Vendredi dernier, Donald Trump a menacé de mettre un véto au Hong Kong Human Rights and Democrat Act, introduit en 2014 et qui vient d’être voté par le Congrès de manière quasi unanime. Une action de real politik penseront certains, une trahison des Hongkongais sacrifiés sur l’autel des négociations commerciales entre les États-Unis et la Chine. Dans un article intitulé Donald Trump’s America Can’t Fight Xi Jinping’s China, James Palmer mentionne les réactions de plusieurs experts : “I hate Trump, but I have to respect what he’s done on China.” Richard Nixon avait ouvert les relations avec la Chine, Donald Trump se présentait comme le défenseur des intérêts américains face à la montée hégémonique de la Chine. Mais pour quels résultats ? On attend toujours. Sans parler de son admiration pour le caractère autocratique de son homologue chinois.
« Trade war are good and easy to win » avait fanfaronné Donald Trump dans un tweet en mars 2018. Au-delà des éloges que n’hésite pas à s’attribuer l’actuel hôte de la Maison-Blanche, la réalité est assez différente. Good on peut en discuter, Easy to win, les récents mois démontrent le contraire. Car pour l’heure les résultats de cette guerre commerciale se font attendre. Nous n’en sommes actuellement qu’aux affrontements et aux représailles, principalement sous la forme de droit de douane.
En 2018, le déficit commercial des États s’est élevé à 627 milliards de dollars en augmentation de 125 milliards par rapport à 2017. Et en 2019, un nouveau « record » devrait être battu. A la fin septembre, le déficit était de 481 milliards en hausse de 24 milliards par rapport à la même période de 2018. Pour mémoire, lors de la dernière année du second mandat de Barack Obama, le déficit commercial des États-Unis avec la Chine s’était élevé à 346 Mds$.
Maintenant avec la Chine qui est la cible principale de Donald Trump dans cette guerre commerciale. Le déficit commercial s’est élevé à 419 milliards en 2018, le niveau record jamais atteint. En 2019, la réduction du déficit est le résultat mécanique de la diminution des échanges entre les États-Unis et la Chine : Importations égales à 341 Mds$ contre 395 Mds$ et exportations à 78 Mds$ contre 94 Mds$.
Et avec la Mexique ? Le déficit commercial s’est élevé à 80 Mds$, une augmentation de 27 % sur l’année 2016. Et 2019, un nouveau record sera franchi.
Donald Trump répète à l’envi que ce sont les Chinois et les Mexicains qui payent les droits de douane. Alors qu’en fait ce sont des surcoûts payés par les entreprises américaines qui le répercutent plus ou moins sur les prix des produits vendus aux particuliers. Sur les neuf premiers mois, le surcoût des droits de douane a coûté aux Américains à 71 milliards de dollars. Un supplément qui efface les faibles augmentations de salaire des classes moyennes à la suite de la réforme fiscale
Face aux représailles chinoises sur les ventes de soja américain, l’administration a mobilisé 28 milliards de dollars en compensation pour les fermiers du Midwest. Pour l’heure, cette guerre a eu des effets de ralentissement de l’économie chinoise.
Certes, la montée en puissance de la Chine pose un problème et il fallait réagir. Mais on peut douter de la méthode retenue. Pourquoi se retirer de l’accord de partenariat Transpacifique (Trans-Pacific Partnership Agreement) réunissant douze pays des deux côtés du Pacifique et conçu notamment pour faire front ? Pourquoi se mettre à dos l’Europe avec qui une politique concertée sans doute été plus efficace ? Quant à la manière façon cow-boy d’attaquer les chinois, on peut douter qu’elle soit la plus efficace ? Bref, une fois encore, Donald Trump a abordé ce problème en promoteur immobilier peu scrupuleux qu’il a été toute sa vie et non en chef d’État. Une reconversion professionnelle à 70 ans est toujours difficile.
Sachant que la question des droits de douane n’est pas nouvelle et s’est posée dès la création des États-Unis avec un antagonisme entre le Nord favorable aux Tariffs pour défendre son industrie et le Sud organisé autour de la culture du coton et de l’esclavage totalement opposé. L’économie libérale de ces trente dernières et la mondialisation a été beaucoup trop loin. Le container et l’Internet ont permis des délocalisations à outrance qui ont entraîné la faillite de l’industrie américaine. Une faillite très bien décrite dans le livre de Richard Longworth Caught in the Middle: America’s Heartland in the Age of Globalism. Un livre qui montre les ravages de cette mondialisation sauvage sur le Midwest, poumon industriel des États-Unis, qui a porté Donald Trump à la Maison-Blanche.