Donald Trump, accélère cette tendance et utilise Twitter pour diffuser ses propres mensonges, sans aucun filtre. « The medium is the message » nous rappelle Marshall McLuhan. Difficile en 280 caractères (une quarantaine de mots) d’exprimer une pensée nuancée.

Juin

Détricotage
Imagine-t-on des malfaiteurs dirent à la Justice que les lois ne sont pas assez répressives ou à la police qu’elle n’est pas assez efficace ? C’est un peu ce que viennent de faire 17 constructeurs automobiles, dont Ford et General Motors, viennent de dire à Donald Trump dans une lettre expliquant que l’allègement des réglementations environnementales mises en œuvre par la présente administration pourrait réduire leur bénéfice et créer une instabilité dans le secteur non soutenable. Dans le même temps, les mêmes constructeurs ont écrit au gouverneur de Californie pour lui demander de trouver un compromis avec la Maison-Blanche à mi-chemin des exigences des deux protagonistes. Gavin Newsom a répondu qu’il n’était pas intéressé. En pensant aller au-devant des attentes des constructeurs, mais surtout en défaisant ce que son prédécesseur avait accompli, Donald Trump serait-il pris à son propre piège.

Mai

Joe Biden : tous derrière et lui devant
Le petit cheval dans le mauvais temps,
Qu’il avait donc du courage !
C’était un petit cheval blanc,
Tous derrière tous derrière,
C’était un petit cheval blanc,
Tous derrière lui devant.
La question semble se transformer en quel sera le candidat capable de battre Donald Trump? Indépendamment de toute autre considération. Les électeurs accrocheront-ils à cette problématique ? Pour l’heure, l’ex-vice-président de Barack Obama fait la course en tête. Selon le RCP Average, il est crédité de 35 % devant 17 % pour Bernie Sanders. Mais il ne s’agit là que du premier tour de piste d’un 10 000 m.

Sur tous les fronts
Donald Trump ne semble vivre bien que dans un état de chaos et conflit permanent. Il est aujourd’hui face au Congrès, dont diverses commissions de la Chambre des représentants ont exigé des documents à Donald Trump, à l’IRS, à William Barr… Qu’ils ont refusé entraînant une escalade dans la tension entre l’Exécutif et le Législatif. Même le Sénat, pour pourtant à majorité républicaine, a convoqué Donald Trump Jr. Sans parler de la pétition qui a recueilli dix millions de signatures demandant l’Impeachment et plus de 600 procureurs ont fait savoir que le rapport Mueller constituerait une entrave à la Justice s’il ne s’agissait pas du président des Etats-Unis. Sur le front extérieur, Donald Trump a engagé dans la même semaine un nouvel assaut contre la Chine, la Corée du Nord et l’Iran.
Une forte dose d’incertitude et d’anxiété et des paris risqués dont on ne connaît pas l’issue.

Bill Lowers the Barr
Les Américains connaissent la fameuse déclaration attribuée à Louis XIV : « L’état c’est moi ». Mais ils ne s’attendaient pas à ce que, près de 400 ans plus tard, leur ministre de la Justice considère que leur président puisse penser : « La Loi c’est moi ». C’est pourtant ce qu’il a suggéré lors de son audition devant la commission du Sénat en affirmant qu’un président peut terminer une enquête contre lui s’il considère qu’elle est fondée sur de fausses allégations. Un peu comme un prévenu considère qu’on ne peut l’accuser puisqu’il affirme être innocent. William Barr n’a sans doute pas été choisi par hasard par Donald Trump. Il avait exprimé sa vision des très larges pouvoirs qui reviennent naturellement au président des Etats-Unis. Sa conception des checks and balances semble être : les pleins pouvoirs au président et le reste au Congrès. Le Judiciaire étant là pour garantir cette répartition. En rédigeant la Constitution des Etats-Unis, les Pères fondateurs avaient une idée en tête : écrire un texte qui prémunisse le pays contre la tyrannie. John Adams n’avait-il pas espéré que les Etats-Unis soient « a government of laws, not of men ». Les premières étant faites pour contenir le désir de prépotence des seconds.

Avril

Quelles chances pour Joe Biden ?
En déclarant sa candidature, Joe Biden est devenu le 20e candidat démocrate. Parmi ses atouts, une longue carrière politique et une excellente connaissance du système. Mais est finalement un atout à l’heure où Washington est considéré comme un marigot (swamp). Les récentes élections dans le monde montre qu’il est peut-être préférable d’être acteur ou chanteur que politique. On peut aussi prendre un autre point de vue. Combien de vice-présidents sont-ils devenus présidents ? Neuf en remplacement d’un président, assassiné, décédé ou démis. Gerald Ford est devenu président après que Richard Nixon a été destitué. Mais seulement quatre vice-présidents ont été élus : John Adams (1789 -1797), élu président en 1796, Thomas Jefferson (1797–1801), élu président en 1800, Martin Van Buren (1833–1837), élu président en 1836 et George H. W. Bush (1981–1989), élu président en 1988. On le voit, c’est donc un événement assez peu probable. Mais cette observation est-elle réellement pertinente ?

No collusion, No obstruction ?
C’est précisément ce que ne dit pas le rapport Mueller. Sur la collusion : « In whether evidence about collective action of multiple individuals constituted a crime, we applied the framework of conspiracy law, not the concept of collusion ». Y a-t-il eu entrave à la justice ? Là encore, le rapport ne répond pas à cette question. « Accordingly, while this report does not concluded that the president committed a crime, it also does not exonarate him ». Pourquoi une telle décision de la part de Robert Mueller ? Tout simplement parce qu’il se range à la règle de l’Office of Legal of Council qu’un président en exercice ne peut pas être inculpé. Robert Mueller livre donc des faits et c’est au niveau politique que se situe la réponse et au Congrès de la donner. Et non à William Barr qui s’est comporté comme l’avocat du président type Roy Cohn et non comme le ministre de la Justice.  Et les faits ne manquent pas : mensonges répétés du président et de son entourage (librement ou à la demande du président), actions répétées pour essayer de stopper l’enquête, une équipe de campagne heureuse de tirer parti d’actions d’une nation étrangère pour nuire à son opposant, un fonctionnement chaotique à la Maison-Blanche où l’anormal et l’amoral sont la règle et non l’exception. Pour autant, l’erreur pour les démocrates serait de consumer leurs forces dans une procédure d’impeachment. Mieux vaut se concentrer sur les vrais sujets et s’en remettre aux urnes en 2020. Quant aux républicains, ils sont bien silencieux.

18 + 1
« Abondance de biens ne nuit pas » dit-on couramment. Ils sont 18 démocrates à s’être déclarés candidats aux prochaines élections présidentielles de 2020. Et Joe Biden, laissant passer le vent mauvais généré par ses accolades un peu prononcées, devrait lui-aussi rejoindre les rangs des postulants. Mais cette multiplicité ne doit pas obscurcir les messages ni brouiller les rôles. Les démocrates devraient opérer une sorte de séparation du travail : d’un côté, les élus de la Chambre des Représentants qui ne sont pas candidats pour « s’occuper » de Donald Trump et, de l’autre, les candidats pour travailler leur projet et s’attaquer aux vraies questions qui se posent à l’Amérique de 2020.

Le phénomène AOC
En France, l’acronyme AOC signifie Appellation d’origine contrôlée et est synonyme de qualité. Aux Etats-Unis, AOC est la manière raccourcie pour désigner Alexandria Ocasio-Cortez. La représentante élue aux dernières élections de mi-mandat est aujourd’hui la coqueluche des démocrates et la tête de Turc des républicains. Il est vrai que la plus jeune élue de la Chambre des représentants est plutôt pugnace et ne semble avoir peur de rien. Elle a été à l’initiative du Green New deal, un projet de loi sur le climat qui a peu de chance de passer, mais qui aura marqué les esprits, en bien ou en mal. Cette initiative a « rouvert la discussion sur les politiques à conduire face au changement climatique. L’impact de cette initiative est déjà important, aux États-Unis comme ailleurs » écrit Jean Pisani-Ferry, ancien Commissaire général de France Stratégie, dans sa note d’analyse mensuelle « Transition écologique : Choisissons le réalisme ». A l’aune des réseaux sociaux qui mesure désormais l’influence d’un élu, AOC a près de 4 millions de followers, certes encore loin derrière Donald Trump (60 M) ou Barack Obama (106M).

Mars

Le rapport Mueller est arrivé !
Le procureur spécial Mueller a donc remis son tant attendu rapport au ministre de la Justice. Pour l’heure, on ne sait pas grand-chose de plus que les nombreuses informations révélées depuis des mois et les inculpations et/ou condamnations déjà prononcées dans l’entourage proche de Donald Trump. Curieusement, ce n’a pas publié (au dimanche midi heure de Paris) de tweet criant victoire. Ce que l’on sait. Le rapport ne préconise aucune nouvelle inculpation. La Chambre des représentants a voté à la quasi-unanimité qu’elle souhaitait voir le rapport dans son intégralité. Et Donald Trump a déclaré qu’il le souhaitait aussi. Mais ce rapport ne fait que clore un chapitre. Tout un livre politico-juridique est ouvert et loin d’être refermé.

16 + 1
Seize candidats démocrates – dont six femmes, un record – se sont déclarés pour les primaires de 2020. Auxquels il faut ajouter Joe Biden qui s’est dévoilé avant de se rétracter mais dont la candidature ne fait plus de doute et qui fera alors office de « front runner ». A l’instar de 2016 où les républicains pensaient que c’était leur tour après huit années d’Obama – 17 candidats avaient tenté leur chance -, 2020 semble donner des ailes aux démocrates.

En attendant Mueller !
Le rapport du procureur spécial ne sera pas une arlésienne et contrairement à Godot, il doit bientôt arriver. Il devrait répondre à six grandes questions selon Quinta Jurecic, rédacteur en chef du magazine Lawfare. Le projet de la tour Trump à Moscou. Les informations sur Hillary Clinton. Roger Stone et Wikileaks. Les promesses de Michael Flynn pour lever les sanctions contre la Russie. L’influence de la Russie dans les élections de 2016. L’entrave à la justice. Et sur ces différents sujets, le rapport devrait éclairer sur le degré d’implication de Donald Trump.

The art of no deal
No deal is a good deal. Telle est la conclusion à laquelle sont parvenus nombre d’analystes concernant le sommet entre la Corée du Nord et les Etats-Unis. Le risque était que, soucieux d’obtenir un succès diplomatique facile sur la scène mondiale – et pourquoi pas le prix Nobel de la Paix – et faire oublier ses tracas sur le plan intérieur, Donald Trump fasse des concessions sans réelles contreparties. Quand Donald Trump fait référence à son « ami » Kim Jong Um, on a de quoi s’inquiéter. N’avait-il pas déclaré lors d’un meeting parlant de Kim : « We fell in love » ? Finalement, Donald Trump est rentré aux Etats-Unis les mains vides, sans accord. Cela ne l’a pas empêché de mentionner à son retour de « very substantitive negociations ». Mais parfois « Pas d’accord » est parfois mieux qu’un « mauvais accord ».

Février

Urgence ou comment se hâter lentement
En temps normal, c’est-à-dire si un président normal était à la Maison Blanche, les républicains auraient poussé des cris d’orfraies à l’idée qu’un président détourne des dépenses votées par le Congrès à des fins politiques. Mais voilà, les Républicains semblent avoir perdu leur boussole qui leur indiquait en permanence la direction du « gouvernement limité ». Les démocrates, par le biais de la Speaker de la Chambre Nancy Pelosi, ont utilisé un argument choc. Si un président peut décréter l’urgence nationale pour un mur, alors pourquoi ne serait-il pas possible de faire de même pour l’état d’urgence créé par le changement climatique ou les tueries de masse ? Cet argument pourrait motiver donc les républicains à voter contre la mesure prise par leur président non pas parce qu’elle viole la Constitution mais parce qu’elle pourrait ouvrir une boite de pandore pouvant être exploitée par un futur président démocrate.

Liberté, inégalité, américanité
Les 400 Américains les plus riches ont triplé leur part de la richesse nationale depuis 1980 ? C’est que montre un article du Washington Post qui fait référence à une étude que vient de publier l’économiste Gabriel Zucman. Dit autrement, ces 400 Américains possèdent plus que les 150 millions les moins fortunés des Etats-Unis dont la richesse cumulée est tombée dans le même temps de 5,7 % à 2,1 %. L’inégalité est revenue au niveau des années 1920, les fameuses “Roaring Twenties”, effaçant toutes les avancées résultant de la domination des démocrates, de Franklin Roosevelt à Lyndon Johnson. Jusqu’à quand ?

Affluence côté démocrate
Cory Booker, Sénateur du New Jersey et ancien maire de la ville de Newark, s’ajoute à la liste déjà longue des candidats déclarés à la primaire démocrate en vue des élections de 2020 : Pete Buttigieg, Julian Castro, John Delaney, Tulsi Gabbard, Kirsten Gillibrand, Kamala Harris et Elisabeth Warren (la première à s’être déclarée). A noter que, pour l’instant, la parité homme/femme est parfaitement respectée : 4 femmes, 4 hommes. Maintenant les questions sont : Quelle option va se dégager – centrisme ou progressisme ?  et quels sujets vont émerger ? Pour la maire de New York Bill de Blasio, interviewé par Bill Maher (voir l’interview), la question ne se pose pas « je suis fatigué des démocrates que ne veulent plus s’afficher démocrates ». En clair, les progressistes doivent imposer leur vision.

Janvier

Yes it was the Russians !
« Was it all just a dream ? » C’est ainsi que commence le dernier film de Michael Moore avec une introduction menée tambour battant qui se termine à 2h19 du matin le 9 novembre 2018 indiquant que l’image du nouveau président des Etats-Unis était projetée sur l’Empire State Building. « How the F… did this happen ? ». Après quelques images montrant Donald Trump entrant dans le Bureau Ovale, Michael Moore change de plan avec Vladimir Poutine entrant dans la salle d’apparat du Kremlin accompagné du commentaire : « Yes It was The Russians ». « Trump and His Associates Had More Than 100 Contacts With Russians Before the Inauguration » titrait le New York Times cette semaine. Dans ces conditions, difficile de croire qu’il n’y a pas eu « collusion » entre l’équipe de campagne de Donald Trump et des officiels russes. « But Collusion is not a crime » affirme Rudy Giuliani, un des avocats de Donald Trump. On est convaincu.

A chaque semaine sa révélation
La semaine dernière, le NYT révélait que le FBI avait ouvert une enquête pour déterminer si le président des États-Unis ne constituait pas une menace pour la sécurité des États-Unis en étant manipulé par la Russie. Cette semaine, c’est au tour de Buzzfeed de dévoiler que Donald Trump aurait demandé à son homme de main/avocat Michael Cohen de mentir devant le Congrès sur ses projets de construction de Tour Trump à Moscou. Rompant avec une discrétion absolue, le procureur spécial Mueller a publié une déclaration indiquant que ces informations étaient imprécises sans toutefois les infirmer complètement. Donald Trump mettrait-il en défaut la phrase d’Abraham Lincoln selon laquelle « You can fool all the people some of the time, and some of the people all the time, but you cannot fool all the people all the time ». Le premier président républicain des États-Unis avait également déclaré : « My dream is of a place and a time where America will once again be seen as the last best hope of earth ».  On attend avec impatience l’audience de Michael Cohen devant le Congrès le 7 février prochain.

Un président sous influence ?
Le New York Times révélait cette semaine que le FBI avait ouvert une enquête pour déterminer si le président des États-Unis ne constituait pas une menace pour la sécurité des États-Unis en étant manipulé par la Russie.  Une enquête à deux volets : criminel et contre-espionnage. On doit se pincer pour être sûr de ne pas rêver. Et puis, la présidence actuelle est tellement atypique que l’étonnement n’est que de courte durée tant on s’est habitué à l’idée que tout était possible. Évidemment, les soutiens de Donald, Fox & Friends and Company ont hurlé au complot et au Deep State. Les républicains sont restés relativement muets malgré le côté hors norme de l’information.
Quant au président, il a utilisé ses arguments habituels de dénigrement des institutions et des personnes : « The corrupt former leaders of the FBI, Lyin’ James Comey, a total sleaze!, a Crooked Cop, Bob Mueller, & the 13 Angry Democrats, I have been FAR tougher on Russia than Obama, Bush or Clinton. Maybe tougher than any other President, Part of the Witch Hunt ». L’article du NYT n’est explicite sur ce qu’est devenue cette enquête, mais il est vraisemblable que les résultats ont été repris par Bob Mueller.

Kakistocracy
The New Kakistocracy tel est le titre d’un article publié par The American Spectator, un magazine convservateur qui, contrairement au feu Weekly Standard, a largement endossé la politique de Donald Trump. Je connaissais népotisme, autocratie, kleptocratie, ploutocratie, des notions largement mises en mouvement depuis 2017 au plus niveau de l’Exécutif américain. Pas Kakistocracy qui, selon Wikipedia se définit par « a system of government which is run by the worst, least qualified, or most unscrupulous citizens ». Si j’avais fait du grec j’aurai pu facilement le déduire puisque kakistos signifie tout simplement worst. L’article utilise ce mot savant pour des critiques ad hominem des Représentants fraichement élus en novembre dernier : « Ilhan Omar, a Somali Muslim from Minneapolis Ilhan Omar, a Somali Muslim from Minneapolis who it appears might be married to her own brother, comically ignorant Alexandria Ocasio-Cortez, Brad Sherman, the California leftist, Hank Johnson, who suffers from Hepatitis-C, a disease commonly found in heroin addicts, bug-eyed cretin Adam Schiff… » Des critiques plus qu’élégantes !

Il est à remarquer que la définition utilise la conjonction de coordination « ou » mais rien n’empêcherait qu’elle puisse utiliser le « et » ce qui permettrait de décrire encore plus finement le 45e président des Etats-Unis.

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